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1856-1908

Le Chalet des Forges de Paimpont

Une résidence des propriétaires des Forges

Le Chalet est une habitation construite entre 1856-1857 pour le duc d’Aumale. Occupé par le directeur des Forges de Paimpont de 1857 à 1874, il devient l’habitation de la famille Levesque, nouveau propriétaire de la forêt, à partir de 1874.

1856-1874 — La résidence du gérant des Forges

1856-1857 — La construction du Chalet

Le Chalet des Forges est construit entre 1856 et 1857 à l’initiative du gérant des Forges de Paimpont, Edmond Duval (1810-1887), maire de Paimpont (1855-1877) et conseiller général du département d’Ille-et-Vilaine (1852-1880).

Il s’agit d’un édifice de plan rectangulaire rythmé par cinq travées de deux niveaux, surmontés par un toit à croupe en ardoises. La travée centrale, qui représente l’entrée, est amortie par une horloge couverte d’un toit polygonal. La qualité architecturale de cet édifice s’exprime également par la polychromie de l’appareil mixte à alternance d’assises régulières en schiste et en calcaire [en grès].

GASNIER, Marina, Le paysage de l’industrie en Ille-et-Vilaine - XIXe-XXe siècles, Rennes, Presses Universitaire de Rennes, 2003, 301 p., (« Art & Société »). [pages 191-192]
Le Chalet des Forges - Façade Est
Carte postale n°4952
Editions E. Mary-Rousselière (1874 - 1929)

Sa construction entre 1856 et 1857 est concomitante d’un pic de production des Forges de Paimpont qui bénéficient de la construction de la ligne de chemin de fer Paris - Rennes. —  CUCARULL, Jérôme, « Les forges de Paimpont (17 - 19e siècles) », Gavroche, Vol. 62 / mars-avril, 1992, p. 15-19, Voir en ligne. —

Le Chalet a coûté près de cent mille francs, somme qui retient l’attention de l’émissaire de la Banque Seillière, propriétaire des Forges (1855-1874) pour le compte du duc d’Aumale, lors de l’audit de 1857.

Dans les 181 911, 43 dépensés en construction pendant 1856 et 1857, une maison d’habitation, dite le Chalet, entre pour près de cent mille francs. Cette dépense est difficile à justifier autrement que par des motifs personnels à M. le gérant.

SOCIÉTÉ SEILLIÈRE & CIE, « Domaine de Paimpont », 1857, 2 p., Voir en ligne.

Une habitation patronale

Le Chalet est initialement prévu pour loger le propriétaire des Forges, le duc d’Aumale. Une chambre plus luxueuse que les autres, dite « chambre des princes », lui est réservée. Cependant, le duc d’Aumale, en exil politique à Londres, ne l’occupa jamais.—  LEVESQUE, Jérôme, Les Levesque de la fin du XVIIe siècle à nos jours, Les Forges de Lanouée, 2004. [page 127] —

De 1857 à 1874, le Chalet est le logement d’Edmond Duval, gérant des Forges pour le compte de la banque Seillière.

[Le duc d’Aumale] en était le propriétaire. La gérance étant assurée par Monsieur Duval, ayant comme résidence le Chalet des Forges.

GERNIGON, Armand, Mémoires et souvenirs d’un garde en forêt de Paimpont (1979), Amis de la Bibliothèque de Paimpont, 2002.

Selon Marina Gasnier, il illustre parfaitement le modèle industriel tripartite en cours dans la majeure partie du 19e siècle, associant l’usine, les logements ouvriers et la résidence patronale, située légérement à l’écart du périmètre des sites usiniers.

Le logement patronal des Forges de Paimpont est placé dans une situation dominante, à l’écart du site de production.[...] Son emplacement de l’autre côté de la route, qui permet au directeur de profiter non seulement du panorama de l’étang artificiel, mais aussi de surveiller le site de production, et de sa relative proximité du logement des ouvriers, rappelle l’organisation spatiale adoptée par les forges de Pontenx dans les Landes. Le caractère architectural prestigieux du logement patronal, amplifié ici par la présence de l’horloge, qui rythme le travail des ouvriers est moins affirmé aux forges du Plessis-Bardoult, de la Vallée et de Sérigné [Ille-et-Vilaine].

Gasnier, Marina (2003) op. cit. p. 191-192
Vue aérienne du Chalet surplombant les Forges de Paimpont

1874-1908 — La résidence des Levesque

1874-1879 — Premiers travaux

En 1874, Louis-Auguste Levesque achète la forêt et les Forges de Paimpont auprès de la banque Seillière. Dès décembre 1874, ses fils Donatien et Rogatien s’installent au Chalet. Dès le début, d’importants travaux de rénovation sont engagés au Chalet, notamment dans la cuisine et les écuries. — Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 110 —

Lorsque Louis-Auguste et sa famille prennent possession du Chalet et de ses dépendances en 1875, ceux-ci ne répondent pas à leur désir de confort et d’hospitalité. Donatien établit une liste complète des besoins qu’il négocie avec son père. Des meubles sont refaits (fauteuils capitonnés) d’autres sont achetés. La literie, pour sept personnes, est remise à neuf. La cuisine est modifiée et les menuiseries extérieures isolées avec des dizaines de mètres de bourrelet. Un coffre est installé, qui existe toujours. Le lustre de la salle à manger est remplacé. Ce ne sont que les premiers aménagements, la décoration viendra plus tard, lors de l’agrandissement de 1877. Sans mener grand train, les frères n’avaient pas de souci d’ordre domestique car une cuisinière, deux valets de pied, un valet d’écurie, un valet de chiens et un jardinier veillaient à tout.

Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 112-113

Dans un premier temps, les écuries du Chalet sont rénovées avant leur reconstruction en sept boxes en 1879. — Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 111 —

1889 — L’extension du Chalet

Louis-Auguste Levesque décède en février 1888. Le 24 avril 1888, le domaine de Paimpont est attribué à Louis-Arthur et à Donatien, conjointement et indivisément, dans la portion de moitié pour chacun d’eux, moyennant toutefois une soulte 1 importante à verser à leurs frères et sœurs.

Mais à Paimpont, pour Louis-Arthur et Donatien, il restait à régler deux problèmes : leur habitation et la gestion du domaine. Il n’existe effectivement qu’un chalet, [...] partiellement aménagé par Louis-Auguste. Rappelons que Louis-Arthur à cinq enfants, deux garçons et trois filles dont l’ainée Marguerite de Clerville a déjà trois fils, et que Donatien, de son côté a cinq filles.

Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 127

En septembre 1888, Louis-Arthur et Donatien établissent une convention qui stipule que le « Chalet » est attribué à Arthur et la « Cantine » à Donatien moyennant une somme de 40 000 F à prévoir pour son aménagement.

La cantine des Forges, vue prise de l’étang
Carte postale ancienne n°4950, A. Lamiré, Éditeur, Rennes

Donatien n’envisageant pas de s’établir durablement dans la « Cantine », il décide de construire le « Pavillon ». Louis-Arthur procède quant à lui à l’extension du Chalet afin d’y recevoir enfants et petits enfants.— Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 127 —

Forêt de Paimpont - Le Chalet et à l’arrière plan, le Pavillon
Coll. A. Waron - St-Brieuc

L’extension de 1889 consiste en la construction d’un nouveau corps de bâtiment s’insérant dans l’ancien sur la façade ouest du Chalet. L’extension comprend trois étages. Les deux premiers sont construits sur le même agencement que celui du chalet, le dernier est un rehaussement comprenant cinq fenêtres plus étroites. L’alternance de schiste et de grès armoricain est reprise afin d’offrir une continuité stylistique à l’ensemble.

Le Chalet des Forges, façade Ouest, vu du parc
Carte postale ancienne n°4951, Mary Rousselière édit., Rennes
L’extension de 1889 est visible sur la façade Ouest.

L’adduction en eau est installée à cette époque grâce à un bélier 2 alimenté en eau à partir d’une source située en bordure de la forêt, à la pointe extrême de la prairie des Riantes. —  GERNIGON, Armand, Mémoires et souvenirs d’un garde en forêt de Paimpont (1979), Amis de la Bibliothèque de Paimpont, 2002. [page 43] —

L’eau canalisée par un tuyau en fonte, traverse la prairie sur toute sa longueur, pour aboutir au Chalet, et lui fournir l’eau fraiche suffisante, puis toujours par un tuyau, coulera sur la Place des Forges, par un tuyau fixé dans un mur à une hauteur d’un mètre.

Gernigon, Armand (2002) op. cit. p. 43

Dans le même temps, des douves empierrées abritant une cressonnière et un élevage de truites sont établies autour du Chalet. Un terrain de tennis est construit et les alentours du Chalet sont aménagés en parc botanique.

[...] on plante des cèdres alentour, des saules pleureurs près du lavoir et des pins wellingtonia pour masquer le poulailler.

Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 127

1908 — La résidence de Clerville

À la vente du lot Donatien en 1908, le Chalet est attribué à Marguerite (1861-1936), fille de Louis-Arthur et épouse de Adolphe Jollan de Clerville (1852-1931). — Levesque, Jérôme (2004) op. cit. p. 163 —

Au Chalet, il restera donc Mme Louis Levesque et M. Jollan de Clerville et Mme, et leurs enfants, trois fils de l’union Jollan de Clerville : Patrice, Alain et Louis.

Gernigon, Armand (2002), op. cit. p. 21
Les trois frères de Clerville, Patrice, Alain et Louis devant le Chalet des Forges de Paimpont
—  LEVESQUE, Jérôme, Les Levesque de la fin du XVIIe siècle à nos jours, Les Forges de Lanouée, 2004.
[page 165] —

Le Chalet est aujourd’hui une propriété de la famille de La Paumelière, descendants des de Clerville.


Bibliographie

SOCIÉTÉ SEILLIÈRE & CIE, « Domaine de Paimpont », 1857, 2 p., Voir en ligne.

CUCARULL, Jérôme, « Les forges de Paimpont (17 - 19e siècles) », Gavroche, Vol. 62 / mars-avril, 1992, p. 15-19, Voir en ligne.

GASNIER, Marina, Le paysage de l’industrie en Ille-et-Vilaine - XIXe-XXe siècles, Rennes, Presses Universitaire de Rennes, 2003, 301 p., (« Art & Société »).

GERNIGON, Armand, Mémoires et souvenirs d’un garde en forêt de Paimpont (1979), Amis de la Bibliothèque de Paimpont, 2002.

LE LOUARN, Geneviève, GASNIER, Marina et LAURANCEAU, Elise, « Château, dit le Chalet, les Forges (Paimpont) », 2002, Voir en ligne.

LEVESQUE, Jérôme, Les Levesque de la fin du XVIIe siècle à nos jours, Les Forges de Lanouée, 2004.


↑ 1 • Une soulte est une somme d’argent qui, dans un partage ou un échange, compense une inégalité.

↑ 2 • Le bélier hydraulique est une technique qui permet de pomper de l’eau jusqu’à une hauteur plus élevée que la source en utilisant l’énergie d’une chute d’eau de hauteur plus faible, grâce à un dispositif mécanique et hydraulique.