Morin du Marais, Charles
Morin du Marais, Charles (?-1804) : 33e et dernier abbé de Notre-Dame de Paimpont de 1781 à 1789.
Charles Morin du Marais est né dans une famille normande originaire de Lisieux, portant d’argent au lion de sable couronné d’or
. Chanoine de l’Église de Paris, il est nommé abbé commendataire de l’abbaye Notre-Dame de Paimpont le 7 septembre 1781. — GUILLOTIN DE CORSON, abbé Amédée, Pouillé Historique de l’archevêché de Rennes, Vol. 2, Rennes, Fougeray éditeur, 1891, Voir en ligne. p. 685 —
De 1781 à 1785, l’abbé s’en remet à un homme d’affaires local, Louis-René Richelot du Plessis, régisseur qui gère pour lui les biens de sa mense. Ce dernier a déjà exercé les mêmes fonctions pour l’abbé précédent, Sébastien-Corentin Le Dall de Tromelin (1772-1781). Louis-René Richelot envoie régulièrement des nouvelles de sa gestion et lui rend compte des revenus de sa mense : 10 451 livres en 1781, 9 755 en 1783, 8 894 en 1784 et 10 197 en 1785. Charles Morin du Marais lui envoie des consignes, des procurations et des nouvelles de la capitale. Cette correspondance éclaire les tensions qui existent avec les religieux de Paimpont à cause des procès en cours. — BRETON, Yves, Les génovéfains en Haute-Bretagne, en Anjou et dans le Maine aux XVIIe et XVIIIe siècles, Editions Hérault, 2006. [pages 161-162] —
Lettre de Charles Morin du Marais à Louis-René Richelot du Plessis
On vient encore d’écrire de faire avant tout la réparation du Moulin de Mauron. Vous voyez bien qu’il n’a pas été répondu à mon énoncé du 17 janvier ny par acte capitulaire ny par lettres. On est encore bien éloigné des bonnes intentions annoncées et puisqu’il faut du canon j’y aurais recours avec regret mais sans me décourager jamais... On veut me persuader d’aller aux Etats, si j’y vais ce sera dans l’intention de faire des connaissances relatives aux procès dont je suis menacé ... Je lis et relis non seulement vos lettres, mais les miennes, je vous prie incessamment de recueillir dans le peu de papiers que vous avez tous les renseignements que vous pourrez. J’y ajouterais ceux que j’ai de mon coté pour nous mettre bien au fait de tout car il va falloir nous préparer à attaquer et à défendre.
L’abbé se défie également du personnel qui travaille sur son domaine et le soupçonne d’être aux ordres des chanoines. Le 10 janvier 1782, il demande à son régisseur de suspendre la nomination d’un garde de la forêt trop favorable selon lui aux religieux.— BRETON Yves (2006) op. cit., p. 162 —
En avril 1782, l’abbé est à Rennes et apprend à l’occasion d’une visite de courtoisie chez l’évêque le décès de monsieur d’Andigné de la Chasse à qui il loue un trait de dîme en Mauron pour 600 livres. Il désire un repreneur pour 800. Il apprend également que le moulin de Mauron est en si mauvais état qu’il ne peut être loué sans perte. Il rencontre les autorités de Sainte Geneviève, qui lui assurent qu’elles ont fait passer là-bas dix mille francs [en Bretagne] et recommander de commencer par le Moulin de Mauron.
Il se procure des documents faisant état dès 1675 des travaux à faire à la chaussée du moulin à eau situé à la porte du couvent, mais pour laquelle rien n’a été entrepris. Il ressort enfin des archives le projet de construction de l’abbatiale. — BRETON Yves (2006) op. cit., p. 331 —
Quand à l’abbatial (sic) levès, je vous prie l’expédition de l’acte du 24 aout 1666… et surtout faites faire ou prenez vous-même copie figurée du plan et devis annexé, que je n’ai pas. Je n’ay qu’à me tenir à cet acte capital et leur dire, voila votre loy, si ce n’est que les 4000 livres promis en 1666 doivent être portées aujourd’huy peut-être à 10 ou 12. Quant aux matériaux des bâtiments, si je consens à une suppression ils devraient être emploiés à la construction de cet abbatial et de ses dépendances. Je serais très curieux de faire application de cet acte de 1666 sur le terrain et je crois voir que cela traverserait l’allée qui aboutit en face sur l’église, laquelle allée n’a surement été plantée que depuis 1666 et n’était point alors l’arrivée de l’abbaye mais bien l’avenue qui vient à l’auberge.
Pour une raison que l’on ignore, l’abbé abandonne finalement son idée de construction. Il se rend également compte de la gestion désastreuse des bois de l’abbaye depuis le début du siècle, ainsi que des différentes malversations commises à ce sujet et des sentences qui condamnent les religieux à de grosses amendes (25 000 livres en 1774). Ces démarches conduisent à la réalisation d’un procès-verbal de l’état de la maison et de ses dépendances du 6 juillet 1783 au 5 août 1784. Il est effectué par Jacques Piou, ingénieur des Ponts et Chaussée de Bretagne, demeurant à Rennes (ADIV 2 B 490) — BRETON Yves (2006) op. cit., p. 332 —
Lassé des incessants conflits et procès avec les religieux de Paimpont, Charles Morin du Marais entreprend de passer un accord avec Guy Adelaïde du Boys, prieur claustral de Notre-Dame de Paimpont afin d’échanger ses bénéfices contre une rente annuelle.
En novembre 1785 le P. Dubois, prieur, doit se rendre lui aussi à Paris pour transiger avec l’abbé de Paimpont, Charles Guillaume Morin du Marais, chanoine de l’église de Paris et syndic du diocèse. Il mit ainsi un point final à un long et scandaleux conflit entre l’abbé commendataire et ses moines en lui abandonnant 7000 livres de rente annuelle, payés en quatre termes égaux, en échange de la jouissance de tous les revenus de l’abbaye, mais prenant la charge de toutes les réparations grosses et menues de tous les bâtiments, métairies, moulins, les portions congrues, impositions, achats de mobilier et d’ornement.
Le 1er décembre 1785, les génovéfains signent un nouveau bail avec l’abbé en conflit avec ses chanoines pour : « mettre fin à toutes les contestations et difficultés qui pourraient troubler et altérer la paix qu’ils sont dans la disposition invariable d’entretenir entre eux et terminer tous les procès qui pourraient suivre ou naitre relativement. » 1 — BRETON Yves (2006) op. cit., p. 332 —
Le décret du 2 novembre 1789 met les biens de l’Église, dont ceux des congrégations, à la disposition de la nation. Le décret du 13 février 1790 interdit les vœux monastiques et supprime les ordres religieux réguliers. La communauté religieuse de l’abbaye de Paimpont n’existe plus.
Charles Morin du Marais meurt le 29 avril 1804. — GUILLOTIN de CORSON (1891) op. cit., p. 685 —