1537-2015
L’étang de Paimpont
De l’étang des moines à une réserve d’eau pour les Forges de Paimpont
L’étang de Paimpont est un étang artificiel créé par l’abbaye de Paimpont à l’époque médiévale. À partir de 1653, des accords passés entre la communauté monastique et les Forges de Paimpont permettent de l’utiliser comme réserve hydraulique. Vendu comme bien national en 1792, il demeure une des principales sources d’alimentation des Forges jusqu’à leur fermeture en 1884. Il est propriété du Conseil Général depuis 1986.
Un étang artificiel
L’étang de Paimpont ou de l’abbaye est un étang artificiel 1 situé au pied de la colline de Haute Forêt. Il est alimenté par quatre petits cours d’eau dont deux possèdent un débit suffisant pour fonctionner en continu : le ruisseau de Branhagot et celui du Pâtis vert.
Il couvre une surface d’environ 50 hectares en grande partie établie sur un substrat d’altérites remaniées au Quaternaire et accumulées en bas de pente. — Voir aussi : Paysages et Géologie en Brocéliande - II

Son eau se déverse dans la vallée de la Moutte jusqu’à l’étang des Forges, où elle rejoint le réseau hydrographique du ruisseau du Pas-du-Houx avant de confluer avec l’Aff au Pont du Secret.

Un étang créé par les moines
Aucun document antérieur au 16e siècle ne mentionne l’étang de Paimpont.
L’étang de la communauté bénédictine ?
Une communauté bénédictine est attestée à partir du début du 12e siècle à Paimpont. Cette communauté monastique est nommée « sancta Maria Heremipenpont », qui peut se traduire par « sainte Marie du désert de Penpont » 2.
On peut supposer que cette communauté est à l’origine de la construction d’une retenue d’eau permettant d’assainir la zone humide constituée de tourbières, située au pied de la colline de Haute-Forêt. L’établissement d’un étang a aussi pour fonction d’assurer un approvisionnement en poisson ainsi que de permettre l’implantation de moulins sous la digue.

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L’étang et ses chaussées dans les aveux des 16e et 17e siècles
Le plus ancien document mentionnant l’étang de Paimpont provient d’un aveu daté de 1537. Le terme de chaussées apparaît au pluriel, laissant sous-entendre qu’il y avait alors plus d’un étang.
— OILLIC, Jean-Charles, Végétation, peuplement, métallurgie en Brocéliande : étude interdisciplinaire de la forêt de Paimpont (Bretagne, France) depuis la fin du Tardiglaciaire, Thèse de doctorat en Sciences de la Matière, Rennes 1, 2011, Voir en ligne. —
Le 12 juin 1541, un aveu rendu par l’abbé François de Laval (1498-1554) évoque à son tour une chaussée et une retenue d’eau.
Les maisons abasialles, église, chappelles et mestairies de la dite abbaye de Notre Dame de Paimpont siises en la forest de Bréxelian avecques leurs courtz déportz yssues, jardins, prez, prayries, terres arables et non arables, boays de haulte fustaille nommée la Monstre, estang, moulins, bardaulx, chaussée et retenue d’eaulx avecques leurs regorgemens en submertion deaue, clostures, colombier, garaines, landes, froslz galloiz.
L’existence de plusieurs chaussées est attestée dans les aveux de l’abbaye de Paimpont de 1567 et 1638.
[…] Item l’estange qui circuit partye dicelle abbaye, moullins, bardeaulx, chaulssees et retenues d’eaues avecques leurs regorgementz et submersion d’eaulx qui prant jusques estz landes appellees les Landes Sainct Gicquel, icelles y comprinses et estantes de la dite abbaye. Et le pré appellé les Noes Pouryes et de là à une touche de boys appellée la Brousse du pré estz poullains et allante de ladite brousse qui est de ladite abbaye jusques au puys du fer comprenant deux aultres petites brousses et tousches de boys qui sont entre ladite touche du pré estz poullains et le puys du fer. Quelles touches de noys sont de ladite abbaye. Et dudit puys de fer allant aulx fontaynes de Gilloret desquelles part l’eau qui va par ruysaulx a aulx pompes en ladite abbaye en pourprins et d’aultres partz joignantes aulx clostures de ladite abbaye appellées les Clostures de la chappelle et au boys de la moustre dudit Paimpont.
Les chaussées sont encore mentionnées en 1679.
L’étang de Paimpont et ses moulins 3, chaussées et retenues d’eau, avec leurs regorgements qui prennent jusqu’aux landes appelées landes de Saint Judicaël [...]

La construction de la chaussée au 15e siècle
Un manuscrit du 17e siècle attribue la construction de la chaussée à un abbé du début du 15e siècle, Olivier Guiho.
Oliverius Guiho, insigne personnage et 13e abbé dudict lieu, pendant l’espace de cinquante ans, qui a, de son temps, presque rebasti toute l’abbaye, et faict ceste admirable chaussée d’estang voisin du mesme lieu. BARLEUF, abbé Vincent, « Relation de l’Abbaye de Nostre-Dame de Painpont en Bretagne, Ordre des Chanoines réguliers de la Congrégation de France », Archives Départementales d’Ille-et-Vilaine 5 J 164, 1670, Voir en ligne.
Une existence antérieure de la chaussée ne peut toutefois être écartée.
L’expression « faict cette admirable chaussée » n’exclut pas une structure plus ancienne dont la vétusté a pu engendrer un besoin de restauration ou de reconstruction, et ce d’autant plus que l’abbaye semble avoir connu un état de délabrement avancé au moment de la prise de fonction de l’abbatiat par Olivier Guiho.
S’agit-il de la chaussée dite des moines
qui reliait les bâtiments de l’abbaye à la fontaine Notre-Dame-des-Chesnes
, située de l’autre côté de l’étang.
Les pèlerins s‘y rendaient jadis par la chaussée, dite des moines, que l’on voit encore quand l’eau de l’étang à baissé par l’effet de la sécheresse ou de l’écoulement. De la place des Litières, sise auprès de l’église, on arrivait à une porte qui ouvre actuellement l’étable des religieuses. Ce passage n’est connu que sous le nom de chemin des pèlerins, qui correspondait précisément avec l’extrémité de la chaussée.

Le sondage sonar de l’étang
En 2009, l’archéologue Jean-Charles Oillic entreprend un sondage au sonar de l’étang de Paimpont.
Ce sondage confirme l’existence de la chaussée reliant l’abbaye de Paimpont à la fontaine Notre-Dame-des-Chesnes
.
Cette hypothèse a été confirmée par un relevé sonar du fond de l’étang effectué au mois de novembre 2009. Sur la mosaïque réalisée à partir de l’ensemble des relevés, une structure approximativement en forme de « L » apparaît (Figure 88). Sur certains profils du relevé sismique réalisé en même temps que le sonar, cette structure apparaît. Elle a une élévation d’environ un mètre (Figure 89). Cette construction barre l’ensemble du fond de l’étang et correspond à une ancienne chaussée. A l’extrémité orientale de l’étang, une seconde digue existait déjà à l’époque.

Cette chaussée a été submergée par le rehaussement du niveau de l’étang entre la fin du 17e et le début du 19e siècle.
1653-1845 — Un étang pour les Forges de Paimpont
Le 29 août 1653, Jacques de Farcy et François d’Andigné achètent la forêt de Brécilien au duc de La Trémoïlle avec le droit d’y faire bâtir des forges
.
L’étang du Pas-du-Houx et l’étang de Paimpont sont alors les principales sources d’énergie hydraulique pour les nouvelles forges. Selon Jean-Charles Oillic, ce dernier serait même le plus ancien du système d’alimentation des Forges
.
L’absence d’un réseau d’étangs 4 permettant d’alimenter les forges en énergie hydraulique, place les nouveaux maitres de la forêt dans l’obligation de composer avec la communauté monastique propriétaire de l’étang de Paimpont 5.
Les droits de gestion de l’étang
En 1653, les propriétaires des Forges négocient un droit de gestion de l’étang avec les religieux de l’abbaye. Cette transaction est connue au travers d’un procès daté de 1752.
...l’eau qu’il est permis aux propriétaires de tirer de l’étang de Paimpont par la transaction de 1653 doit être prise pour l’endroit le moins dommageable pour les religieux de l’abbaye faute de l’avoir exprimée autrement... .
Selon l’acte de 1653, confirmé en 1819, les propriétaires des Forges obtiennent à titre onéreux le droit de prise d’eau dans les temps de sécheresse sur les étangs de Paimpont.
— Tigier, Hervé (2022) op. cit. p. 519 —
En 1792, ce droit de prise d’eau est vendu avec l’étang de Paimpont.
Rente perpétuelle de 561 francs due à Monsieur de Montcuit pour les minerais de la Moutte et la prise d’eau jusqu’au chommage dans l’etang de Paimpont, rente vendue nationalement sur les moines de Paimpont.
Un bail daté du 17 août 1812 stipule que les propriétaires des Forges de Paimpont peuvent utiliser la moitié de l’eau de l’étang de Paimpont
.
Le 30 août, le propriétaire provoque la descente du juge de paix et le déplacement de Monsieur Leveillé, directeur des forges, accompagné du surgarde Ronceray « pour voir constater le fait de chommage du troisième moulin et qu’en peu, le second sera en même état ... quoique pour vérifier ce fait, on ait fait lever la palle au dessus du noc pour donner autant d’eau qu’il puisse en passer. Au reste, il a aussi été vu et reconnu qu’il reste fort peu d’eau dans l’étang ».
En novembre 1812, ce conflit sur l’utilisation de l’eau de l’étang pour l’alimentation des forges est toujours en cours.
Procès verbal, dressé en présence des Sieurs Ollivier Lecomte, marchand, et Jean Letul, aubergiste, constatant, à la demande de Mathurin Trivallet, meunier, les faits suivants, celui-ci ayant dit que "Monsieur Leveillié, directeur des forges de Brécillien, avait environ les sept heures du matin de ce jour, levé une pelle recemment placée à la chaussée" de l’étang de Paimpont : "... rendus jusqu’à la ditte pelle, placée vers le bout nord ouest de laditte chaussée, nous l’avons trouvée exhaussée et l’eau coulant. Nous avons fait marquer sur les pierres la hauteur de l’eau, et nous avons renvoyé la continuation du présent au jour que la ditte pelle sera fermée. [...] retournés ce jour vingt huit novembre ... nous l’avons trouvée fermée et nous avons vérifié et reconnu que l’eau dudit étang de Paimpont avait baissé de trente trois centimètres."
Les rehaussements de l’étang au 19e siècle
L’importance de l’étang de Paimpont dans l’apport en énergie hydraulique des forges lui a valu plusieurs transformations au cours du 19e siècle. Selon Jean-Charles Oillic, l’étang a peu changé entre 1727 et 1823.
L’étang avait déjà un aspect assez similaire à l’actuel sur le cadastre napoléonien de 1823, mais également sur la carte de 1727. La principale différence observée sur ce second document est peut-être des dimensions plus réduites à l’extrémité méridionale.


Le déplacement du déversoir en 1815
Le mercredi 25 septembre 1844, une expertise ordonnée par le jugement du tribunal de Montfort du 29 juillet 1843 est rendue entre le Sieur Yves Lebreton et Mr. Philippe Jouin, assistée du Sieur Métayer. L’objet de cette expertise est d’évaluer l’impact d’un projet d’élévation de 50 centimètres du déversoir de l’étang pour les Forges de Paimpont 6.
Ce document comprend de nombreuses précisions concernant les aménagements réalisés entre 1815 et 1834 sur la chaussée de l’étang 7.
Il nous apprend qu’avant 1815, le déversoir se trouvait à six à neuf mètres au sud
de l’extrémité nord de la chaussée de l’étang. Il était alors connu sous le nom des bourbiers
. Ce déversoir n’étant point couvert, on passait à gué sur cette partie du chemin.
[...] l’ancienne coupure encore apparente de ce chemin d’eau offre trois mètres d’ouverture sur l’étang et se réduit à environ deux mètres à l’extérieur de la chaussée vers l’Est [...]

Le prélèvement de l’eau pour alimenter les Forges de Paimpont en énergie hydraulique n’était pas réglé par le niveau du déversoir mais à l’aide d’un barrage de trois portes
situé légèrement en amont de celui-ci.
[...] mais contrairement à un usage assez fréquent dans ce pays, ce n’était pas la base de cette sorte de déversoir qui réglait la hauteur des eaux de l’étang ; il existait un barrage de trois portes au moyen desquelles les propriétaires des forges exerçaient leur droit de prise d’eau dans ledit étang, et c’était le dessus de ces mêmes portes qui devait marquer le niveau de la hauteur légale.
En 1815, le déversoir est déplacé à l’extrémité nord de la chaussée. Ce nouveau déversoir est recouvert en forme de pont (comme passage public)
En 1819, Jean Houssay est en conflit avec les propriétaires des Forges à propos de l’indemnité pour prise d’eau sur l’étang. Il est accusé d’avoir bouché les anciens bourbiers ou vannes et les a remplacés par un déversoir placé plus bas que lesdits bourbiers 8
. — ADIV 4E 21 47 - 21 mai 1819 in Tigier, Hervé (2022) op. cit. p. 367 —
Le rehaussement de 1834
En 1834, ce déversoir est exhaussé d’environ un mètre par rapport au niveau de 1815.
[...] l’exhaussement de 1834, a été pratiqué au moyen de dix à douze grosses pierres presque brutes formant un demi-cercle en avant et à l’abord de l’ouverture du déversoir ; ces pierres sont simplement jointes et accotées par des terres formant glacis vers l’eau. Nous avons de plus remarqué qu’elles étaient recouvertes de quelques mottes de gazon que nous avons ôtées pour prendre nos repères de niveau à la surface même de ces pierres. A l’égard de la chaussée dans son ensemble, elle n’a pas plus de 80 centimètres (terme moyen) de hauteur au dessus de ce déversoir actuel.
Depuis ce rehaussement, les propriétaires des forges, outre l’eau qu’ils reçoivent du moulin, font leur prise d’eau à volonté par un ancien noc situé entre celui du moulin et le déversoir.
Le rehaussement de 1834 occasionne des problèmes d’inondations sur la route Paimpont-Campénéac.
Le conseil délibérant sur les moyens à prendre pour contraindre MM. les propriétaires des forges de Paimpont à abaisser et détruire le déversoir de l’étang de Paimpont puisque le travail fait par eux depuis deux ans à ce déversoir, fait élever l’eau de l’étang de manière à empêcher la communication entre Paimpont et Campénéac, à dégrader la chaussée et aussi à faire couvrir les propriétés riveraines...
1845 — un projet d’Étienne de Formon
En 1845, le propriétaire des Forges entame des travaux de drainage de la « Lande de Paimpont » en créant une rigole de 900 mètres de long permettant d’augmenter l’alimentation en eau de l’étang de Paimpont. Ces travaux entrainent une procédure de justice entre Étienne de Formon et le sieur Métayer, un des propriétaires de la lande. Le 10 avril de la même année le tribunal de Montfort rend son jugement entre le Sieur Julien Métayer, propriétaire, et Mr. Formon, propriétaire à Paris, relativement à l’écoulement des eaux de la lande de Paimpont vers l’étang du même nom
, en présence de M. Radenac, garde général des bois de Mr. Formon 9.
1790-1844 — La propriété de l’étang de Paimpont
L’étang durant la Révolution
Du 18 au 29 novembre 1790, un procès-verbal d’estimation des terres et dépendances de l’abbaye de Paimpont est réalisé en vue de leurs ventes par adjudication. L’étang est alors mentionné sous les noms de grand étang de Paimpont
ou étang de l’abbaye de Paimpont
.
[...] nous nous sommes occupés à connaître l’étendue de l’étang au couchant d’iceux ; et après en avoir fait le tour, nous avons trouvé qu’il contenait environ trois quarts de lieues de circonférence 10. Le tout estimé ... quatrième classe... 18000 livres.

Vingt-trois lots de bâtis et de terres, dépendant de l’abbaye, sont mis en vente nationalement par adjudication le 7 novembre 1791. Deux de ces lots intéressent particulièrement les propriétaires des Forges : le lot 10, trois moulins à eau sur le grand étang
pour 18 000 livres ainsi que le lot 11, les bois-taillis de la forêt de Brécilien
pour 12 000 livres. — BELLEVÜE, Xavier de, Paimpont, Rééd. 1980, Marseille, Lafitte Reprints, 1912.
[page 76] —
Les propriétaires des Forges se portent acquéreurs du Bois de la Moutte et de l’étang voisin de l’abbaye, mais la commune de Paimpont est elle aussi intéressée par ces biens. M. de Farcy entend s’opposer par tous les moyens aux prétentions de la commune sur ces lots : Il serait insensé de les lui laisser à vil prix, la conservation de notre forge en dépend
. — A.D.I.V 2 ER 21 —.
Les biens sont vendus le 30 mai 1792, par adjudication du tribunal de Montfort. Les trois moulins à eau sur le grand étang
échappent aux propriétaires des Forges. — GUILMAULT, Colette, « Le bourg de Paimpont : évolution de l’espace au XIXe siècle », Bulletin de la Société Historique et Archéologique d’Ille-et-Vilaine, Vol. 111, 2007. —
1796-1823 — L’étang de la famille Houssay
Le 25 décembre 1796, Jean Houssay (1743-1799) de Beauvais acquiert la moitié de l’étang et la moitié des trois moulins.
Les Citoyens François Marie Robert et Jean Marie Janson, les deux au chef lieu, vendent pour 5000 livres en numéraire, payé comptant, au Citoyen Jean Houssay, de Beauvais, la moitié qu’ils possèdent dans l’étang de Paimpont et dans les trois moulants qui en dépendent "y compris aussi seulement le fonds du bois situé au derriere desdits moulins...". Ils signent "Robertfils" "ieanhoussaiy"
Le 12 décembre 1798, il achète à François Marie Robert son droit au quart dans la propriété desdits moulins et étangs
.
Houssais père a acquis, par divers actes successifs, la propriété des moulins et étangs de Paimpont. Par un de ces actes, en date du 22 frim. an VII, [12 décembre 1798] Robert père, en vendant à Houssais son droit au quart dans la propriété desdits moulins et étangs, se réserve pour lui, ses héritiers et ayant-cause, à perpétuité, son quart dans le droit de pêche auxdits étangs.
En 1812, son fils Jean Mathurin Houssay
, propriétaire des moulins, signe un bail avec le meunier Nicolas Jallu.
le bail du 17 août 1812 entre Jean Mathurin Houssay, adjoint et propriétaire, et Nicolas Jallu et femme, est réduit et modéré en son prix, de 1200 à 700 francs, ledit Houssay renonçant à la gratuité de la mouture de ses grains qui seront cependant moulus aussitôt qu’ils seront apportés.
En 1818, Jean Mathurin Houssay afferme les trois moulins au meunier Nicolas Jallu pour six années supplémentaires.
Jean Mathurin Houssai, propriétaire, adjoint de la mairie de Paimpont, afferme pour six années les trois moulins de Paimpont à Nicolas Jallu, meunier et Françoise Honoré Forest sa femme, « avec la maison, refuge à porc, écurie et enclos en dépendant ... tel qu’en jouissent actuellement les preneurs aux fins de bail notarié du » 17 août 1812 (Me David) pour 1150 francs à payer en avril et octobre, Mathurin Foret et Jeanne Lecordier, à la Ville Danet, se portant caution : « fourniront en outre chaque année au bailleur huit quintaux ou seize bouexeaux de bled seigle mesure du Gué de Plélan laquelle prestation est évaluée » à 93 francs ; « ledit Jallu aura droit de pêcher dans l’étang à la ligne au lieu et place du bailleur, même de toute autre manière que pêcheront les autres ayant droit de pêche audit étang à la charge de faire part du poisson au Sr. bailleur ; convenu que le dédommagement qui pourra être obtenu par le bailleur de messieurs les propriétaires des forges, tournera au profit des preneurs qui feront constater le chommage à leurs frais lors que le cas y échoira ». Seulement signé « Houssay ».
En 1822, Jean Mathurin Houssay, de la Ville-Danet, est alors seul propriétaire de l’étang. Il entre en conflit avec des riverains concernant les limites de sa propriété.
[...] le meunier de Paimpont, fermier du Sr Houssay de Sur l’Isle, se permit de couper de la litière dans une portion de lande où se trouve une fontaine dite la fontaine de la Vierge et un petit douet nommé le douet des Carrés, laquelle portion de lande sépare la pièce de la Cloture d’une autre portion de lande nommée la Prée des Carrés. Cette lande appartient nécessairement à Person, autrement toutes ses pièces ne se joindraient plus comme le portent ses titres. D’un autre côté, l’étang du Sr Houssay doit servir en cet endroit de limites aux propriétés de Person et quoique la limite de cet étang soit très incertaine, on ne peut jamais considérer comme partie du fond de cet étang, les terreins contigus qui produisent de la lande et sur lesquels encore l’eau ne monte jamais.
Le Sr Houssay propose que les limites de son étang soient reconnues et suggère d’attendre pour cela "que les eaux soient à la hauteur du déversoir", cette proposition ne satisfaisant le Sr Person, il fait part de son intention de l’y contraindre.
Sur la matrice cadastrale de 1827 Jean Houssais, rentier à la Ville Danet
est seul propriétaire de l’ensemble de l’étang - parcelle 205
. — Matrice cadastrale de 1827 in Tigier, Hervé (2022) op. cit. p. 202 —
1828 — Gentilhomme, propriétaire de l’étang
En 1828, Jean Mathurin Houssais revend les trois moulins et l’étang à Gentilhomme, à charge de souffrir le droit de pêche auquel plusieurs personnes auraient droit.
— Ledru-Rollin (1844) op. cit. p. 287 —
1841 — Pierre de Montcuit de Boiscuillé propriétaire de l’étang
Pierre de Montcuit de Boiscuillé est copropriétaire des Forges de Paimpont de 1801 à 1810, puis actionnaire de la Société des Forges de Paimpont de 1810 à 1841. Il est aussi propriétaire du Bois de la Moutte de 1824 à 1850.
En 1841 11, il est mentionné parmi les bénéficiaires de rentes versées par les Forges de Paimpont pour la prise d’eau jusqu’au chommage dans l’étang de Paimpont
. — Tribunal de Montfort, 3U 2 140 - 23 août 1841 in Tigier, Hervé (2022) op. cit. p. 518 — Le versement de cette rente signifie qu’il est propriétaire à titre personnel de l’étang de Paimpont et de ses trois moulins.
1863 — La banque Seillière propriétaire de l’étang
Les Forges de Paimpont parviennent à acquérir l’étang de l’abbaye entre 1854 et 1863, période durant laquelle elles sont gérées par la banque Seillière pour le compte du duc d’Aumale.
En 1863, un procès oppose Le sieur Seillière
contre Joseph Baschamps pour délit de pêche dans l’étang de Paimpont. — TIGIER, Hervé, Mauvais coups et Coups du sort de Paimpont et du canton de Plélan au Tribunal de Montfort, Auto-édition, Paimpont, 2012, Voir en ligne.
[page 177] — Seillière, Monsieur, propriétaire. Paris
est débouté le 27 août 1864 et condamné à verser 19fr 26 centimes à J. Baschamps, la persistance de l’intéressé plaidant pour sa conviction d’exercer un droit et l’absence d’intention frauduleuse.
— TIGIER, Hervé, Mauvais coups et Coups du sort de Paimpont et du canton de Plélan au Tribunal de Montfort, Auto-édition, Paimpont, 2012, Voir en ligne.
[page 181] —
Une copropriété concernant la pêche
Entre 1818 et 1829, plusieurs actes mentionnent l’existence d’une copropriété de pêche.
En 1813 le droit de pêche dans l’étang est détenu en copropriété par François Marie Robert, Honoré Macé, Jean Macé et Jean Houssay de la Ville-Danet.
Les Sieurs François Marie Robert, notaire impérial, Honoré Macé, cultivateur, Jean Houssay, rentier, et Jean Macé, cultivateur, afferment pour six années commençant le premier janvier à Magloire Doré, demeurant au village de Quehé en Taupon, la pêche de l’étang de Paimpont pour 120 francs par an en deux termes ; les bailleurs ayant le droit de pêcher à la ligne et même Honoré Macé au carlet « parce qu’il fournira un logement au preneur, enfin les bailleurs s’obligent de payer à fin de ferme le batteau du preneur à dire d’experts amiablement convenus parce qu’ils en resteront propriétaires ». Me Charles François Allaire a deux témoins instrumentaires : Jean Letul, marchand, et Pierre Chevallier, voiturier, les deux au bourg. Seul le preneur ne signe pas.
En 1824 et 1829, le droit de pêche est à nouveau mentionné en copropriété.
Enregistrement d’un acte sous seing privé du 24 avril 1824 par lequel François Marie Robert et Jean Baptiste Gapais, propriétaire au Cannée, ledit Robert louant et affermant pour six années et pour six francs par an les droits de pêche dans l’étang de Paimpont.
Honoré Macé, père, rentier, donne à ferme avec toutes garanties à moitié fruit et par argent (20 francs par an) jusqu’à son décès, au Sieur Mathurin Glais, aubergiste dans le bourg de Paimpont, le quart du droit de pêche auquel le bailleur a droit avec les autres copropriétaires dans l’étang de Paimpont. « 2° Ledit Glais s’oblige aussi de donner et fournir au choix du bailleur la moitié du poisson qu’il prendra à la pêche qu’il fera en général avec les autres copropriétaires ainsi que la moitié de celui qu’il prendra aux pêches particulières, le tout évalué annuellement à la somme de dix francs... ». Il est question de filets que le preneur se fournira à ses frais.
Le 25 février 1829 Vallée acquiert d’un des fils du vendeur du 22 frim. an VII [Jean Houssay] divers immeubles, et en même temps le droit de pêche dans les étangs, sauf à partager avec les consorts du vendeur.
Un site classé propriété du Conseil Général d’Ille-et-Vilaine
L’étang de l’Abbaye est l’un des deux étangs de la forêt de Paimpont « Inscrits » ou « Classés » au titre de la loi de 1930 12.
En 1986, le Conseil Général d’Ille-et-Vilaine acquiert 75 hectares constitués par l’étang et les tourbières qui le bordent à l’ouest dans le cadre des Espaces Naturels.— EALET, Jacky et LARCHER, Guy, Paimpont en Brocéliande, Beignon, Les oiseaux de papier, 2015. [page 457] —
2007 — Une ZNIEFF Continentale de type 1
L’étang de Paimpont est classé en ZNIEFF Continentale de type 1 13 depuis 2007.
Complexe de milieux humides en situation forestière (étang, landes tourbeuses, mares) bordant le bourg de Paimpont. Présence d’habitats et d’espèces d’intérêt européen.
— Milieux : étang caractérisé par une eau limpide et une queue d’étang tourbeuse. Landes humides périphériques en situation forestière.
— Intérêt botanique : groupements végétaux variés. 16 plantes déterminantes pour la Bretagne dont Coleanthes subtilis, espèce vulnérable au niveau mondial.
— Intérêt faunistique : important, site de reproduction pour les batraciens (La Grotte). Le site est également très favorable aux chauve-souris. L’abbaye abrite une colonie de petit rhinolophe. Plusieurs espèces d’insectes sont déterminantes et toutes typiques des zones tourbeuses et bords d’étang (trop élevé, il perturbe la reproduction des batraciens et reptiles, ainsi que la floraison de plusieurs plantes rares dont Coleanthes subtilis). Les landes humides tourbeuses et leur flore typique (Eriophorum vaginatum) sont menacées par une fermeture du milieu (développement des ligneux).
— Espèce déterminante présente sur le site (absente de la base de données) : Lézard vivipare (Zootoca vivipara)

Longueur maximum : 7 cm du museau au cloaque.
Cette espèce de lézard vit au sol dans des milieux divers mais dont l’eau n’est jamais absente : broussailles, tourbières, fossés et milieux un peu plus pierreux en altitude.
Comme son nom l’indique, les femelles mettent au monde des jeunes entièrement formés, elles sont en fait ovovivipares mais les populations des Pyrénées pondent fréquemment des œufs.
2012 — Un site Natura 2000
Depuis 2012, il est l’un des douze secteurs de la forêt de Paimpont concerné par la classification Natura 2000.
L’intérêt patrimonial de l’étang de l’abbaye est principalement lié à la présence de deux végétaux rares, le Coléanthe délicat (Coleanthus subtilis) 14 et le Flûteau nageant (Luronium natans).
L’objectif majeur des étangs du site Natura 2000 est le maintien des populations de Coléanthe délicat et de Flûteau nageant, qui sont des espèces d’intérêt hautement patrimonial. Le second objectif est de concilier le maintien des habitats naturels et des habitats d’espèces présents avec les principales activités qui y ont cours actuellement, à savoir la production piscicole, la chasse et les activités nautiques.
La conservation du Coléanthe implique une vidange régulière de l’étang au mois d’août.
Dans l’état actuel des connaissances, il est recommandé de commencer la vidange des étangs où le Coléanthe est suspecté ou connu au cours du mois d’Août (début Août de préférence), et de faire en sorte que l’étang découvre des plages suffisamment longtemps pour que le Coléanthe puisse germer vers la mi-septembre. Il s’agit donc de favoriser le balancement des eaux de façon périodique, et de provoquer une vidange plus ou moins complète tous les 3 à 5 ans pour améliorer la qualité de l’eau et limiter l’envasement. Il est également indispensable d’éviter le maintien d’un niveau d’eau constant et le désenvasage par extraction ou par épandage chimique (chaux).
Le classement de l’étang en secteur Natura 2000 induit un zonage afin d’éviter les interférences entre les différentes activités qui s’y pratiquent : pédalos et canoës, pêche 15, randonnée touristique.
2014 — Une étude sur les engoulevents
L’engoulevent d’Europe (Caprimulgus europaeus), espèce très spécialisée du point de vue de ses habitats, est peu commune en Ille-et-Vilaine. En 2014, un recensement a été réalisé sur un biotope propice à l’accueillir, les landes humides de l’étang de l’Abbaye.— GUILBON, Sophie et MOREL, Régis, « Recensement de l’engoulevent au printemps 2014 : Espace naturel sensible de l’étang de l’abbaye (Paimpont) », Bretagne vivante, 2014, p. 16, Voir en ligne. —
Les prospections nocturnes effectuées sur l’ENS [Espace Naturel Sensible] de l’étang de l’Abbaye en 2014 font état de la présence d’une population d’engoulevent d’Europe. Celle-ci est estimée à 3 chanteurs sur l’ensemble de la zone étudiée, soit 1 chanteur pour 27 ha. La mise en place de mesures de gestion adaptées à ce milieu spécifique est à prendre en compte pour une préservation efficace de l’Engoulevent d’Europe.

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2015 — Le sentier du tour de l’étang
Le projet de mise en place d’un sentier autour de l’étang de l’abbaye voit le jour en 1998.
La commune mène son premier « contrat d’objectifs ». C’est une réflexion sur le développement de la commune animé par un cabinet d’études choisi par le conseil municipal, aidé par le département. L’un des points retenus était précisément la création d’un cheminement autour de l’étang du bourg. On y trouve, très bien résumés, les objectifs de ce circuit : l’ouverture au public d’un espace naturel, la découverte d’une tourbière tout en la préservant, la sensibilisation à l’ornithologie, une vision de l’abbaye sous un autre angle, la réalisation de passerelles pour éviter la dispersion...
En 2007-2008, le CPIE (Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement) de Concoret est sollicité pour jouer un rôle de médiation entre les différents acteurs du projet. A partir de 2012, la commune, porteuse du projet, laisse la maitrise d’œuvre au Conseil Général. Les travaux d’aménagement du sentier se déroulent de 2013 à 2015.

Le sentier pédestre pédagogique autour de l’étang est finalement inauguré le 15 juillet 2015.
