1892-1971
Zaepffel Geneviève
Geneviève Zaepffel, originaire de Paimpont, de son nom de jeune fille Lefeuvre, fait carrière à Paris en tant que médium à partir des années trente. Condamnée à la Libération, elle poursuit ses activités à partir des années cinquante au Manoir du Tertre à Paimpont.
La jeunesse à Paimpont
Geneviève, Marie, Joséphine Zaepffel, de son nom de jeune fille Lefeuvre, est née le 5 mars 1892 au « Bout du Haut » au Cannée à Paimpont, dans la ferme de ses parents, Jean-Marie Lefeuvre (1858-1932) et Anne-Marie Lévêque. Elle a deux frères, Joseph et Jean et deux sœurs, Virginie et Marie 1.
En 1903, ses parents vendent leur ferme et achètent à Pierre Renimel une propriété au lieu-dit « Le Tertre » au Cannée en Paimpont. Celle-ci comprend des terres et les communs d’un manoir construit au milieu du 17ème siècle et détruit en partie dans un incendie en 1898. Les bâtiments, situés sur un tertre à la lisière de la forêt de Paimpont, bénéficient d’une vue exceptionnelle.
Geneviève est élevée au sein d’une famille pieuse, sous l’influence d’une marraine l’ouvrant à une vision mystique du monde. — HILAIRE, Philippe et MAHUT, Rudy, Le Manoir du Tertre en Brocéliande : Geneviéve Zaepffel, la prophétesse oubliée, Paimpont, Association Les Amis du Manoir du Tertre, 2006, 31 p. —
La rencontre avec René Zaepffel
Geneviève Lefeuvre travaille à Rennes à l’Hôtel Du Guesclin, place de la gare. Elle y fait la connaissance de René Zaepffel.
René Alexis Théodore Zaepffel est né le 27 septembre 1891 à Paris. Il est le fils de l’industriel Théodore Zaepffel et de Clémence Girard. La famille Zaepffel a quitté l’Alsace après son annexion par la Prusse en 1871. René est incorporé dans l’armée française en 1912 et libéré en 1919 avec le grade de sous-lieutenant télégraphiste. Il est décoré de la croix de guerre avec deux citations et devient capitaine de réserve. En 1919, il entre chez Westinghouse à à Freinville, quartier de la commune de Sevran (Seine-Saint-Denis) comme ingénieur électricien.
Geneviève et René se marient civilement le 14 octobre 1921 et religieusement le lendemain à Paimpont. Ce mariage lui ouvre les portes d’un certain milieu parisien fasciné par l’occultisme.
Le couple s’installe à Paris au 54, rue Legendre dans le 17ème arrondissement. Les parents Zaepffel habitent au 17 de la même rue, appartement que le couple occupera à la mort de la mère de René en janvier 1939. — Hilaire, Philippe ; Mahut, Rudy (2006) op. cit. p.22-23 —
René est fait chevalier de la Légion d’Honneur à titre militaire en 1937. Mobilisé de nouveau en 1939 avec le grade de capitaine radiotélégraphiste, il est fait prisonnier puis libéré le 15 août 1940.
Fasciné par la puissance allemande, il propage des idées portées par le courant pétainiste et la collaboration avec l’Allemagne. Gérant des publications du Centre Spiritualiste de Paris, il y édite un périodique intitulé l’Arche Nationale. Il y traite des sujets divers parmi lesquels : Les francs-maçons et les juifs
, la révolution nationale
, la France devant son devoir
. En novembre 1942, il déclare : Les juifs et les Francs-Maçons continuent de gouverner notre pays par personnes interposées
.
Les prophéties d’avant-guerre
Dans cette période troublée d’avant guerre où le spiritisme est à la mode, Geneviève Zaepffel se construit l’image d’une grande prêtresse et se présente comme un médium. Elle édite son premier ouvrage prophétique en 1930. — ZAEPFFEL, Geneviève, Ce que les hommes ne comprennent pas, Paris, 1930. — bientôt suivi d’une publication annuelle de ses prophéties.
Une présence, qui dégageait près de moi une force incommensurable que je ne saurais décrire, me fit prononcer ces mots, non pas en levant les yeux vers le ciel mais en m’adressant à cette force submergeante. « Fais comme tu voudras, mon Dieu, rappelle toi à l’humanité si tu crois qu’elle n’évoluera pas ; mais si cependant, tu voulais me donner encore une saison, je pourrais te rallier bien des âmes égarées. »
A peine avais-je dit que je sentis la présence s’envoler. J’eus alors cette impression très nette que je venais d’être exaucée. Ma foi était décuplée et toutes mes cellules vitales revivifiées. J’accumulais à nouveau des forces psychiques, je redevenais une antenne vivante capable de rayonner la foi dont je me sentais saturée et d’anéantir les forces sataniques. Deux jours plus tard, à Munich, les chefs d’États s’accordaient pour déclarer la paix au monde.
Le Centre Spiritualiste
En 1928, elle fonde au 16, Avenue de Wagram, le Centre Spiritualiste de Paris qui va être au cœur de ses activités jusqu’en 1944. L’établissement édite son propre organe de presse, le Bulletin mensuel du Centre Spiritualiste de Paris 2 publié de 1931 à 1941, dans lequel elle diffuse ses messages prophétiques.
Le Centre Spiritualiste comprend trois autres médiums. Madame Scudet, spécialisée dans les expériences avec les photographies de défunts, a rejoint le Centre en 1930. Madame Pellequier, dont les visions si elles ne sont pas toujours précises, n’en sont pas moins exactes
, officie à partir de 1935. Enfin, Madame Marie Legrave qui rejoint l’équipe de médiums en janvier 1937, s’est spécialisée dans l’astrologie et la chiromancie. Le Centre comprend aussi un radiesthésiste, M. Goepp qui officie depuis 1928, détecte les maladies et les guérit et un astrologue scientifique
, monsieur Carlos Sandre.
Geneviève Zaepffel y organise des conférences hebdomadaires, mais aussi de grandes messes spirites, une fois par an, à la salle Gaveau ou à la salle Pleyel devant parfois plus de 3 000 personnes :
- Expériences de clairvoyance, le 12 mars 1929.
- Le Centre Spiritualiste, le mercredi 2 décembre 1931.
- Conférence de Mme Zaepffel, le 06 avril 1932.
- L’activité des morts le 07 décembre 1932.
- L’erreur du suicide et L’initiation hindoue primitive le 08 mars 1933.
- Le Bonheur en soi, le 24 mai 1933.
- Prophéties, le 1er juin 1933.
- Comment nous guérissons, le 09 novembre 1933.
- La Santé par les fluides le 15 novembre 1933.
- Naissance et destinée (expériences) le 30 novembre 1933.
- Nos morts, le 7 décembre 1933
- L’Égypte au temps des pharaons par René Zaepffel, Preuves de la survie par G. Zaepffel, le 13 décembre 1933.
- Expériences sous la direction de Mme Zaepffel, médium le mercredi 17 janvier 1934.
- Séance psychiste le 24 janvier 1934.
- Amour et rayonnement de l’âme, le 25 avril 1934.
- L’action des astres et le pouvoir des âmes le 14 novembre 1934, avec le professeur Saller.
- Réincarnation possible ou non ? le 05 décembre 1934.
- La douleur, le 11 décembre 1934.
- La guérison par les fluides le 29 décembre 1934.
- La Bretagne Mystique, le 16 janvier 1935.
- La domination de soi, hallucinations et prophéties, le 23 janvier 1935.
- La voix des morts le mercredi 30 janvier 1935.
- La médiumnité à travers les âges, Pouvons nous modifier notre destinée, le 13 février 1935.
- Le pouvoir de l’âme et prophéties, le mercredi 20 février 1935
- Le corps fluidique », prophéties par Mme G. Zaepffel le 27 février 1935.
- Le pouvoir de la pensée, le mercredi 20 mars 1935.
- L’amour spiritualisé, par M. René Zaepffel, La Spiritualité, force dominante, prophéties, par Mme G. Zaepffel le mercredi 27 mars 1935.
- Le règne de l’Esprit et prophéties, le 03 avril 1935.
- La pensée, force curatrice, prophéties par Mme G. Zaepffell, le mercredi 10 avril 1935.
- Les forces spirituelles, le 13 novembre 1935.
- Prophéties le 17 novembre 1935.
- La légende de Bethléem, le 18 décembre 1935.
- Ésotérisme christique, Prophéties sur la politique mondiale en 1936, le dimanche 22 et le vendredi 27 décembre 1935
- Prophéties politiques pour l’année 1936 Salle Gaveau, le 27 décembre 1935.
- Ce que j’ai vu pour 1936, La pensée, la puissance humaine, expériences et prophéties par médium, le 19 et le 22 janvier 1936.
- L’implacable destin pour 1936 le 26 janvier 1936.
- Vers l’au-delà, le 5 février 1936.
- Le symbole des songes le mercredi 12 février 1936
- Le destin est-il écrit ? Expérience par médium le mercredi 26 février 1936.
- La Passion du Christ, le 25 mars 1936
- Les prophéties de Nostradamus vues de nos jours, les 20 et 27 mai 1936.
- Visions sur l’avenir le mercredi 11 novembre 1936.
- La voix des morts le 13 décembre 1936.
- Précisions sur l’avenir d’après ses prophéties réalisées présentement, par M* G. Zaepffel le 1er avril 1936.
- L’an qui vient, le 4 novembre 1937.
- Dernières prophéties sur l’avenir de la France et des nations pour 1938 le lundi, 13 décembre 1937, grande salle Pleyel.

- En janvier 1937. une conférence prophétique de Geneviève Zaepffel est mentionnée avec une distance humoristique dans la revue Bretagne.— BREIZ, Jean, « Echos : Geneviève Zaepffel voyante bretonne », Bretagne, 1937, p. 58, Voir en ligne. —
- Le 13 décembre 1938 à la salle Pleyel devant 3000 personnes.
Qui est donc cette étrange femme qui, seule, remplit l’immense salle aussi surement que l’orchestre le plus fameux, le plus prestigieux ténor ? Une bretonne, née dans la forêt de Brocéliande, au pays des druides et des fées. Mais pour revenir aux temps modernes, chaque année, les âmes errantes de l’Astral lui imposent, affirme-t-elle, une date : « Tel jour tu prophétiseras ». Au jour indiqué, les paroles lui sont dictées, qu’elle répète ; des images la harcèlent, qu’elle décrit [...] Elle ne se livre à la grande foule que ce jour là. Une fois par an. C’était hier. Écoutons... Peut-être 1939 à travers ses mots s’éclairera-t-il ? La voici, assez menue, mais grandie par une cape blanche, le visage auréolé de cheveux gris. Elle commence par quelques phrases, et soudain s’arrête pour se remettre bientôt à parler par saccades. Les âmes l’inspirent... Elle prophétise...
Le voyage aux États-Unis de 1937
Geneviève Zaepffel se rend aux États-Unis de février à mars 1937. Elle annonce le mardi 9 mars devant de nombreux journalistes que Roosevelt serait président à vie.
Ses déclarations prophétiques ont fait l’objet de deux articles dans le Times — ANONYME, « Inconnu », New-York Times, 01/03/1936, 1936, p. 1. —et le New-York Daily Mirror.
La femme spirite française annonce : le président Roosevelt sera président aussi longtemps qu’il vivra. Il ne sera pas dictateur, il ne le désire pas, il sera simplement président.
Geneviève Zaepffel et la forêt de Brocéliande
Visions et prophéties en Brocéliande
À partir du milieu des années 30, Geneviève Zaepffel diffuse dans la presse le récit romancé de sa jeunesse en forêt de Brocéliande et de l’origine de ses dons paranormaux. Elle les fera paraitre in extenso dans son deuxième ouvrage de 1937 — ZAEPFFEL, Geneviève, Le livre de mes prophéties : 1938 année décisive, Paris, Éditions Baudinières, 1937. — Elle développe les liens entre la forêt légendaire et sa destinée de prophétesse jusque dans ses derniers ouvrages.
Le lieu de ma naissance cadrait admirablement avec ma mission. Coin sauvage, propice à l’initiation, à la méditation, terre des Druides, dont les cendres émettent encore des radiations de foi vive, terre qui recueillit les protections occultes de Viviane, la fée bienfaisante annonçant la venue de Jeanne d’Arc plusieurs siècles avant sa naissance. Sans s’en douter, Viviane prophétisait peut-être sa propre renaissance dans la personne de Jeanne d’Arc qui fut Celte. N’est-ce pas d’ailleurs à cause de sa foi celtique qu’elle fut condamnée à être brulée vive ?
Elle écrit avoir eu sa première vision à l’âge de sept ans. Un vénérable druide lui serait apparu dans l’escalier du Manoir du Tertre.
Il était assis vers le milieu, il m’apparut majestueux, enveloppé d’une cape blanche. Au col brillaient des reflets dessinant la faucille d’or et le gui, symbole des Druides.[...] Le vieillard revint en effet pendant mon sommeil pour me dicter dans ses moindres détails ma ligne de conduite et mon destin. Maintenant que des cheveux argentés auréolent mon front, je puis certifier qu’il n’avait, en effet, rien omis.
À l’âge de seize ans, elle prétend avoir visité avec saint Judicaël, au cours d’un second songe, les plans extra-planétaires où lui sont révélés les mystères de la vie et de la mort, ainsi que l’interprétation des messages que passeraient aux vivants de la terre les missionnaires de l’Astral
.
C’est alors qu’elle aperçut un vieillard qui lut à même sa pensée et lui dit :
— si tous les « pater » fleurissaient, la forêt se couvrirait de pâquerettes. Cette forêt n’était autre que celle de Brocéliande où vécut jadis l’enchanteur Merlin. La fillette bien que condamnée par les médecins avait pour elle toute ses chances.
— Cette nuit là, nous rappelait Mme Zaepffel, je fis un songe qui correspondait au couronnement de saint Judicaël. J’étais toute chargée d’électricité et je mobilisais immédiatement le village pour honorer le saint. La première fois sa statue éclata dans le feu, mais la seconde fois, elle sortit du four saine et sauve. Il me fut dit alors que je connaitrais la force qui était en moi, que je voyagerais et parlerais aux foules à Paris. Pour moi Paris, c’était la fin du monde. La prophétie s’est pourtant accomplie.
Dans ses écrits autobiographiques remplis de songes et de visions prophétiques, Geneviève Zaepffel se réclame de la forêt de Brocéliande, qui est le lieu privilégié de ses expériences avec l’Astral.
Loin du monde, dans le silence de cette forêt, ma géante amie, où j’admirais l’œuvre de Dieu, mon âme s’épanouissait parmi les arbres, leurs branches, leurs feuilles. J’y retrouvais la force de vivre, j’y acquérais cette connaissance psychique que m’insufflaient les générations passées qui y avaient vécu et souffert. Mon initiation progressait.
Un riche officier étranger l’aurait demandé en mariage dans sa jeunesse. Avant de prendre sa décision elle serait allée méditer en forêt.
J’avais marché longtemps par des sentiers cahoteux, les pierres du chemin pouvaient me déchirer mais je me sentais indemne de leurs griffes. Sans trop savoir comment, je me trouvais dans une vallée qu’un chêne majestueux ombrageait de son feuillage abondant. À mes pieds, un ruisseau coulait lentement. Je pris comme un enfant une feuille de chêne et, presque pieusement, avec des gestes pleins d’onction, je la déposai dans la rivière, qui l’emporta dans sa course. Longtemps je la suivis des yeux, puis je la perdis de vue : la feuille de chêne avait été emportée vers d’autres rivages. Je me comparais à cette petite feuille, l’homme qui voulait m’emporter était la rivière...
Durant la première guerre mondiale, elle donne, selon ses propres dires, des feuilles de chêne aux soldats de passage à Coëtquidan, afin que ces talismans les préservent de la mort durant les combats.
Vingt-mille américains passèrent par le camp de Coëtquidan, habité aujourd’hui par les Saint-Cyriens. Nombreux furent ceux qui venaient me chercher une feuille de chêne, voulant qu’elle leur soit remise par mes mains. Beaucoup m’apportèrent des poupées et mes talismans passèrent dans la légende.
Jusqu’aux dernières années de sa vie, Geneviève Zaepffel saura se servir des attributs légendaires de la forêt pour nourrir son propre mythe. Dans une interview donnée en 1967, elle désigne sous le nom de baignoire de Viviane une vasque de pierre du jardin du Manoir du Tertre ayant servi à blanchir les draps de chanvre.
On est ici au cœur de la mythologie celtique et, dans le jardin du Manoir, quand Geneviève Zaepffel me montrait l’auge de pierre qui selon la légende, servait de baignoire à Viviane, je renouais insensiblement avec l’imagerie de Merlin l’enchanteur et j’étais « en condition » pour accepter toutes les prophéties.
Le Manoir du Tertre en Brocéliande
À partir de 1927-1928, puisant sans vergogne dans la fortune de son mari, elle transforme les communs du Tertre en Paimpont pour en faire, selon ses vœux, « le Manoir du Tertre ». Elle y installe des chambres d’hôtes, transforme le lieu en solarium et cure d’air
et reçoit ses premiers clients en 1933. C’est à la belle saison que les époux Zaepffel viennent à Paimpont. Ils amènent avec eux leur cuisinière, Amélie Raulo veuve Plantard, qui travaille à leur service de façon occasionnelle. Celle-ci vient accompagnée de son fils Pierre, alors en âge scolaire, que l’on retrouvera plus tard dans la supercherie ésotérique du Prieuré de Sion 3.— SÈDE, Gérard de, Rennes-le-Château – Le dossier, les impostures, les phantasmes, les hypothèses, Paris, Ed. Robert Laffont, 1988. —
Le manoir, ouvert l’été, est un bar-restaurant. Cet établissement est notamment le lieu de rendez-vous des officiers de l’armée française qui séjournent au camp de Coëtquidan. Geneviève Zaepffel y tient sa cour, habillée de longues robes blanches telle une vestale.

De retour d’Amérique, Geneviève Zaepffel a ouvert son manoir jusqu’à fin septembre
— L’OUEST-ÉCLAIR, « Manoir du Tertre », L’Ouest-Éclair, 08/08, 1937, Voir en ligne. —
Une première condamnation en 1940
À l’approche de la Seconde Guerre mondiale, Geneviève Zaepffel et son mari René accentuent leur implication politique.
Le 26 septembre 1939, elle a adressé à M. Daladier, alors Président du Conseil des Ministres, un télégramme dans lequel elle le suppliait "de ne pas déclarer une guerre perdue d’avance".
Le 1er novembre 1939 Geneviève Zaepffel écrit au Premier Ministre britannique Neville Chamberlain.
A l’heure où je vous écris ce message, votre entourage guette le moment pour vous perdre. A la première faiblesse vous partirez, à la seconde vous ne serez plus.
Les propos publiés dans ses ouvrages sont ouvertement favorables à Hitler, qu’elle désigne comme le futur fondateur des États-Unis d’Europe, prévoyant la fin de la France et de l’Angleterre d’ici 50 ans.
Elle a de plus tenu des propos défaitistes devant des militaires, leur demandant pourquoi ils se battaient, leur vantant les mérites du maitre du troisième Reich, qu’elle considère comme un surhomme. Elle les a incités à la désobéissance. Sur nos gouvernants, elle a exprimé cette opinion : « ils ne sont pas à la hauteur de leur tâche et pas trop recommandables. »
Au mois de juin 1939, elle quitte Paris pour le Manoir du Tertre en Paimpont. Elle est arrêtée en novembre 1939 et conduite à la prison de Rennes où elle sera détenue jusqu’à la fin de son procès. Défendue par Maître Jeanne Gonon-Le Coroller, elle est condamnée le 19 janvier 1940 à deux mois de prison avec sursis et 1.000 francs d’amende par le Tribunal Militaire de Rennes pour avoir tenu des propos de nature à exercer une influence fâcheuse sur le moral de l’armée
.
L’accusée, en pleurnichant, prétend que ses paroles ont été mal interprétées. Elle se déclare au contraire profondément patriote. Quant aux phrases relevées dans Mes Prophéties, il ne fallait pas leur attribuer le sens qu’on leur a donné. En les écrivant elle s’était placée « au point de vue psychique ».
Geneviève Zaepffel durant l’occupation
Après l’exode et l’instauration du régime de Vichy le 10 juillet 1940, elle retourne à Paris. Éclipsée un temps par sa condamnation, elle revient sur le devant de la scène, défendue par la presse collaborationniste la plus radicale.
Dans « Le Réveil du Peuple » (hebdomadaire dirigé par M. Jean Boissel) 4 du 29 novembre 1940, page 7, on relève un article signé « Anacharsis » dans lequel celui-ci fait l’éloge de Mme Zaepffel et rappelle quelques unes de ses prophéties notamment : la renonciation au trône d’Angleterre d’Édouard VIII, le conflit de septembre 1939 et la ré-élection du Président Roosevelt.
Les conférences de l’année 1941
Empêchée par l’administration de Vichy de reprendre ses conférences et ses prophéties publiques, elle obtient finalement l’autorisation souhaitée en décembre 1940, grâce à l’appui des autorités allemandes.
En vue de reprendre ses conférences salle « Mustel », « Chopin » et « Pleyel » elle a adressé, au service compétent, une demande d’autorisation qui n’a pas été prise en considération. A la suite de ces faits, elle a sollicité une audience auprès de M. le Général de La Laurencie et l’autorisation des autorités occupantes et elle a été autorisée à tenir une conférence salle « Chopin » le 9 décembre courant.
Le 9 décembre 1940, salle Mustel, située avenue de Wagram elle prophétise.
Je suis la missionnaire envoyée de DIEU pour sauver la France ; le CHRIST est venu à moi et m’a dit : « Il faut que tu aides ton pays à se sauver ». Je lui en fait le serment ; je viens ici pour rénover mon pays. La France n’a plus de Chef. Nous en avons bien un : le Maréchal, direz vous, mais que voulez vous qu’il fasse ; il est mal entouré, mal conseillé et trompé. J’irai trouver le Maréchal, seul, sans témoin, je lui parlerai et lui dirai ce qu’il faut faire ; mes guides spirituels me conduiront à lui.
Elle reprend donc ses cycles de prophéties publiques et se produit chaque dimanche, salle Mustel, devant 150 à 200 auditeurs. En supplément de ces soirées hebdomadaires, elle donne deux autres conférences, les 23 février et 3 mars, à la Grande Salle de la Mutualité, 24 rue Saint Victor. Le Matin 5, journal collaborationniste, relaie le contenu de ses prophéties dans la presse.
Note pour Monsieur le Directeur des Renseignements Généraux. Paris, le 11 février 1941
Ces deux dernières réunions seraient susceptibles de rassembler 2.300 assistants. J’ajoute que Mme Zaepffel a obtenu des Autorités d’occupation, pour effectuer ses conférences, une autorisation dont traduction jointe également en copie, aux termes de laquelle aucune limitation n’est apportée, quant à la fréquence des réunions et au nombre des auditeurs.
La conférence du 23 février 1941, intitulée Va-t-on assassiner la France deux fois ?
, Prophéties mondiales
, est organisée au Palais de la Mutualité. Elle s’y adresse aux Français pour les inciter à chercher le relèvement de la France grâce à leur énergie et à l’aide de la collaboration franco-allemande. L’intervention de Geneviève est suivie d’une allocution de René Zaepffel sur la collaboration d’un point de vue économique et social.
Direction Générale des Services de Police Administrative – Vichy le 28 mars 1941
A la fin de son exposé qui est anti-britannique et germanophile, elle déclare qu’elle allait prochainement se rendre à Vichy pour prendre contact avec le Maréchal et le supplier d’accentuer la collaboration avant qu’il ne soit trop tard.
La conférence du dimanche 3 mars, est intitulée : Pouvons nous éviter la révolution sanglante ?
Le « Groupe Collaboration » explique ensuite les avantages d’une collaboration européenne.
Le lundi 12 mai 1941, à la salle Pleyel, la soirée commence par une conférence-documentaire de son mari René Zaepffel sur la franc-maçonnerie à travers l’histoire 6. Elle annonce au cours d’une de ses visions que l’Angleterre connaitra la défaite la plus éclatante que pays n’a connu dans l’histoire
, qu’un sauveur nous évitera la guerre civile et que la France marchera de pair avec l’Allemagne.
— ANONYME, « Geneviève Zaepffel et le destin du monde », Le Matin, 14/05/1941, 1941, p. 2, Voir en ligne. —
Le 18 et le 25 juin 1941 ses conférences sont intitulées La France devant son devoir. — ANONYME, « Une nouvelle conférence de Geneviève Zaepffel », Le Matin, 18/06/1941, 1941, p. 2, Voir en ligne. —
Le 27 juin 1941, salle Pleyel.
Direction Générale des Services de Police Administrative - Vichy
Mme Geneviève Zaepffel qui annonçait le 12 mai 1939 que le Chancelier HITLER irait délivrer la Russie, a répété hier soir à la salle Pleyel, cette prophétie qui prend à présent une singulière acuité. Elle a en outre affirmé la victoire de l’Allemagne sur l’Angleterre et prédit la grande révolution mondiale qui hâtera le rapprochement des peuples.
Le rendez-vous manqué avec Pétain
En ce début d’année 1941, Geneviève Zaepffel souhaite servir d’intermédiaire entre Pétain et Hitler. Rappelons qu’ils s’étaient déjà rencontrés à Montoire-sur-le-Loir le 24 octobre 1940, instituant le principe de la Collaboration. Sa demande officielle adressée à l’administration de Vichy lui vaut d’être l’objet d’une enquête approfondie auprès de la Direction Générale des Services de Police Administrative qui voit en elle un suspect au point de vue national
.
Direction Générale de la Police Nationale, Vichy, le 27 février 1941. Référence à la demande d’audience ci jointe présentée au Maréchal Pétain par Madame Zaepffel Geneviève, et à la cote PA. 1201
Désirant se rendre auprès des prisonniers de guerre français en Allemagne, elle voulait vers le 19 mars, avant d’entreprendre ce voyage, entretenir le Maréchal Pétain des bonnes dispositions du chancelier Hitler pour la France. Elle prétend en effet avoir l’espoir de rencontrer le führer prochainement. Le 13 février, par l’entremise du Dr Feil, Conseiller à l’Ambassade d’Allemagne à Paris, Mme Zaepffel s’est fait remettre un ausweis N°34592 pour se rendre à Vichy, il est valable jusqu’au 28 février. Elle doit donc rentrer en zone occupée avant demain soir. Elle est rentrée à Moulins le 26 février. Mme Zaepffell qui entretient de très bonnes relations avec les autorités d’occupation affirme que le Maréchal Pétain jouit d’une grande estime en Allemagne et principalement auprès du Chancelier Hitler. Elle certifie aussi que sans l’intervention personnelle de ce dernier, les autorités allemandes d’occupation se montreraient beaucoup plus dures pour notre pays.
En avril 1941, elle annonce au cours d’une de ses conférences le résultat infructueux de ses démarches et la bonté et la droiture du prochain chef de la France, Adolf Hitler.
Direction Générale des Services de Police Administrative - Vichy
Je suis allée voir le maréchal à Vichy ; j’en reviens bien tourmentée, j’ai appris tant de choses, mais je ne puis rien vous dire, c’est un grand secret que je ne dois pas révéler. Apprenez seulement que notre Maréchal est bien mal entouré, des chefs autour de lui qui ne s’accordent pas ; tous voudraient commander, des ambitieux, des juifs, des franc-maçons, des jésuites, toujours. Je puis vous certifier aujourd’hui que mes guides m’ont promis de donner à la France le chef qu’elle mérite et que vous le vouliez ou non, ce chef sera un étranger. Du reste, le Chancelier m’a promis de la protéger, car j’ai vu le Chancelier ; c’est un homme très droit, très bon, que vous avez calomnié ; il aime beaucoup les Français et le peuple surtout et ne veut que votre bonheur. Il ne vous en veut pas et ses soldats, voyez comme ils sont gentils avec vous ; cependant vous les avez affamés pendant près de vingt ans ; ce n’est pas tout à fait de votre faute si vous ne les aimez pas, on vous avait appris à les détester, tous jeunes.
Interrogée par les Renseignements Généraux en 1948, au sujet de sa collaboration avec l’occupant allemand, Geneviève Zaepffel donne sa version de ce déplacement à Vichy.
Direction des Renseignements Généraux - 28 janvier 1948
Au sujet de mon voyage à Vichy pour voir le Maréchal, en février 1941, j’ai obtenu l’ausweiss nécessaire par M. de Brinon. Je n’ai aucun souvenir d’une entrevue avec le Dr Feilh et j’affirme ne m’être jamais rendue à l’ambassade d’Allemagne.
Je n’ai d’ailleurs pas pu voir le Maréchal Pétain, car dès mon arrivée à Vichy, la Police est intervenue et m’a reconduite au train.
Le but de ma visite au Maréchal était d’obtenir l’autorisation de porter des chaussettes de laine, confectionnées par mes fidèles, aux prisonniers de guerre en Allemagne.
L’Arche Nationale
À partir de 1941, le gouvernement pétainiste prône le « retour à la terre ». Geneviève Zaepffel emboite le pas à cette mesure en créant l’Arche Nationale en 1942, une « Œuvre » destinée à encourager le retour des jeunes à la vie paysanne. Cette fondation est installée au Manoir du Tertre en Paimpont.
La châtelaine du Tertre a compté, que dans son village du Canné en Paimpont, il y avait vingt-cinq cultivateurs en captivité, et qu’il ne restait plus guère que des femmes, avec très peu de chevaux, pour labourer et ensemencer deux-cent-vingt hectares de terres arables. Alors, elle a eu une idée généreuse, et qui reste pourtant à la portée de beaucoup de monde : équiper à ses frais un tracteur et faire effectuer les labours et l’ensemencement partout où auront manqué un fils ou un mari. Ces labours et ces ensemencements seront faits gratuitement par les soins de « l’Arche ». [...] Dans sa propriété du Tertre, elle va accueillir des jeunes épris de retour à la terre et désireux de s’initier aux travaux des champs. Après deux années d’apprentissage au cours desquelles, si leur conduite le mérite, ils auront été hébergés et traités comme des enfants de la maison, ces jeunes « paysans », fiers de ce nom, pourront partir dotés d’un métier ou s’en aller dans un autre village, bâtir une arche nouvelle, et « la grande famille de l’Arche » assurera leur établissement.
Un agent de propagande pro-nazie
Jusqu’à la fin de la guerre, Geneviève Zaepffel utilisera son aura de médium pour diffuser une propagande pro-nazie.
Depuis 1942, elle est membre du Cercle Européen (carte d’adhérent n°685) 7.
Elle poursuit ses cycles de conférences avec l’aval des autorités allemandes.
- Une heure de vérité, le lundi 29 juin 1942, grande salle Pleyel, une causerie suivie d’un message prophétique — DUGUET, Charles-Edouard, « Une heure de vérité avec Geneviève Zaepffel », Le Matin, 1942, p. 2, Voir en ligne. page 2 —
- A la salle Pleyel le 3 juillet 1942. — (Voir en ligne) —
- En juillet 1942, elle publie une brochure de six pages — ZAEPFFEL, Geneviève, Plaquette Prophétique (1941 à 1946), Paris, Hachette, 1942. — concluant à la victoire allemande et l’instauration d’une ère de bonheur sur notre continent. L’ouvrage se vend à très peu d’exemplaires en raison de son prix prohibitif (12 francs).
- La voix autorisée et prophétique de Geneviève Zaepffel se fera entendre les 4 et 18 avril et le 3 mai, salle Pleyel. René Zaepffel ouvre la séance par un large exposé historique de l’action maçonnique dans le monde.
L’année 1944
Le foyer de la Croix du Sud
Au mois de mai 1944, Geneviève Zaepffel se lance dans la fondation d’un foyer pour déshérités, situé 4, place du Palais-Bourbon, qu’elle baptise La Croix du Sud. Le foyer, aménagé sur les trois étages d’un immeuble qui appartenait à un ressortissant argentin retourné dans son pays, est réquisitionné avec l’aval des autorités françaises. La concierge de l’immeuble, interrogée par les Renseignements Généraux en 1945 a relaté sa rencontre avec Mme Zaepffel.
Direction de la Police Judiciaire - Paris le 26 mars 1945.
Mme Zaepffel s’est présentée à moi en me déclarant qu’elle voulait instituer un centre spiritualiste et que l’immeuble allait être réquisitionné. Devant mon refus de la laisser pénétrer et d’écouter plus longtemps sa conversation, elle me déclara qu’elle avait des amis au Palais Bourbon, qu’elle côtoyait Mme Laval et que l’immeuble serait quand même réquisitionné .
Le foyer de La Croix du Sud n’a existé que quelques mois. Geneviève Zaepffel a été chassée en août 1944 et l’immeuble a par la suite été occupé par le Ministère des Finances.
La procession du dimanche 13 août 1944
Au début du mois d’août 1944, alors que les armées alliées sont aux portes de la capitale, Geneviève Zaepffel explique qu’elle a eu une vision de Paris en flammes, annoncée salle Pleyel devant 3000 témoins. Une semaine après cette vision, dans l’après-midi du dimanche 13 août 1944, revêtue de sa robe blanche des soirées prophétiques, elle prend la tête d’une procession ayant pour but de sauver Paris d’un cataclysme. — ZAEPFFEL, Geneviève, Arrangez-vous là-haut ! Prophéties jusqu’à l’an 2000, Manoir du Tertre, Zaepffel, Geneviève, 1967, Voir en ligne. [pages 37-41] —
Geneviève Zaepffel commence son pèlerinage à travers Paris à 16 heures. Le cortège, qui comprend ses proches et ses fidèles auditeurs, part du Centre Spiritualiste situé rue de Wagram, se rend place de l’Étoile, descend l’avenue des Champs-Élysées, traverse le pont de la Concorde, puis s’engage boulevard Saint-Germain et aboutit rue du Bac. Le but de ce pèlerinage est en effet la chapelle de la rue du Bac dans laquelle la Vierge serait apparue à Catherine Labourée en 1830.
Après quoi notre foule se dispersa après avoir versé une offrande généreuse aux pieds de la Vierge et chacun eut droit à sa médaille miraculeuse.
Et Paris ne fut pas détruit.[...] Ce qui s’ensuivit appartient à l’histoire et la presse a longuement parlé, après sa mort, de Von Choltitz, ex-gouverneur allemand du "Gross-Paris" et de son rôle concernant notre capitale lors de la retraite allemande. Hitler lui donna l’ordre de détruire Paris, à n’en pas douter. La volonté de la force maléfique ordonnait le cataclysme sanglant. Or Von Choltitz n’obéit pas. Beaucoup de raisons ont été invoquées, qui toutes ont déclenché un faisceau de forces spirituelles qui ont déclenchée la pensée bénéfique chez ce chef allemand. Mais peut-être bien que notre procession réussie et spirituellement protégée - il nous a fallu qu’elle le fût - a peut-être déclenché une inspiration divine qui a traversé un cerveau. Qui sait ?
Une seconde condamnation en août 1944
Geneviève Zaepffel est dénoncée en août 1944. Elle est arrêtée, après enquête, le 22 août par Georges Rul des Forces Françaises de l’Intérieur, pour avoir eu notamment des rapports avec la Gestapo. Après perquisition et interrogatoire, elle a été remise, avec le motif de la demande d’incarcération, le 23 août, au poste de police de la rue du Mont Cenis à Paris (18e).
Après quatre jours d’incarcération, elle est conduite à la Caserne des Tourelles, située Boulevard Mortier puis une semaine plus tard, amenée au camp d’internement de Drancy 8. Le 3 janvier 1945 elle est conduite au fort de Noisy-le-Sec où elle intègre l’infirmerie. Après examen par un médecin, Geneviève Zaepffel est transférée à la Caserne des Tourelles puis libérée en février 1945.
Elle quitte Paris sans laisser d’adresse. Elle se rend alors à l’hôtel Saint-Louis d’Arcachon, afin de se faire oublier et de retrouver la santé. Le 26 avril 1945, au cours d’un pèlerinage à Lourdes où selon ses dires elle reçoit une visite de la Sainte Vierge.
Cette journée bien remplie sera la dernière à Lourdes. Et, pour cette dernière nuit, la Vierge est venue pendant mon sommeil me dire que j’allais retourner en prison. Elle me montra même l’endroit : des petites cours murées de briques rouges, c’est là que je me promènerais durant de long mois de captivité.
Selon cette vision prophétique publiée 20 ans après les événements, Geneviève Zaepffel serait retournée elle-même en prison afin que son destin s’accomplisse.
De retour à Paris en mai 1945, elle est à nouveau arrêtée, passe par la Caserne des Tourelles, par le Fort de Charenton avant d’être incarcérée à la prison de Fresnes sous mandat de dépôt de M. Angeras, juge d’instruction. Les véritables raisons de sa réincarcération sont en réalité liées à la collaboration active qu’elle mena durant l’Occupation. Geneviève Zaepffel est libérée le 3 novembre 1945. Renvoyée devant la Chambre Civique de la cour de Justice de la Seine, elle est frappée de dix ans d’indignité nationale. Après sept enquêtes, son dossier est définitivement classé le 1er avril 1947.
L’après-guerre
Après la guerre, elle séjourne fréquemment au Manoir du Tertre avec son mari et y organise plus discrètement des soirées ou elle réunit des adeptes du spiritisme. L’originalité des lieux contribue à entretenir son aura de prêtresse. Un tableau peint en 1947 par Maziella Mallaivre, est placé dans la montée du grand escalier de la salle principale du Manoir.
Conférence et prophéties (1948-1960)
En 1948, après plusieurs années sans activités publiques, Geneviève Zaepffel publie un nouveau livre de prophéties. — ZAEPFFEL, Geneviève, Prophéties mondiales, Paris, Éditions Spiritualistes, 1948. —
- Le 19 janvier 1948 elle se produit au cours d’une conférence à la salle Pleyel à Paris :
France NE BOUGE PLUS !
« Ne vous interrogez pas sur la date d’un prochain conflit ; mais retenez ce mois de juillet - Je ne vois rien, mais j’entends des choses véritablement étranges - Non, ce n’est pas aussi grave que je le pensais - La Suisse est pour demain le meilleur rempart - Ne pensez à rien - Je vois 5 hommes dont 2 seront chefs dans moins de deux mois. Ils sont dans l’erreur la plus absolue. Sur les cinq, trois vont mourir - Une fois encore tous les soldats partent mais ça ne sert à rien - Ne vous frappez pas : les évènements tragiques dureront à peu près 4 mois - Je vois un tableau de la terre. Le cadre s’efface. Au milieu le visage d’un officier mort. Autour de ce visage, une inscription lumineuse : « France, ne bouge pas !... » La Russie se métamorphose. Les soldats reviennent déjà. La France semble calme. Tout ce que les hommes prévoient est une erreur - Tout sera si rapide, si foudroyant, que rien de ce qu’on prépare ne servira - Retenez bien cette vision : une maison flotte dans l’air. De cette maison émane une fumée. Tous ceux qui sont dans le rayonnement de cette fumée tombent et meurent - L’Amérique flotte sur un océan de feuilles - Si, avant cinq mois, les nations n’ont pas réalisé une entente définitive, toutes y perdront sauf la France. Aucun chef, quelle que soit la nation, ne survivra au trouble qu’ils vont engendrer… Que les évènements sont rapides ! Ce n’est pas la guerre. C’est un anéantissement, une asphyxie, la terre qui s’ouvre - Coulée d’or d’un genre nouveau. Avant deux ans il fera très bon vivre. L’argent aura une autre forme et une valeur réelle - Les musulmans vont nous surprendre. Mais ne vous tourmentez pas. Et retenez pour la France ce prénom qui s’inscrit devant moi en lettres d’Or : « Louis ».
Elle est dénoncée comme étant susceptible d’être une espionne au service de l’Allemagne
par Pierre Pactat, demeurant 10, rue de Belfort (11ème arrondissement), qui tient un cabinet de prédictions de « Hautes Études Ésotériques » (Alliance Spiritualiste). Cette dénonciation, combinée à ce retour sur la scène publique amènent les Renseignements Généraux à s’intéresser à nouveau à elle et à l’interroger le 28 janvier 1948. — Direction des Renseignements Généraux - 28 janvier 1948 in OCTONOVO, Laurent, « Rapport des Renseignements Généraux sur Geneviève Zaepffel », Paris, Renseignements Généraux, 2006, p. 19, Voir en ligne. —
Elle poursuit cependant ses cycles de conférences.
- Le 5 décembre 1949 au Palais de Chaillot à Paris
- Le 7 novembre 1950 à Genève
- Le 16 avril 1951 elle organise une soirée à la salle Pleyel, à laquelle assistaient 1200 personnes environ.
- Le 3 décembre 1951 à la salle Pleyel
Elle publiera son avant-dernier ouvrage de prophéties en 1954 — ZAEPFFEL, Geneviève, Comment je vois l’avenir du monde (1935-1959), Paris, Éditions Spiritualistes, 1954. —
Une volonté de réhabilitation
En 1957, elle s’établit définitivement avec son mari au Manoir du Tertre en Paimpont, où des personnes viennent la consulter.
En 1964, Geneviève Zaepffel est interviewée dans un article où elle évoque l’importance de sa relation avec les esprits de la forêt de Brocéliande.
Cette forêt, je n’ai cessé — j’ai aujourd’hui soixante-douze ans — d’y méditer. Le jour, la nuit, esprits de l’air, esprits des fleurs, esprits des plantes, tous se montraient devant moi, déposant à mes pieds des rayons qui devenaient cornes d’abondance pour l’humanité... Près des chênes seulement je trouve des forces : en plongeant mes mains et mes pieds dans la terre, autour de leurs troncs, je me revitalise. Lors de ma première communion, figurez-vous, je courus, en robe blanche, sous un chêne pour y chanter un cantique, à l’étonnement, sinon à l’effroi, de mon entourage : et ce geste avait apporté en moi une telle paix ! Mais les chênes, chers aux druides, m’offrent parfois des visions, ou des songes, si vous préférez, pénibles. Ainsi, une nuit de brume, le chêne qui m’abritait sembla grandir démesurément, ses branches se nouèrent, se tordirent en des replis terrifiants, j’assistai à l’éclosion de serpents monstrueux qui, sortant du tronc de l’arbre, entraient dans le sol en une coulée sans fin. Ces reptiles marqués de teintes sanglantes ne s’appelaient-ils pas : le désir, la fureur, la crainte, l’égoïsme, l’orgueil, la haine, le meurtre ?
En 1967, elle publie son dernier ouvrage qui apparait comme une vaste entreprise de réhabilitation ou de falsification de l’histoire selon le point de vue adopté 9. — ZAEPFFEL, Geneviève, Arrangez-vous là-haut ! Prophéties jusqu’à l’an 2000, Manoir du Tertre, Zaepffel, Geneviève, 1967, Voir en ligne. —
Geneviève Zaepffel est interviewé à cette occasion par Pierre-Marie du Raden pour le compte de Bretagne magazine.
Geneviève Zaepffel m’a en effet affirmé que pendant la guerre, trois émissaires de Londres, envoyés spéciaux à Paimpont, lui ont demandé de mettre ses dons de visionnaire au service de la Résistance. S’agissait-il dans leur esprit d’une technique nouvelle de renseignements généraux ? Aujourd’hui, l’état-major de Saint-Cyr Coëtquidan déjeune souvent au manoir - c’est un excellent restaurant - et quelques mauvais plaisantins chuchotent qu’à présent, Geneviève Zaepffel met son pouvoir au service de la stratégie nationale.
Dans Brocéliande et l’énigme du Graal, Jean Markale évoque à son tour le Manoir du Tertre, fréquenté par des artistes et des intellectuels,
ainsi que sa prophétesse, Geneviève Zaepffel, qui y officia pour la renommée fabuleuse de la Brocéliande arthurienne.
J’ai connu Geneviève Zaepffel. Je me souviens avec une certaine émotion du jour où, dans son manoir, elle me montra avec enthousiasme le superbe escalier en bois du XVIIe siècle qui s’y trouve en me disant : « Monsieur, c’est sur cet escalier que Joseph d’Arimathie, venant de Palestine et se dirigeant vers la Bretagne, est passé en tenant le Saint-Graal entre ses mains. » C’était trop beau et trop naïf pour susciter la moindre réaction critique.
Elle s’éteint le 21 juin 1971.