1867-1868
Brocéliande dans l’oeuvre de Gustave Doré
Gustave Doré est l’auteur d’une huile sur toile et de trois gravures représentant Merlin et Viviane en forêt de Brocéliande.
Éléments biographiques
Gustave Doré (1832-1883) est né le 6 janvier 1832 à Strasbourg.
En 1847, profitant d’une absence de son père qui s’oppose à une carrière artistique, il montre ses travaux à Charles Philipon, fondateur des journaux satiriques La Caricature et Le Charivari. Il obtient un contrat de trois ans consistant en la réalisation d’une page de dessins dans le nouvel hebdomadaire Le Journal pour rire, sous condition paternelle de poursuivre ses études.
Lancé dans la carrière artistique, il expose au Salon de 1848 des dessins à la plume puis expose aux Salons suivants des vues, sites et paysages. En 1855, il envoie la Bataille de l’Alma à l’Exposition universelle, et, à partir de cette date expose au Salon de chaque année des toiles de proportions quelquefois colossales, comme la Mort d’Orphée.
En 1861, délaissant la caricature et le dessin satirique, Gustave Doré ambitionne d’illustrer les chefs-d’œuvre littéraires de sa bibliothèque idéale. Il recense une trentaine d’ouvrages et se lance dans la publication de L’Enfer de Dante, des Contes de Perrault, de Don Quichotte, des œuvres d’Homère, de Virgile, d’Aristote, de Milton ou de Shakespeare.
Son travail de graveur et d’illustrateur rencontre un important succès public, lui offrant les honneurs officiels et la reconnaissance du monde de l’art.
Mais le nom de Gustave Doré est resté surtout attaché aux grandes publications illustrées qu’il a enrichies de tant de compositions admirées pour la verve et la facilité du dessin comme pour la richesse et la variété des conceptions. On cite, entre autres : les Œuvres de Rabelais (1854) ; les Contes de Perrault (1861) ; le Don Quichotte (1863) ; la Bible (1836) ; le La Fontaine (1867) ; la Divine Comédie (1868) ; l’Espagne (1873) ; Londres (1877) ; Roland furieux (1879).
Gustave Doré meurt d’une crise cardiaque, le 23 janvier 1883, en laissant une œuvre imposante de plus de dix mille pièces, qui exercera une forte influence sur nombre d’illustrateurs. — WIKIPÉDIA, « Gustave Doré », 2024, Voir en ligne. —
Brocéliande dans l’œuvre de Gustave Doré
Entre 1867 et 1869, Gustave Doré réalise les illustrations des quatre tomes de Les Idylles du roi, poèmes d’inspiration arthurienne d’Alfred Tennyson (1809-1892) consacrés à Énide, Viviane, Élaine et Guenièvre.
Lord Alfred Tennyson (1809-1892) est sans conteste le père de la Renaissance arthurienne dans l’Angleterre victorienne. Au début du 19e siècle, les thèmes arthuriens étaient devenus un anachronisme littéraire. Tennyson les remit au goût du jour, leur redonna vigueur, et ils devinrent une composante imaginaire de premier ordre qui stimula à nouveau poètes, littérateurs, artistes... et moralistes. [...] Sa vision arthurienne est contenue dans une suite de poèmes dont les premiers, publiés dans les années trente, furent d’abord rassemblés sous le titre de "La vérité et le mensonge", avant de devenir "Les Idylles du roi". L’ensemble s’enrichit considérablement au fil des années, subissant presque jusqu’à la fin repentirs, compléments et retouches.
Les Idylles du roi illustré par Gustave Doré est, dans un premier temps, publié en un tome dans le texte original chez l’éditeur londonien Edward Moxon.
- — TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Idylls of the king, London, Edward Moxon, 1868, Voir en ligne. —
Les Idylles du roi parait par la suite en quatre volumes dans une traduction française publiée chez Hachette.
- — TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Élaine, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1867, Voir en ligne. —
- — TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Guenièvre, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1868, Voir en ligne. —
- — TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Viviane, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1868, Voir en ligne. —
- — TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Énide, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1869, Voir en ligne. —
Quatre des œuvres de Gustave Doré inspirées par le poème Viviane font spécifiquement référence à la forêt de Brocéliande. La première est une huile sur toile, les trois autres sont des gravures représentant Merlin et Viviane.
1867 — Viviane et Merlin
Viviane et Merlin est une huile sur toile peinte en 1867 par Gustave Doré.
La rencontre entre Viviane et Merlin en forêt de Brocéliande est directement inspirée à l’artiste par l’un des vers du poème Viviane d’Alfred Tennyson (1809-1892) - L’astucieuse Viviane était étendue aux pieds de Merlin
- extrait des Idylles du Roi .— BOUSSAMBA, Jennifer, « Viviane et Merlin de Gustave Doré entre au musée de Brou », Connaisance des arts, 2013, Voir en ligne. —
Un orage approchait, mais les vents étaient calmes ; et dans la sauvage forêt de Brocéliande, contre un chêne creux si énorme et si vieux qu’on eût dit une tour ruinée, l’astucieuse Viviane était étendue aux pieds de Merlin.
1868 — Viviane d’Alfred Tennyson
En 1868, Gustave Doré propose huit planches gravées illustrant une traduction française du poème Viviane d’Alfred Tennyson. Trois d’entre-elles font explicitement référence à la forêt de Brocéliande.
Les Idylles de Tennyson, Elaine, Genièvre, Viviane et Enide, se rattachent à la même période de la carrière de Gustave Doré ; ces ouvrages parurent d’abord en Angleterre et ne furent traduits en France qu’une année après leur publication à Londres. Ici, au lieu de se servir de la gravure en bois, l’éditeur anglais fit appel à des graveurs au burin pour reproduire les dessins que Doré lui avait confiés. [...] Les œuvres de Doré perdirent à cette interprétation une partie de leur accent. Ce maître, qui s’entendait mieux que personne à placer son effet là où il entendait attirer tout d’abord le regard, savait fort bien que la loi des sacrifices est la base fondamentale de l’art.
L’astucieuse Viviane était étendue aux pieds de Merlin
La première gravure - intitulée L’astucieuse Viviane était étendue aux pieds de Merlin
- reprend la composition de la peinture à l’huile de 1867 en inversant le motif.— TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Viviane, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1868, Voir en ligne. p.1 —
Viviane n’est plus respectueusement assise, observant Merlin, mais lascivement étendue sur le vieux druide.
La première scène, le repos de Merlin et de Viviane, qu’on retrouve parmi les peintures exposées dans Bond-street, a été reproduite avec les incorrections des mains et des pieds (qui sont d’une taille disproportionnée), mais avec toute l’expression féline du regard fixe de Viviane. L’arbre massif semble avoir été copié sur un de ces chênes-lièges dont les troncs dépouillés donnent un air si désolé aux paysages du sud de la France et du nord de l’Espagne.
Ayant touché les sables de Bretagne, ils débarquèrent
La seconde gravure est intitulée Ayant touché les sables de Bretagne, ils débarquèrent.
Viviane suivit Merlin pendant toute la route, jusque dans la sauvage forêt de Brocéliande
La troisième gravure illustre l’arrivée de Merlin et Viviane à l’orée de la forêt de Brocéliande. — TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Viviane, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1868, Voir en ligne. p. —
C’était le temps où s’agitait pour la première fois la question de fonder une Table Ronde
La quatrième gravure représente le roi Arthur et ses chevaliers réunis pour fonder la Table Ronde.
Nous chevauchâmes toute la journée à travers la brume, luttant contre un vent violent
La cinquième gravure représente une chasse d’Arthur et de ses chevaliers au cours de laquelle un cerf blanc les avait conduits près de la Fontaine aux Fées.
Sans lui parler je me penchai vers lui, je pris le pinceau et j’effaçai l’oiseau
La sixième gravure représente Merlin enseignant à un jeune écuyer dans une clairière forestière.
La profonde forêt où boivent les chevaliers, les arbres nus et rabougris du bois de Brocéliande, la clairière où Merlin est occupé à peindre l’écu du jeune chevalier composent les plus ravissants paysages.
A la fin, les officiers du roi trouvèrent un petit homme chauve à la tête luisante
La septième gravure représente les officiers du roi Arthur découvrant Merlin dans sa grotte.
Merlin vaincu et excédé par les discours de Viviane, s’était rendu, avait révélé tout le charme et s’était endormi
La huitième et dernière gravure montre Merlin assis sur un chêne déraciné tandis que Viviane s’éloigne.— TENNYSON, Alfred et DORÉ, Gustave, Viviane, Michel Francisque, Librairie Hachette, 1868, Voir en ligne. p. —