26-28 janvier 1790
Les émeutes de Plélan-le Grand
Un épisode des révoltes agraires de janvier 1790
Du 18 janvier au 5 février 1790, la grande majorité des paroisses situées entre Ploërmel, Montfort et Redon, entrent en insurrection. Les communautés paysannes qui avaient demandé l’abolition des droits féodaux dans les cahiers de doléances rédigés en avril 1789 se révoltent contre leurs seigneurs.
Le 4 août 1789, l’Assemblée Constituante abolit les rares droits féodaux pesant sur les personnes, mais elle déclare rachetables les droits beaucoup plus importants et généralisés qui pèsent sur les terres, condition impossible à satisfaire par les paysans. Nombre de ceux-ci, refusant de payer une année de plus dîmes, devoirs féodaux et capitations, attaquent les châteaux de la région pour y détruire les chartes et fondations seigneuriales symboles de l’Ancien Régime.
Les premiers signes de la révolte
Les paroisses de Guer et Augan, voisines de celle de Plélan-le-Grand sont les premières de la région de Brocéliande à entrer en insurrection. Les 18 et 19 janvier, des troupes de paysans attaquent les châteaux de Coëtbo et du Bois du Loup. Le 24 janvier 1790, les premiers signes de l’insurrection apparaissent à Plélan et Beignon. Une lettre adressée à la municipalité de Rennes par les officiers seigneuriaux de Plélan, Paimpont et Beignon signale les pressions subies à la sortie de la messe.
Mocudé des Landelles, Allaire, Mocudé le jeune, Joubaire, Boisgontier
Messieurs, vous avez connaissance de ce qui s’est passé aux paroisses d’Augan, Guer, et autres limitrophes, où des gens attroupés se sont portés vers les châteaux pour retirer des propriétaires des déclarations de renoncer à leurs droits féodaux. Aujourd’hui, ils se sont tournés vers les procureurs fiscaux et autres particuliers, notamment contre les habits bleus.[...] Dimanche 24 [janvier 1790], il fut répandu à la sortie des grands messes de Beignon et Plélan que la tête des officiers nationaux de ces paroisses étaient à prix. Le même jour encore, un homme s’adressant à l’un de ces officiers et lui faisant voir une tombe lui dit : « Bourgeois, je vous mettrons là. » Le même jour, il fut dit à un autre : « Bourgeois, je vous grillerons. » Dans la nuit du 24 au 25, deux braves gens allèrent à la demeure de quelqu’un de ces officiers et leur assurèrent qu’ils n’avaient que le temps de prendre la fuite. Nous espérons, Messieurs, que prenant ces faits en considération, vous vous porterez à procurer des secours à des citoyens entièrement dévoués à la chose publique.
Ces pressions exercées sur les agents seigneuriaux de la région de Plélan sont dans le prolongement des doléances exprimées par les Plélanais le 5 Avril 1789. Les habitants refusent le cahier de doléances rédigé lors de l’assemblée présidée par le procureur fiscal Godefroy Pierre Joubaire. Ils en établissent un autre conforme à leurs attentes.
Les membres de justice des seigneurs de notre paroisse nous pillent et nous ruinent de leur côté ; ils ne craignent rien ; ils sont tous les maîtres dans notre paroisse, parce que les seigneurs ne leur disent rien ; quand ils peuvent avoir la dent sur une personne, ils la mettent à aller au pain, ils lui font vendre tout ce qu’elle peut avoir.
Les émeutes de la Chèze-Erbrée en Plélan
Selon les rumeurs qui agitent le pays, un grand nombre de « brigands » des paroisses de Guer, Augan et Maure se rendent de château en château afin de réclamer les titres, d’en demander l’abrogation et de les brûler. François Michel, procureur fiscal de la baronnie de Comper, est l’homme de confiance du marquis de Montigny, propriétaire du château de Comper. Inquiet de la sécurité du château, il envoie le dimanche 24 janvier 1790, des domestiques au manoir de la Chèze-Erbrée en Plélan afin de vérifier le bien-fondé de ces rumeurs.
Le lundi 25 janvier à midi, une troupe de cinquante à soixante hommes se présente à la Chèze-Erbrée, enfonce les portes de tous les appartements et les brûle dans la cour du château. La troupe oblige ensuite le gardien à écrire une lettre au Marquis de Montigny lui demandant d’envoyer les titres de sa seigneurie de Plélan sous huit jours ainsi qu’une renonciation à tous ses droits féodaux. Les insurgés menacent d’incendier le château et interdisent au gardien, sous peine de mort, de prévenir le sieur Michel de son arrivée. — MONTGOBERT, Gilles, Eclats en Brocéliande : le Pays de Mauron 1789-1800, les mutations du monde rural, Saint-Léry (56), Office Culturel du District de Mauron, 1993. [page 181] —
L’attaque du château de Villeneuve
Le 26 janvier vers midi, les vassaux de M. de Villecerfs, seigneur de Villeneuve, attaquent le château. Le seigneur est absent et les émeutiers s’en prennent à son procureur fiscal, Barbier, ainsi qu’à sa femme. Julien Renimel, fermier à la métairie de Villeneuve témoigne.
Il vit une trentaine de personnes, les unes armées de fusils, les autres de bâtons, et Joseph de la Motte (de Maxent), armé d’une étreppe 1. Entrés dans la cour, puis dans la maison, ils frappent dans les fenêtres et sur les meubles et paraissent fort animés [...] Il entend dire à Pierre Regnier : « Il nous faut les papiers du sieur de Villeneuve ; on a eu le temps de préparer pour nous les livrer. » Le nommé Pironnais (de Maxent) et plusieurs autres allument un feu dans la cour. Guillaume Grimoard, de Plélan, brise une armoire, avec deux autres (aussi de Plélan), François Fierdebras et Lefeuvre, dit Bedet ; ils apportent les papiers et y mettent le feu. Puis on roula une barrique de cidre dans la cour ; ils en burent et se retirèrent dans la nuit.
Selon Jean-François Allaire, chapelain du Thélin, le fils du procureur fiscal de Villeneuve vient le trouver à Plélan, le 26 janvier, à deux heures, expliquant que la vie de son père est menacée. Le prêtre se rend à Villeneuve, tente de s’interposer et de calmer les émeutiers, notamment Guillaume Grimoard, Joseph Lefeuvre, et Pierre Guérin, de la Ville-ès-Cerfs en Plélan. Ce dernier lui rétorque qu’il est le cousin du procureur fiscal de l’abbaye de Paimpont et qu’il ferait mieux de se taire. Le Feuvre, frappant d’un bâton, lui dit qu’il n’avaient pas brûlé les bons titres, qu’il lui en fallait d’autres.
Allaire leur propose de rencontrer M. de Villecerfs et de faire lui-même le voyage à Vannes pour apaiser la situation. Les émeutiers le houspillent, Grimoard dit aux autres de le saisir. Mathurin Bourrée, domestique de Jean Herviaux, en Maxent lève son bâton pour le menacer. Allaire préfère alors s’enfuir.
Le 28 juin 1790, le présidial de Rennes décrète la prise de corps de Guillaume Guimont, de Joseph Lefeuvre (Plélan), de Mathurin Bourrée et de M. Baudaire (Maxent). On inculpe Joseph Lamotte, Pierre Eon, et Jean Lebreton (Maxent). — SÉE, Henri et RÉBILLON, Armand, « Les troubles agraires en Haute-Bretagne (1790 et 1791) », Bulletin d’Histoire économique de la Révolution, 1920, p. 231-370. [page 292] —
L’arrivée des commissaires à Plélan
Malgré les lettres des officiers municipaux datées du 24 janvier et l’attaque des châteaux de Villeneuve et de la Chèze-Erbrée les 24 et 25, la municipalité de Rennes tergiverse, ne voulant pas sévir contre ses alliés en défendant l’aristocratie. Le 26 janvier, douze commissaires arrivent à Plélan et Guer.
[...] pour instruire les habitants des décrets de l’Assemblée Nationale, recevoir les mémoires de leur plaintes et demandes, rapporter des procès-verbaux de l’état des choses et des faits, engager les habitants à attendre dans la paix et la tranquillité l’heureux effet des travaux de l’Assemblée Nationale
L’attaque du manoir du Breil-Houssoux
Le lundi 26 janvier, vers quatre heures de l’après-midi, quatre-vingts émeutiers, vassaux du seigneur de Breil-Houssoux, conseiller au Parlement de Bretagne, se présentent à la porte du manoir situé sur la trève de Treffendel en la paroisse de Plélan-le-Grand. Le petit groupe, armé de fusils, bâtons et outils, est composé de Jean Bonjean, ancien domestique de M. de Breil-Houssoux, accompagné de Pierre Méhaut, de Pierre Roussel du lieu-dit la Chevallerais, de Jean Mérel, trésorier général de Treffendel et de quatre ou cinq autres. Les émeutiers expliquent au seigneur l’objet de leur visite. — Sée, Henri ; Rébillon, Armand (1920) op. cit., p. 283 —
Déclaration de M. du Breil-Houssoux
Nous sommes venus pour que vous fassiez abandon général à tous vos vassaux de tous vos fiefs et droits seigneuriaux, rachats, rentes par deniers, lods et ventes, droits de recettes, dixmes et généralement tout ce qu’ils pourraient nous redevoir par leur aveux sans exception. - Eh bien ! mes amis, si je vous donne une pareille reconnaissance, me promettez vous sureté dans ma personne, celle de madame et de mes enfants, ainsi que pour ma maison et mes meubles. - Oui monseigneur, nous vous le promettons et nous vous défendrons au péril de nos jours.
Rassuré par leur serment, M. du Breil-Houssoux écrit la déclaration par laquelle il renonce à ses droits féodaux et la remet au trésorier Mérel.
Pendant ce temps, le reste des émeutiers se rend à la cuisine et demande à boire et à manger. Après s’être restaurés et avoir vidé deux barriques de cidre, les émeutiers interpellent le seigneur de Breil-Houssoux. Plusieurs coups de feu sont tirés et un nommé Rozé, de la Besnardais en Plélan, tente de porter un coup de bâton à la tête du seigneur. L’un d’eux s’avance et lui ordonne Je veux que tu me donnes un billet comme quoi tu nous permets, à tous, d’aller brûler ton procureur fiscal et sa maison avec tous ses papiers.
Devant la menace d’incendier son manoir, M. du Breil-Houssoux déclare.
Déclaration de M. du Breil-Houssoux
Eh bien ! messieurs, dit-il, je vais vous donner un billet, à peu près conçu en ces termes ; vous êtes libres de vous rendre chez le sieur Regnault, mon procureur fiscal, vous faire rendre les papiers que vous dîtes qu’il a à vous ; mais je vous prie instamment de ne pas brûler sa maison, et je déclare ne donner ce billet que pour sauver ma vie.
Les émeutiers réclament ensuite les titres féodaux afin de les brûler. Mme du Breil-Houssoux arrive cependant à les calmer en leur promettant qu’on allait leur remettre les papiers ainsi qu’une barrique de cidre s’ils voulaient bien sortir dans la cour. Une délégation de dix émeutiers monte dans l’appartement afin d’y récupérer les papiers désirés et les jette par la fenêtre. La troupe réunie dans la cour, après avoir obtenu une barrique de vin, menace à nouveau de mettre le feu au manoir.
Vers dix heures, M. et Mme de Breil-Houssoux, effrayés par la tournure des événements, s’enfuient avec leurs plus jeunes enfants, leur précepteur et deux domestiques et se réfugient chez Florimond Herviaux, du village de Leneheuc en Treffendel. M. et Mme de Breil-Houssoux sont à peine arrivés que Jean Mérel, accompagné d’un autre homme, frappent à la porte. Après avoir fait lire le « renoncy » écrit par M. du Breil-Houssoux, ils le déclarent insuffisant et demandent à ce qu’un autre soit rédigé. Florimond Herviaux persuade Jean Mérel et son compagnon de revenir le lendemain. Dès qu’ils sont partis, M. du Breil-Houssoux rédige un nouveau billet et l’envoie porter à son manoir. Mais le précepteur n’y trouve que quelques émeutiers avinés et préfère le remettre à Florimond Herviaux afin qu’il le donne à Jean Mérel. — Sée, Henri ; Rébillon, Armand (1920) op. cit., p. 284 —
Le 28 au matin, un grand nombre de vassaux se rendent au domicile du sieur Régnault, procureur fiscal du seigneur de Breil-Houssoux.
Déclaration de Joachim-Joseph, fils de Joseph Régnault
[Ils] demandèrent les papiers et menacèrent le déposant de le tuer ; il fut même saisi par Pierre Méhaut, François Rozé et Joseph Mérel, qui voulurent le mettre dans le feu, il fut poursuivi par plusieurs paysans, armés de différents outils de labourage. [Jean Bonjean lui dit] Si tu ne viens pas demain apporter une déclaration, par laquelle ton père et toi, vous renoncez à travailler dans la paroisse, nous reviendrons mettre le feu dans la maison.
Les émeutiers se rendent ensuite chez le greffier Danet, demandent à boire, à manger et menacent sa mère. Les assaillants sont finalement repoussés mais la pression et les menaces sur Danet continuent les semaines suivantes.
Le parquet hésite à arrêter tous les émeutiers cités dans l’attaque du manoir de Breil-Houssoux car il en résulterait de grands inconvénients dans une contrée où tous les esprits paraissent encore disposés à la révolte
. Finalement, le parquet décrète en juin la prise de corps des meneurs identifiés de l’émeute, tous de la trève de Treffendel : Pierre Éon, dit Coti ; Joseph Mérel, trésorier de la fabrique de Treffendel ; Jean Bonjean ; François Rozé, du bourg ; Joseph Crambert, dit Barbedor ; Pierre Méhault ; Jean Régnault ; François Rozé ; André Goaret ; Yves Boivin, bourrelier. Les autres, au nombre de dix-huit, sont ajournés. — Sée, Henri ; Rébillon, Armand (1920) op. cit., p. 287 —
L’attaque du manoir de Francmont
Le 28 janvier 1790, le château de Francmont (ou Franquemont), en la paroisse de Plélan, connait le même sort que le Breil-Houssoux. Un groupe de trente à quarante personnes
selon Joseph Bruné, soixante à quatrevingt personnes
selon Guillaume Berhaut, environ cent cinquante vassaux
selon Guillaume Ramé, se présente devant le sieur Le Breton, beau-frère du fermier général de la seigneurie, M. de Quelec. Les émeutiers, venus de Derval, de Boutavent en Iffendic, de Bonamenay en Paimpont, de Trecouët, de La Brennetais et du Coudray en Treffendel, du Rocher et de La Haye en Plélan sont des vassaux du seigneur de Francmont, M. Viard de Jussé 2.
En l’absence du seigneur de Jussé, les émeutiers forcent Le Breton à lui écrire pour exiger qu’il vienne le samedi suivant muni de tous ses titres. — Sée, Henri ; Rébillon, Armand (1920) op. cit., p. 293 —
A Franquemont, le 28 janvier 1790. Aujourdhui jeudi vingt huit, tous vos vassaux se sont presentés, c’est-à-dire ceux de Derval, Boutavent, le Trecouet, etc. Il me charge de vous ecrire et je le fait en leur presence. Ils exige que vous vous trouviez samedi au plus tard pour leur remettre tous les titres que vous avez contre eux, tel que les aveux, les titres, terriers, rolles, tant par avene que par deniers, en un mot generalement tous les papiers qui peuvent les regarder ; que vous leur donniez un abandon sur papier timbré de tous les drois que vous ou vos fermiers pouriez exiger. Ils me charge en outre de vous dire que si vous n’acciesez pas à leur demande, ils metront le feu et bruleront votre chateaux. Ils ont brulé absolument tous les papiers qui etoient ici, sans excepter aucun, n’en ayant point soustrait. Je vous invite et vous prie même de ne pas manquer de vous trouver ici ; dans le cas contrer, vos interets ne pouroient qu’en soufrir beaucoup. Ne cregnez rien pour votre personne, je suis sure qu’il ne vous arivra aucun mal, vos vassaux n’etant pas naturellement mechan. Signé Sieur Du Breton, officier d’infanterie.
Selon Jacques Bruné, laboureur à Bonamenay en Paimpont, les émeutiers brûlent ensuite les titres du sieur de Jussé dans la cour du château puis restent jusqu’à la nuit à manger et boire les réserves de Franquemont 3.
Les émeutiers reviennent le vendredi et le samedi suivants. M. Le Breton parvient à les calmer en annonçant le renoncement prochain du sieur de Jussé à ses droits. — Sée, Henri ; Rébillon, Armand (1920) op. cit., p. 293 —
Dix-sept témoins sont interrogés par la sénéchaussée et le présidial de Rennes lors de l’enquête du 19 juin 1790. Neuf sont de Bonamenay en Paimpont : Jacques Bruné cité précédemment ainsi que son frère Joseph, fermier laboureur 4, Guillaume Berhaut, cordonnier 5, Michel Regnault, laboureur, absent quand on attend de le voir comme témoin de l’incendie des papiers, il n’arrive qu’à "soleil couchant" au château...
, Mathurin Berhault, charpentier 6, Joseph Merel, marchand de toile 7, Jean Cochet, marchand de fil 8, Michel Frotin, fermier laboureur 9, et enfin Gilles Merel, marchand de fil 10.
Les huit autres témoins sont de Plélan-le-Grand : Jacques Régnault, laboureur en son bien, aux Champs Jehanne 11, Paul Pierret, domestique du château de Franquemont 12, Guillaume Ramé, garçon meunier au moulin de Franquemont 13, Anne Janin, domestique du Sieur de Queheleuc, fermier général 14, Jacques Fresnais, laboureur en son bien et marchand, à la Haye en Plélan 15, Marie Amice, domestique à Franquemont 16, Jean Frotin, fermier laboureur au Rocher en Plélan 17, et François Salmon, domestique à Franquemont 18.
Le 26 juin 1790, dix individus de Treffendel, sont nommés à comparaître en personnes à la chambre criminelle
du présidial de Rennes pour être jugés dans l’Affaire du château de Franqmont en Plelan
. L’un des dix, Florimond Herviaux, n’est finalement pas condamné attendu ce qui resulte de la deposition de Mad. Du Breilhoussoux dans l’affaire du Breilhoussoux, page 7 dudit cahier.
— Cahier d’information du 19 juin 1790 par la sénéchaussée et présidial de Rennes A.D.I.V. 2B 1215 in TIGIER, Hervé, Terroir de Paimpont, Auto-édition, 2016. —
L’arrivée de l’armée royale
Le 28 janvier, la municipalité de Rennes réagit enfin. Des troupes arrivent dans les cantons de Plélan, de Maure, de Lohéac, et de Bain. Elles ont pour mission de calmer la situation par un discours d’apaisement, de patience et de confiance dans les décisions de l’Assemblée Nationale. Les troupes envoyées à Plélan sont composées d’un détachement de soldats du régiment d’« Artois infanterie », sous le commandement du chevalier de Campagnac et d’un détachement de dragons commandé par M. de Fouchy. — DUPUY, Roger, La Garde Nationale et les débuts de la Révolution en Ille-et-Vilaine (1789 - mars 1793), Paris, Librairie C. Klincsieck, 1972, (« Institut armoricain de recherches historiques de Rennes »). —
L’assemblée considérant que l’insurrection qui a eu lieu et dont les campagnes, aux environs de Guer et de Plélan, sont encore en ce moment menacées, ne peut être attribuée qu’à l’ignorance des décrets de l’Assemblée Nationale et aux nouvelles vexations que des mal intentionnés avaient pu leur faire éprouver, a nommé MM.. et les prie de se transporter dans les campagnes de Plélan, Guer et environs pour instruire les habitants des décrets de l’Assemblée Nationale, recevoir les mémoires de leurs plaintes et demandes, rapporter les procès verbaux de l’état des choses et des faits, engager les habitants à attendre, dans la paix et la tranquillité, l’heureux effet des travaux de l’Assemblée Nationale...
Aucun château ne sera plus attaqué sur la paroisse de Plélan, mais la pacification n’est que de surface. Le 1er février, le sieur Sauvage, procureur fiscal et futur maire de Plélan écrit à la municipalité de Rennes pour se plaindre de la violence qui s’exerce sur lui. — Sée, Henri ; Rébillon, Armand (1920) op. cit., p. 335 —
Lettre de Sauvage à la municipalité de Rennes
Je soussigné certifie que ce jour, 1er février 1790, aux quatre heures de l’après-midi, les nommés Louis Doublet, Bon-Marie Jan et Louis Jan, demeurant au village de Coganne, paroisse de Paimpont, seraient venus me trouver en mon étude, au bourg de Plélan, m’auraient fait la demande de pièces et procédures que j’avais à eux, en me disant de leur les remettre sur-le-champ, que j’étais un voleur, qu’il devait descendre à Plélan, samedi prochain, quatre paroisses pour brûler mon étude et celle des autres procureurs, que leurs menaces m’ont nécessité d’avoir recours à la garde, qui s’est rendu en mon étude, et en présence desquels et plusieurs autres personnes, ces propos et autres de même nature ont été tenus, Ledit an et jour que devant.
Le 3 février, les officiers du détachement d’Artois sur le départ rendent compte de la situation à la municipalité de Rennes.
Lettre des officiers aux commissaires du conseil de la municipalité de Rennes, Plélan, ce 3 février 1790 - Signé E.M. Gérard, capitaine ; Maissé, Lieutenant ; le chevalier de Campagnac, commandant le détachement d’Artois infanterie ; Bedouet d’Orville, aide-major ; Boulanger le jeune, lieutenant.
Messieurs, nous venons de recevoir la lettre par laquelle vous nous mandez de revenir à Rennes le plus tôt possible. Le conseil tenu hier a cru devoir envoyer à Ploërmel un détachement pour dissiper les attroupements dont il était menacé ; il a produit un très bon effet : le reste de l’émeute et des mutins qui étaient dans cette ville, au bruit de l’arrivée des dragons, s’est dispersé. Comme on craignait encore aujourd’hui une grande fermentaton, sur un réquisitoire, on y a laissé 15 dragons, qui reviendront cette nuit. D’après ces considérations, le conseil tenu à l’ordinaire et composé de MM. les commissaires et chefs de différents corps a arrêté de partir jeudi 4, conformément à vos ordres, à moins que dans l’intervalle, vous ne nous envoyiez des contraires. Nous avons l’honneur d’être, Messieurs, avec respect vos très humbles et très obéissants serviteurs.
Le 4 février, M. de Fouchy, l’un des chefs du détachement envoyé à Plélan, laisse entendre que sa mission d’apaisement est en voie d’achèvement. — DUPUY, Roger, La Garde Nationale et les débuts de la Révolution en Ille-et-Vilaine (1789 - mars 1793), Paris, Librairie C. Klincsieck, 1972, (« Institut armoricain de recherches historiques de Rennes »). —
Lettre de M de Fouchi à la municipalité de Rennes
Je suis fort aise, Monsieur, que la municipalité ait adopté le plan de nous laisser le détachement [de dragons] ici jusqu’à lundi matin et qu’elle nous ait renvoyé les commissaires dont le zèle et les qualités conciliantes peuvent contribuer à ramener le bon ordre. Nous commençons à espérer remplir notre mission sans être sorti des voies de modération. L’exemple de Pipriac, l’enlèvement des prisonniers qu’on vous a envoyés à Rennes, nous préservera d’en faire de ce côté-ci. Les têtes se refroidissent ; en gagnant du temps, les gens se dissipent, et s’il y a du mal, je crois qu’il sera dans des cantons plus reculés.