aller au contenu

Le Breton de Beauregard, Jacques-Victoire

lundi 30 octobre 2017

Le Breton de Beauregard, Jacques-Victoire (1722-1773) : Génovéfain - Prieur-recteur de l’abbaye Notre-Dame de Paimpont de 1751 à 1770

Jacques-Victoire Le Breton de Beauregard naît à Rennes le 23 décembre 1722. Il est le fils de Charles Lebreton, sieur de Beauregard, procureur au Parlement, échevin de la ville, et de dame Angélique Laceron. Sa famille appartient à la bourgeoisie d’affaires de Rennes et de Vannes, en charge des intérêts de plusieurs grands aristocrates bretons. Le jeune Lebreton est le neveu « à la mode de Bretagne » de Jean-Philippe de La Bletterie, dit l’abbé de La Bletterie (1692-1772) théologien, historien, membre de l’Académie. On compte aussi d’autres religieux parmi sa parenté : un jésuite chez les La Bletterie, un bénédictin chez les Laceron et un autre génovéfain.

Il entre dans la Congrégation de Sainte-Geneviève le 3 novembre 1743. Il est prieur de Notre-Dame de Paimpont à partir de septembre 1751. En 1755, il devient aussi recteur de la paroisse Notre-Dame de Paimpont.

Il connait une progression de carrière assez rapide puisqu’il est présenté à la cure de Paimpont dès 1751 mais n’en prend possession que le 29 mai 1755 pour respecter le délai requis (5 ans après la prêtrise pour une première cure). On peut penser que ses relations familiales ne sont pas étrangères avec la rapidité de son parcours et son retour dans sa région d’origine. C’est donc un homme très en vue de la société provinciale qui s’installe à Paimpont. En 1761, il baptise à Rennes le fils de son cousin germain Pierre-Paul Lebreton de Ranzégat et de Jeanne Pineu Duval. L’année suivante, il fait de même avec le fils de son frère François-Marie, procureur au Parlement et de Perrine Rieulx. C’est donc un religieux qui n’hésite pas à quitter son abbaye pour continuer à entretenir des relations bien ancrées dans la société d’alors. Lorsque son frère François-Marie décède en 1764, les scellés sont apposés à son domicile rennais. L’inventaire des papiers mentionne une lettre de crédit datée du 27 février 1764 et signée à l’abbaye de Geneston par le prieur Gaudin. La famille Lebreton bénéficie apparemment de la clientèle des génovéfains de la région.

BRETON, Yves, Les génovéfains en Haute-Bretagne, en Anjou et dans le Maine aux XVIIe et XVIIIe siècles, Editions Hérault, 2006. [ Page 300]

En janvier 1766, il est condamné à une amende de 20 livres et à la restitution de 725 livres, valeur des bois qu’il a fait abattre, pour une coupe illégale de 85 arpents. L’abbé le soupçonne de fraude avec son neveu, Monsieur de Ranzégat.—  BRETON, Yves, Les génovéfains en Haute-Bretagne, en Anjou et dans le Maine aux XVIIe et XVIIIe siècles, Editions Hérault, 2006. [ Page 162] —

Le 24 novembre 1768, il est nommé prieur curé de Saint-Pierre et Saint-Paul de Mohon (Morbihan) dépendant de l’abbaye Saint-Jean des Prés à Josselin (Morbihan). Il prétend pourtant demeurer prieur de Paimpont, charge qu’il ne quittera qu’en 1770. En janvier 1769, l’intendant de Rennes le remercie pour le gibier qu’il lui a fait parvenir à l’occasion du nouvel an.

Je suis extrêmement sensible au compliment que vous me faites sur le renouvellement de l’année, je vous la souhaite parfaitement heureuse et je désire qu’elle me procure des occasions de vous assurer de toute ma reconnaissance. Recevez tous mes remerciements du gibier qu’on m’a apporté de votre part.

A.D.I.V. C 2488 in BRETON, Yves, Les génovéfains en Haute-Bretagne, en Anjou et dans le Maine aux XVIIe et XVIIIe siècles, Editions Hérault, 2006. [Page 237]

En janvier-février 1771, il fait l’objet d’une procédure disciplinaire lancée contre lui par les supérieurs majeurs de la congrégation pour avoir accumulé les dettes à Paimpont et pour concussion avec son neveu. Le 25 janvier 1771, l’abbé de Sainte-Geneviève délivre une commission spéciale au prieur de Saint-Jean-des-Prés pour examiner la situation financière laissée par Lebreton.— A.D.I.V. 1 F 1957 — Pendant ce temps, un chanoine est désigné pour lui succéder à la cure de Paimpont en la personne de Edme-Gabriel Mercier.

Le 19 février [...] le prieur interdit à Lebreton de « prendre dorénavant la qualité et l’autorité de prieur de Paimpont qu’il avait toujours conservées croyant se sauver de l’examen de ses comptes ». Mais cette remarque est modérée par la suivante : « nous avons ordonné aux dits capitulants de regarder le père Lebreton comme leur confrère et de ne pas perdre de vue qu’il a été leur supérieur et qu’il peut encore le redevenir ». Dès le lendemain, le chapitre s’attelle à la tâche. Les deux visiteurs commencent l’examen des comptes qui va durer jusqu’au 6 mars. Ce jour là, Bouchiquet est désigné pour accompagner les enquêteurs « à l’inventaire des meubles de la maison de Paimpont que le père Lebreton a transportés à Mohon, tant au presbytère, que dans une maison d’une demoiselle dite de Langourla, où se trouve le plus grand dépôt de meubles qu’en a fait transporter le père Lebreton et où il a toujours descendu et pris sa nourriture quand il a été desservir la paroisse. A son retour à l’abbaye, le prieur tient à faire inscrire au procès verbal qu’il a dû essuyer les insultes du père Lebreton.

BRETON, Yves, Les génovéfains en Haute-Bretagne, en Anjou et dans le Maine aux XVIIe et XVIIIe siècles, Editions Hérault, 2006. [ Pages 300-301]

Le 16 avril 1771, le président donne acte au chapitre du délit fait par le père Lebreton dans le pouillé [inventaire] de la maison à l’article canonicat de Rennes. Le 4 juin, Lebreton remet les registres à la sacristie qu’on lui avait confiés pour les faire parachever attendu qu’il n’en avait pas rendu compte depuis 1763. Le 14 juillet, le prieur décide de mettre un terme à ses investigations pour obéir aux ordres des supérieurs majeurs qui voulaient que cette affaire fût portée devant eux en diette, quoique les comptes et les états du père Lebreton ne fussent pas encore entièrement épurés .

On confie à deux frères toutes les pièces de la procédure concernant la gestion de l’ancien prieur de Paimpont, au nombre de 33, ainsi qu’un état des différents procès en cours (pas moins de 19). Le 26 août, les deux députés, de retour de la capitale, apportent la sentence des supérieurs majeurs qui ont arrêté que Lebreton a géré sa maison contre toutes les règles édictées par la congrégation et qu’il reste redevable de sommes d’argent importantes et qu’en ce qui concerne les effets que l’on a trouvés chez lui (plus de 23 000 livres en billets et actions) ils sont dorénavant acquis à son abbaye du fait de son vœu de pauvreté.

BRETON, Yves, Les génovéfains en Haute-Bretagne, en Anjou et dans le Maine aux XVIIe et XVIIIe siècles, Editions Hérault, 2006. [ Pages 300-301]

L’examen des comptes de l’abbaye a aussi permis de prouver que le prieur s’est arrangé avec son cousin Lebreton de Ranzégat sur l’exploitation d’une coupe de bois dans la forêt de Paimpont. Cette association jugée frauduleuse par la maitrise de Vannes les condamne à 6000 livres de dommages et intérêts au profit d’un troisième associé qu’ils auraient essayé d’abuser. Par la suite Lebreton ne fait plus parler de lui.

Il meurt le 30 juin 1773 à Mohon, âgé de 51 ans. —  PETIT, Nicolas, Prosopographie génovéfaine, École Nationale des Chartes, 2008, Voir en ligne. [ Page 226] —