Les chemins de fer en Brocéliande à leur apogée
Au cours de la seconde moitié du 19e siècle, le réseau ferroviaire se développe en Bretagne. Les lignes principales nord et sud sont complétées par des lignes transversales destinées à desservir la Bretagne intérieure. La région de Brocéliande bénéficie de ce réseau, surtout dans sa partie ouest : cinq lignes d’intérêt général et quatre lignes d’intérêt local.
À partir de la moitié du 19e siècle et jusqu’au premier tiers du 20e siècle, le chemin de fer connait en France un très fort développement. À son apogée au début des années 1920, le réseau total, regroupant les lignes d’intérêt général - créées à l’initiative de l’Etat - et celles d’intérêt local - créées à l’initiative des départements - atteint près de 70 000 km.
La Bretagne bénéficie de ce réseau et connait un important développement économique, notamment pour les produits de l’agriculture.
[...] Et le train, bien évidemment, facilite le transport des marchandises : des gares de Rennes et de Vitré partent des porcs, des bœufs, des veaux, des chevaux ; les pommes du Morbihan parviennent jusqu’aux marchés d’Allemagne ; dès le printemps 1865, les campagnes des environs de Brest et de Plougastel expédient vers Rennes de grandes quantités de pois verts et de fraises. L’ensemble des productions peut désormais être expédié facilement et rapidement, notamment vers Paris qui reçoit des petits pois, des artichauts, des choux-fleurs, des fraises, les produits de la pêche. C’est aussi par cette voie qu’arrivent en grande quantité les engrais et les amendements divers, le matériel agricole contribuant à intégrer la Bretagne dans l’économie de marché.
La région de Brocéliande est concernée par l’extension de ce réseau. Les communes qui en bénéficient le plus sont, à l’exception de Plélan-le-Grand et Beignon, majoritairement situées à l’ouest du massif forestier.
Les lignes d’intérêt général
Ces lignes sont créées à l’initiative de l’État qui en confie la gestion à deux compagnies privées :
- La Compagnie du Paris-Orléans pour le réseau sud
- La Compagnie des chemins de fer de l’Ouest pour le réseau nord
Ces voies ferrées sont à voie unique. Même la ligne Rennes - Saint-Brieuc reste à voie unique jusqu’en 1892.
Cinq lignes d’intérêt général concernent Brocéliande, et particulièrement trois d’entre elles :
- Ploërmel - La Brohinière
- Ploërmel - Messac
- Rennes - La Brohinière
Ploërmel - La Brohinière
Cette ligne longe Brocéliande sur sa façade ouest. Elle traverse sept communes : Ploërmel - Loyat - Néant-sur-Yvel - Mauron - Saint-Léry - Gaël - Saint-Méen-le-Grand. Chacune de ces communes possède une gare. Elle concerne également trois communes de Brocéliande situées à proximité : Concoret, Tréhorenteuc, Campénéac.
— Écartement : voie normale (1435 mm)
— Longueur : 41,6 km
— Voie unique
— Concessionnaires :
- Compagnie des Chemins de fer de l’Ouest (du 06/04/1884 au 12/07/1908)
- Administration des Chemins de fer de l’État (du 13/07/1908 au 31/12/1937)
- S.N.C.F. : reprise le 01/01/1938 lors de la nationalisation
- La section Ploërmel-Mauron est rachetée en 2004 par le département du Morbihan pour la transformer en « voie verte ».
— Ouverture : 6 avril 1884
— Fermeture aux voyageurs sur toute la ligne : 6 mars 1972
— Fermeture aux marchandises :
- Ploërmel - Mauron : 26 juillet 1991
- Mauron - La Brohinière : 1998, réhabilitation en 2009, sans trafic depuis 2015
Voir l’article : La voie ferrée Ploërmel - La Brohinière
Ploërmel - Guer - Messac - Chateaubriant
— Écartement : voie normale
— Longueur (Ploërmel - Messac) : 50 km
— Voie unique
— Concessionnaires :
- Compagnie des Chemins de fer de l’Ouest (du 11/06/1863 au 31/12/1908)
- Administration des Chemins de fer de l’État (du 01/01/1909 au 01/02/1988)
— Ouverture
Ploërmel - Guer - Messac : 05/04/1903
— Fermeture aux voyageurs
Ploërmel - Messac : 06/03/1939
— Fermeture aux marchandises (définitive)
- Guer - Porcaro : années 1950
- Porcaro - Ploërmel : 01/07/1964
- Guer - Messac : 01/02/1988
L’ensemble de la ligne est transformée en voie verte.
Rennes - Montfort-sur-Meu - La Brohinière
— Ouverture
La gare de Rennes est inaugurée en grandes pompes le 26 avril 1857.
Rennes - Guingamp (131 km) : 07/09/1863
Rennes - Brest (249 km) : 1865
— La ligne est en double voie depuis 1892. Elle est toujours en activité sur l’axe Paris - Brest.
Ploërmel - Questembert
— Écartement : voie normale
— Longueur : 33,2 km
— Voie unique
— Concessionnaires :
- 27 juin 1881, mise en service par les chemins de fer de l’État
- Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans
(du 25/06/1883 au 31/12/1933) - Administration des chemins de fer de l’État
(du 01/01/1934 au 17/08/1993)
— Fermeture définitive : le 17 août 1993
Carhaix - Loudéac - Merdrignac - Saint-Méen - La Brohinière
Ligne à voie métrique et unique, faisant partie du Réseau breton, située dans les départements des Côtes-du-Nord et d’Ille-et-Vilaine.
— WIKIPÉDIA, « Réseau breton », sans date, Voir en ligne. — La loi du 17 juillet 1879 (dite plan Freycinet) l’inclut dans le réseau des chemins de fer d’intérêt général.
Concédée par l’État à la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest, la ligne a une longueur de 58 kilomètres. Elle a son origine en gare de Loudéac puis atteint Saint-Lubin-le-Vaublanc et Merdrignac. Elle dessert ensuite Saint-Méen, puis atteint la gare de La Brohinière, où elle rejoint la ligne Paris - Brest.
Le parcours de Saint-Méen à La Brohinière est commun à la ligne de Ploërmel à La Brohinière, la voie métrique étant posée à côté de la voie normale. — WIKIPÉDIA, « Ligne de Saint-Méen à Loudéac », sans date, Voir en ligne. —
La carte postale ci-dessous montre bien les deux réseaux juxtaposés. Le petit bâtiment au centre est un abri de quai pour les voyageurs du Réseau Breton. On remarque au premier plan le levier d’aiguillage et le dédoublement des voies pour permettre le croisement des trains sur cette voie unique.
— Ouverture : 1907
— Fermeture au trafic voyageur : le 4 octobre 1953
— Fermeture au trafic marchandise : le 3 juillet 1967.
Les lignes d’intérêt local
Ce sont des lignes à voie métrique et unique, créées à l’initiative des départements pour compléter le réseau d’intérêt général.
Les lignes du Morbihan
Le conseil général confie la gestion des lignes à La compagnie des chemins de fer du Morbihan (CM).
En 1939, le conseil général du Morbihan décide de fermer son réseau de chemins de fer secondaire. Il confie à la compagnie CM l’exploitation d’un service routier créé pour remplacer progressivement le service ferroviaire. En 1968, la compagnie CM devient la Compagnie de Transports du Morbihan (CTM), filiale du groupe Verney, et exploite des lignes routières. Le département du Morbihan a ainsi abandonné le transport ferroviaire pour la desserte rurale.
Ploërmel - La Trinité-Porhoët
Appelé aussi « Le Petit Pelot », il desservait : Taupont - Hellean - Saint-Malo-des-Trois-Fontaines - Mohon
— Ouverture : 5 octobre 1915
— Fermeture : 1939
— Longueur : 26 km
Ploërmel - Locminé - Plouay
— Ouverture : 1er septembre 1902
— Fermeture : 1947
— Longueur : 90 km
Les lignes d’Ille-et-Vilaine
La concession est attribuée à la Compagnie des Tramways à Vapeur d’Ille-et-Vilaine (T.I.V.).
Rennes (le Mail) - Bréal - Plélan-le-Grand
La concession d’un réseau de trois lignes autour de Rennes est attribuée en 1896.
— Ouverture : 1898
— Fermeture : 1948
— Longueur : 35 km
La gare principale du réseau T.I.V. était située sur l’actuelle place de la Mission (ou place maréchal Foch).
Plélan-le-Grand - Redon
Décret du 16 décembre 1908 : déclaration d’utilité publique et concession aux Tramways d’Ille-et-Vilaine (T.I.V.)
Plélan-le-Grand - Guer
— Ouverture : 6 juin 1913
— Fermeture : 31 août 1948
— Longueur : 18 km
« La ligne du Tacot » : Rennes - Plélan - Beignon - Guer
C’est en 1898 que le tronçon de la voie ferrée Rennes - Plélan-le-Grand est inauguré, réalisé par les Tramways d’Ille-et-Vilaine : une voie dite étroite avec un écart de 1 m entre les rails.
Extension de la ligne
Bien que le Conseil général du Morbihan approuve l’extension de la ligne dans le Morbihan dès 1892, ce n’est qu’en 1900 que le projet prend forme avec une extension de Plélan-le-Grand jusqu’à Beignon et Guer. Le conseil municipal de Beignon y est très favorable, mais reste la question du financement. Entre 1901 et 1904, le dossier prend forme et une demande est officiellement faite par le maire de l’époque, Joseph Deshayes.
Après plusieurs années d’études, le projet se concrétise en 1910 et une gare est construite rue des TIV, ainsi qu’un pont à bascule à la demande de la compagnie de chemin de fer pour le chargement des marchandises. Plusieurs terrains feront l’objet d’expropriation afin de mener le projet à son terme. La ligne Rennes-Beignon-Guer est née, d’une longueur de 58 km que le « Tacot » parcourait en 3 heures environ.Une seule voie
La voie ferrée était composée d’une voie unique et les trains pouvaient se croiser à Treffendel, à mi-chemin de Rennes. Entre Beignon et Plélan-le-Grand, le « Tacot » traversait trois fois la route nationale entre le Bayet et le Poteau, au Pont du Secret et à la Lande du Gué juste avant Plélan. Les points d’arrêts étaient nombreux tout au long de la ligne.
Un accident de tramway au Pont du Secret en 1913
L’accident est rapporté en détail par Le Ploërmelais du 6 juillet 1913. — ANONYME, « Un terrible accident sur la ligne Plélan-Guer », Le Ploërmelais, 6 juillet, Beignon, 1913, p. 2, Voir en ligne. —
Guer - Redon
— Ouverture : 1924
— Fermeture : 1937
— Longueur : 42 km
Une ligne de transport de minerai : Paimpont - Mauron
Entre 1903 et 1907, une voie étroite (600 mm) se greffe sur le réseau ferré principal à voie normale (1435 mm) de la gare de Mauron.
La ligne, exploitée par la Compagnie des Tramways de Mauron, sert au transport du minerai de fer de Paimpont (extrait à l’emplacement actuel de « l’Étang bleu »). Le minerai est majoritairement expédié en Angleterre via le port de Saint-Malo et en Allemagne via la Hollande. Le reste est expédié en France à Treignac (Corrèze), Couëron (Loire-Atlantique) et Outreau (Pas-de-Calais).
L’ingénieur Joseph MONIN est chargé des travaux de ce tramway minier, appelé localement « Le Tram ». En raison du risque d’incendie, on décide d’utiliser la traction électrique par fil aérien, plutôt que la traction vapeur.
Au départ de la minière, la voie longe le CV9 de la Ville Danet sur environ 1 km puis pénètre dans la forêt, qu’elle traverse sur environ 4,5 km. Certains passages sont en tranchée, d’autres en talus. Un petit pont permet à la voie de franchir le ruisseau de Lambrun.
La minière ferme officiellement le 1er juillet 1907.
— INVENTAIRE DES RÉSEAUX SPÉCIAUX ET PARTICULIERS, « Chemin de fer de la minière de l’Etang-Bleu », sans date, Voir en ligne. —
Des projets non réalisés
Parmi les différents projets qui naissent au début du 20e siècle pour la desserte de la région, plusieurs concernent particulièrement le massif de Paimpont.
- Ploërmel - Paimpont - Montfort
[...] La commune [de Paimpont] se montre également favorable à un projet présenté en 1907, dont le tracé partirait de Ploërmel et aboutirait à Montfort, en passant par Beauvais, Paimpont et Saint-Malon, puis Saint-Gonlay et Iffendic. [...]
- Plélan - Paimpont - Concoret - Le Bran - Mauron
Ce projet est notamment soutenu par la commune de Concoret.
Dans votre séance du 23 août 1906, vous avez eu à examiner la demande formée par le Conseil municipal de Concoret, dans sa séance du 10 septembre 1905, de prolonger le tramway de Rennes à Plélan-le-Grand (I&V) par Paimpont, Concoret, le Bran (I&V), Mauron, ensuite par Illifaut et Merdrignac, ou à partir de Mauron vers la Trinité-Porhoët.
Au début de l’année 1907, à la suite d’incidents divers, l’usine de Paimpont doit arrêter son exploitation. Les démarches lancées en 1906 sont abandonnées. Tout le matériel est revendu mais la voie reste en place.
Fin août 1907, une commission interdépartementale est créée afin d’étudier le raccordement des tramways de l’Ille-et-Vilaine et du Morbihan, par une ligne de Plélan à Mauron suivant, à partir de Paimpont, la voie délaissée par la mine. Mais l’utilisation de l’ancienne ligne rencontre deux sérieux obstacles :
— Le bourg de Concoret, à l’initiative de la demande, serait situé à 3 km de la ligne qui lui serait par conséquent d’aucune utilité ;
— La ligne traverserait la forêt de Paimpont avec un nombre de village restreint et donc un trafic insuffisant, d’autant plus par la perte du transport de minerais.
Toutefois, le Conseil municipal de Concoret fit remarquer, à très juste titre, que la ligne en question passerait à 3 kilomètres du bourg, toujours en dehors de la commune, et ne lui serait par conséquent d’aucune utilité.
Ensuite, après études, les Ingénieurs respectifs des deux Départements
firent observer que la ligne projetée traverserait la forêt de Paimpont, ne desservirait qu’un nombre de villages restreint, que son trafic serait par suite insuffisant.
Le 28 avril 1908, le Conseil général du Morbihan décide d’abandonner le projet Plélan-Mauron par l’ancienne voie ferrée de l’usine.
Dans les délibérations du 23 août 1910, le rapporteur M. Maulion défend toujours le projet de relier Plélan à Mauron via Paimpont et Concoret et regrette qu’il soit resté lettre morte. — CONSEIL GÉNÉRAL DU MORBIHAN, « Délibérations du 23 août 1910 », in Rapports du Préfet et délibérations du Conseil général du Morbihan, Vannes, Conseil général du Morbihan, 1910, p. 24, Voir en ligne. p. 25 —
Ce projet n’aboutira finalement pas, bien que les deux départements se soient montrés favorables.
- Ploërmel - Plélan
Ce projet se heurte aux exigences du Ministère de la Guerre qui s’oppose à ce que la ligne traverse le camp de Coëtquidan
- Autres projets
— Plélan - Paimpont
— Les Forges - Paimpont
— Beignon - Campénéac - Ploërmel
Aucun de ces projets ne sera réalisé.
Article à suivre : La voie ferrée Ploërmel - La Brohinière