1878-1928
Niel, Marthe
Une pionnière de l’aviation née à Paimpont
Marie-Ange Denieul — Éléments biographiques
Une naissance à Paimpont
Marie-Ange Denieul est née dans une famille modeste de Haute-Bretagne. Son père, Joachim Pierre Denieul (1832- ) est laboureur, sa mère Marie Joseph Saget (1842- ) est ménagère. Ils se marient le 14 janvier 1861 à Saint-Malon-sur-Mel (Ille-et-Vilaine). — FAMILLES DE BRETAGNE, « Généalogie de Joachim Pierre Denieul », 2024. —
Selon Philippe Busch, biographe de Marthe Niel, dix enfants naissent de leur union. — BUSCH, Philippe, Une passion jusqu’au ciel : Marthe Niel et Paul Koechlin, Les éditions de l’officine, 2016, 284 p. — Nous connaissons le prénom de huit d’entre eux grâce à un document notarié daté de 1930.— ANONYME, « Vente par licitation des immeubles du Pont du Secret », L’Ouest-Éclair, 6 mai, 1930, p. 11, Voir en ligne. —
- Pierre Marie 1
- Pauline Marie Joseph 2
- Nathalie Marie Joseph 3
- Angèle 4
- Alfred-Jean-Marie 5
- Léonard 6
- Joseph 7
- Marie-Ange, née le 29 décembre 1878 au Cannée, hameau de la commune de Paimpont.
L’an mil huit cent soixante dix huit le vingt neuf décembre à cinq heures du soir devant nous Aimé BIGARRE propriétaire Maire Officier de l’état Civil de la commune de Paimpont Canton de Plélan Département d’Ille et Vilaine, a comparu Joachim DENIEUL laboureur âgé de quarante six ans demeurant au Cannée en cette commune, lequel nous a présenté un enfant du sexe féminin né ce soir à trois heures en son domicile de lui déclarant et de Marie Joseph SAGET, son épouse ménagère âgée de trente huit ans même domicile, lequel a déclaré donner les prénoms de Marie Ange. Déclarations et présentation ont été faites en présence de Jean Marie MOINARD secrétaire âgé de soixante cinq ans et Prosper FOULON marchand âgé de soixante cinq ans domiciliés de Paimpont, dont acte sous notre seing et ceux des témoins, le père a déclaré ne savoir signer après lecture.
Un premier mariage
En 1894, âgée de seize ans, Marie-Ange Denieul quitte Paimpont pour Paris.
En 1900, elle est cuisinière chez le marchand de vin Pierre Firmin Fontalbat (1872- ). Ils se marient le 9 mai 1900. Le couple habite au 3, rue Constance, à proximité de la butte Montmartre. — BUSCH, Philippe, Une passion jusqu’au ciel : Marthe Niel et Paul Koechlin, Les éditions de l’officine, 2016, 284 p. [page 39] —
Le 4 février 1904, leur divorce est prononcé suivant jugement du Tribunal civil de la Seine
. — L’AGENT DÉLÉGUÉ, « Copie d’acte de mariage n° 2 de KOECHLIN Jules Jean Jacques Paul et de DENIEUL Marie Ange », 1915, Voir en ligne. —
La rencontre avec Paul Kœchlin
En septembre 1904, Marie-Ange Denieul voyage en compagnie de Paul Kœchlin (1881-1916) sur le paquebot « Lorraine » à destination de l’exposition universelle de Saint-Louis (États-Unis).
Le manifeste des passagers est particulièrement intéressant puisqu’il nous apprend que Paul et Marie Ange sont tous les deux mariés. Il parait évident que cette déclaration pour le moins erronée leur permet de justifier le partage d’une cabine.
Un article de 1929 relatif à une vente aux enchères de ses biens mentionne l’existence d’un salon indochinois, rare et luxueux
, qu’elle aurait importé d’Amérique en 1906
. — ANONYME, « Le salon de feu l’aviatrice Marthe Niel », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 23 mai, 1929, p. 2, Voir en ligne. —
Par ailleurs, selon, G. Le Grand, journaliste à l’Auto, Marie-Ange Denieul séjourne deux ans aux États-Unis.
[Marie-Ange Denieul] s’est adonnée de longue date aux sports : la bicyclette lui est familière, et, pendant deux ans, elle a sillonné en automobile l’Amérique, dans tous les sens.
Son compagnon de voyage, Paul Kœchlin, est le fils d’une famille d’industriels alsaciens 8. Cet ingénieur talentueux fait ses débuts dans la construction aéronautique en 1908. Dans un premier temps, il s’associe à l’ingénieur Alfred Pischof (1882-1922) avec lequel il réalise un monoplan à trois paires d’ailes en tandem, testé à partir de mai 1908.
En 1909 - à la suite de divergences sur la stratégie de développement de l’entreprise
- Alfred Pischof quitte Paul Kœchlin pour s’associer à Louis Blériot (1872-1936).— Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 98 —
Entre 1909 et 1910, Paul Kœchlin poursuit son activité aéronautique et produit ses monoplans qu’il exhibe lors de salons et de meetings aériens. En 1910, il transfère son activité à Mourmelon-le-Grand (Marne) où il implante sa propre école de pilotage.— Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 123 —
Marthe Niel — L’aviatrice
L’école de pilotage de Mourmelon
À partir de 1909, Mourmelon accueille des constructeurs et des pionniers de l’aviation. Plusieurs écoles de pilotage sont fondées. Elles utilisent les infrastructures du camp militaire pour leurs expérimentations.
La première école, créée par les Aéroplanes Voisin 9, ouvre en 1909. En 1910, elle est rejointe par une seconde école, fondée par la Société des avions et moteurs Antoinette 10. La même année, Paul Kœchlin transfère son école de pilotage de Viry-Châtillon (Essonne) à Mourmelon 11.
Marie-Ange Denieul fait son entrée dans l’histoire de l’aéronautique sous le pseudonyme de Marthe Niel 12 lors de son admission à l’école Kœchlin en avril 1910. — MARCK, Bernard, Elles ont conquis le ciel : 100 femmes qui ont fait l’histoire de l’aviation et de l’espace, Arthaud, 2009. [page 27] —
Elle y enchaine les vols à partir de mai 1910, en vue d’acquérir son brevet de pilote.
- Le 14 mai.
À Mourmelon, à école Kœchlin [...] Mme Niel fait de jolis vols en ligne droite.
— ANONYME, « Les vols d’hier en France », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 16 mai, 1910, p. 5, Voir en ligne. —
- Le 18 mai.
A l’école Kœchlin, Weiss, Mme Niel et Saint-Didier s’entrainent.
— ANONYME, « Les aéroplanes : au jour le jour un peu partout », L’aérophile, 1910, p. 243, Voir en ligne. p. 244 —
- Le 19 mai.
À l’école Kœchlin [...] Mme Niel fait son premier virage.
— ANONYME, « Les vols d’hier en France », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 20 mai, 1910, p. 3, Voir en ligne. —
-
Le 9 juin, à Mourmelon, Weiss et Mme Niel volent sur Kœchlin.
— HARTMANN, Gérard, « Marcel Hanriot plus jeune pilote d’Europe », 2007, Voir en ligne. —
- Le 4 juillet
à Mourmelon [...] De Langhe, Navetta et Mme Niel s’entrainent.
— L’aérophile (1910) op. cit. p. 341 —
- Le 5 juillet
à Mourmelon [...] Mme Niel évolue avec aisance à 20 mètres d’altitude.
— ANONYME, « Ici, là et partout », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 6 juillet, 1910, p. 6, Voir en ligne. —
-
Le 14 juillet, à Mourmelon, Weiss et Mme Niel volent sur Kœchlin.
— L’aérophile (1910) op. cit. p. 341 —
- Le 27 juillet,
à l’école Kœchlin, Mme Niel fait trois tours.
— L’aérophile (1910) op. cit. p. 362 —
-
Le 1er août 1910, à Mourmelon, Weiss et Mme Niel volent sur Kœchlin.
— L’aérophile (1910) op. cit. p. 334 —
- Le 23 août.
A l’école Kœchlin, Mme Niel fait plusieurs tours de piste à belle hauteur avec son nouvel appareil.
— ANONYME, « Les vols d’hier en France », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 24 aout, 1910, p. 3, Voir en ligne. —
-
Le 27 août à Mourmelon [...], à l’école Kœchlin, Mme Niel et Kœchlin volent.
— L’aérophile (1910) op. cit. p. 434 —
Les meetings aériens de l’été 1910
Durant l’été 1910, et avant même l’obtention de son brevet de pilote, Marthe Niel participe à plusieurs meetings aériens sur monoplan Kœchlin.
La grande semaine d’aviation de la Champagne
Son premier meeting a lieu en juillet 1910. Il s’agit de la Deuxième grande semaine d’aviation de la Champagne, qui comprend une Coupe des Dames où sont inscrites trois femmes pilotes.
Mercredi 6 juillet 1910.
Le public attend avec impatience la Coupe des Dames. Très suivie par la presse, cette Coupe met en concurrence la Française Élise Deroche sur Voisin à moteur ENV, la Belge Hélène Dutrieu sur un biplan Farman à moteur Gnome et Marthe Niel, trente ans, une débutante qui a appris à piloter à Mourmelon sur un monoplan Kœchlin.
Les industriels ont beaucoup investi dans ce meeting, dans le but de déclencher des commandes de la part de l’armée française. Marthe Niel présente deux aéroplanes de la marque Kœchlin. — HARTMANN, Gérard, « Les moteurs d’aviation Panhard & Levassor », 2015, Voir en ligne. p. 15 —
Les fêtes d’aviation de Rennes
De grandes fêtes d’aviation sont organisées à Rennes lors du dernier week-end de juillet 1910, à l’initiative du comité des fêtes de la ville et de la Société aérienne de Bretagne. Les festivités se déroulent sur l’hippodrome des Gayeulles, transformé pour l’occasion en aérodrome. — BENSOUSSAN, David, « Les fêtes d’aviation à Rennes en juillet 1910 », Place publique, 2015, Voir en ligne. —
Le 25 juillet 1910, Marthe Niel propose sa candidature à ces festivités rennaises.
La proposition de Mme Niel les a enchantés, mais il n’ont pu prendre aucune décision, étant liés par les prévisions budgétaires qu’il n’est pas en leur pouvoir de dépasser. [...] Cependant, nous croyons savoir que les comités rennais, désireux de s’attacher le concours de Mme Niel, n’hésiteraient pas à lui allouer une somme de 2000 francs [...]. Quoiqu’il en soit, il serait fâcheux de ne pas donner suite à la très intéressante proposition de Mme Niel, dont l’engagement viendrait corser de façon sensationnelle le programme de nos fêtes d’aviation.
L’article insiste sur l’origine paimpontaise de l’aviatrice.
Ajoutons que Mme Niel est une Bretonne d’Ille-et-Vilaine ce qui serait une raison de succès de plus. Elle est originaire de Paimpont et elle possède à Rennes une sœur. Elle serait donc, aux titres d’aviatrice et de compatriote, doublement applaudie.
Finalement, Marthe Niel ne participe pas à ce meeting.
Le brevet de pilote n°226
À partir de 1909, des règlements sont mis en place par l’Aéroclub de France afin de délivrer des brevets de pilote-aviateurs 13. Le brevet est décerné après trois épreuves contrôlées par des commissaires de l’Aéroclub de France.
Marthe Niel passe avec succès sa première épreuve le 21 juillet, à Mourmelon, sur monoplan Kœchlin.
— L’aérophile (1910) op. cit. p. 362 —
Le 29 août 1910, elle obtient le brevet n°226 mais doit cependant attendre le 19 septembre, afin que soit officiellement publiée son attribution. — L’aérophile (1910) op. cit. p.455 —
Elle est alors - juste après Élise Deroche 14 - la seconde femme aviatrice brevetée en France et la première sur monoplan. — ANONYME, « Les aéroplanes : au jour le jour un peu partout », L’aérophile, 1910, p. 243, Voir en ligne. p. 455 —
Les entrainements continuent
Forte de l’obtention de son brevet de pilote, Marthe Niel continue les entrainements à Mourmelon sur monoplan Kœchlin au cours des mois de septembre et d’octobre 1910.
- Le 1er septembre,
à l’école Kœchlin, Mme Niel vole 20 minutes.
— L’aérophile (1910) op. cit. p.435 —
- Le 6 septembre.
À Mourmelon. — Mme Marthe Niel, à l’école Kœchlin, continue son entraînement.
— ANONYME, « Les vols d’hier en France », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 07 septembre, 1910, p. 3, Voir en ligne. —
- Le 11 septembre.
Mme Niel, sur monoplan Kœchlin, fait deux vols dans la campagne.
— L’aérophile (1910) op. cit. p.437 —
- Le 14 septembre.
A l’école Kœchlin, Mme Niel, le lieutenant Joly, Frantz sortent et volent.
— L’aérophile (1910) op. cit. p.458 —
- Le 4 octobre,
à l’école Kœchlin, Mme Niel s’entraine et vole.
— L’aérophile (1910) op. cit. p.462 —
- Le 15 octobre.
A l’école Kœchlin, Péris, Frantz, Mme Niel volent
— L’aérophile (1910) op. cit. p.463 —
-
Le 27 janvier 1911, Mme Niel, vole deux fois 15 minutes à Mourmelon.
— Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 160 —
La première femme pilote d’essai
En février 1911, elle teste à Mourmelon un monoplan Kœchlin type C, ce qui fait d’elle la première femme pilote d’essai de l’histoire de l’aviation. — MARCK, Bernard, Elles ont conquis le ciel : 100 femmes qui ont fait l’histoire de l’aviation et de l’espace, Arthaud, 2009. [page 27] —
Les meetings aériens de 1910-1911
Les monoplans Kœchlin font partie des avions particulièrement estimés sur le marché de l’aéronautique français. Les démonstrations réalisées par ses trois pilotes, Joseph Frantz, Paul Weiss et Marthe Niel, concourent à montrer l’efficacité et la simplicité de leur utilisation.
Nul n’ignore que M. Kœchlin est un chercheur sagace et un technicien d’une rare valeur. Depuis près de cinq ans, il s’occupe théoriquement et pratiquement d’aviation, cinq ans qui représentent une éternité tant les choses ont été vite dans notre monde spécial. Ses appareils ont été parmi les premiers à voler, et les derniers types qu’il a sortis sont considérés parmi les techniciens comme égaux aux meilleurs dans l’ensemble de leurs qualités. Il suffit d’ailleurs, pour s’en rendre compte, de voir avec quelle facilité le premier venu arrive à les conduire instantanément. Est-il d’ailleurs de meilleure preuve que celle de voir une jeune femme, Mme Marthe Niel, qui, pour se distraire (le charme et la grâce n’excluent pas l’intrépidité) apprend à manier un appareil, passe son brevet de pilote, et quand la fantaisie lui prend, s’envole sur son aéroplane comme d’autres font du footing ou du golf ?
Le meeting de Los Angeles
La nouvelle de l’attribution de son brevet de pilote à Marthe Niel est parvenue aux États-Unis. Des organisateurs de meeting se mettent en relation avec elle afin de l’inviter Outre-Atlantique.
Ainsi, le « Los Angeles Herald » du 26 septembre 1910 fait état d’un courrier qu’elle a adressé au secrétaire Green chargé de l’organisation du meeting de Los Angeles du mois de janvier 1911. Elle fait part de sa préoccupation d’avoir de solides garanties pour elle et ses trois mécaniciens. Finalement, elle ne donna pas suite [...].
La fête de l’aviation de Vitry-le-François
Marthe Niel est présente à la première fête de l’aviation de Vitry-le-François
(Marne) le 18 septembre 1910. — Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 137 —
Le meeting de Dijon
Marthe Niel est inscrite au Meeting de Dijon, du 22 au 25 septembre 1910. En raison de l’abandon de Victor Rigal et de René Simon, six aviateurs restent en compétition, Renaux, Martinet, Barrier, Hanriot, Mouthiers et Marthe Niel qui est la seule aviatrice à concourir.
Un engagement sensationnel. — Mme Marthe Niel pilotera son monoplan Kœchlin au meeting dijonnais. Le Comité d’aviation du meeting de Dijon ne reste pas inactif : tout en faisant diligence pour organiser les fêtes de la semaine prochaine, pour aménager pistes, tribunes, clôtures, etc., installées sur le terrain de manœuvres, il vient de renforcer le programme des acteurs monoplanistes et biplanistes, en s’assurant, - au moyen d’un prix créé spécialement pour cette aviatrice, le concours de la gracieuse Mme Marthe Niel, la première pilote monoplaniste du monde.
Le dimanche 25 septembre, Marthe Niel, qui atterrit hors du terrain dans un champ de luzerne, prend l’incident avec sourire et désinvolture. Très acclamée, elle obtient un prix spécial.
Dimanche 25 septembre. Madame Marthe Niel devait partir depuis deux jours en biplan. Son mari, très inquiet pour elle, s’oppose à son départ disant que le vent est trop fort. Enfin, madame Marthe Niel se décide à tenter un départ, le premier depuis trois jours ; elle s’élève à quatre mètres et atterrit quelques secondes après, sans que ce départ puisse être compté pour une envolée. Tous ces jours derniers, son mari s’était opposé à ce qu’elle partît en raison du vent.
Il y aura bien sûr aussi une aviatrice, sportive aguerrie dans le domaine de l’automobile et du vélo, Madame Marthe Niel qui participait à son premier meeting aérien. Très acclamée, elle méritera bien son prix spécial .
Deuxième exposition de locomotion aérienne
La deuxième exposition internationale de locomotion aérienne ouvre ses portes au Grand Palais (Paris) le 15 octobre 1910. Le monoplan Kœchlin y est présenté entre deux meetings, en compagnie d’autres avions français. L’importance de Marthe Niel dans la promotion de la marque Kœchlin est soulignée par l’auteur d’un article.
Kœchlin, à côté, soulevait aussi l’enthousiasme, car son monoplan, le plus léger, le plus vite et par conséquent le mieux conçu méritait d’attirer l’attention : du reste une seule, celle du ministre de la guerre, suffit à justifier les autres. Et puis il faut bien le dire, il y avait aussi une question de galanterie, depuis que toutes les sportswomenns, marchant sur les traces de Mme Marthe Niel, veulent avoir leur « petit Kœchlin ».
Le meeting de Bruxelles-Etterbeek
Du 18 au 30 octobre 1910, Paul Kœchlin et Marthe Niel participent au meeting de Bruxelles-Etterbeek.— Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 149-150 —
Kœchlin a fait ensuite un tour pour mettre au point le monoplan de sa fabrication, piloté par Mme Niel. L’aviatrice a volé pendant deux minutes à six ou sept mètres de hauteur. Elle a avoué à sa descente d’appareil, qu’elle était impressionnée, ayant reçu le matin une lettre d’une somnambule lui enjoignant de ne pas voler à Etterbeek car elle y trouverait la mort.
La coupe Femina
En décembre 1910, Marthe Niel déclare vouloir participer à la coupe Femina. Cette coupe créée en 1910 par le directeur du magazine Femina Pierre Lafitte, récompense l’aviatrice parcourant la plus longue distance, en un seul vol, au cours de l’année civile.
Une nouvelle compétitrice pour la coupe Femina vient de se révéler en la personne de Mme Niel. On a terminé la mise au point d’un monoplan Kœchlin biplace avec lequel elle disputera la coupe Femina. Elle partira vendredi pour Mourmelon afin de mettre au point son appareil. Les essais terminés, elle s’engagera effectivement. Son appareil est actionné par un moteur 70 HP [...].
Malgré plusieurs tentatives réalisées à Mourmelon durant le mois de décembre, Marthe Niel n’arrive pas à battre la performance d’Hélène Dutrieu qui remporte la coupe Femina décernée le dernier jour de l’année, avec un vol de 2h35mn, soit 167 km parcourus sur un biplan Farman. — Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 153 —
Le meeting de Périgueux
Le premier meeting aérien de Périgueux se tient du 22 au 24 avril 1911. Marthe Niel y concourt en compagnie de trois autres aviateurs, René Labouchère (1890-1968), Jules Fischer et M. Mallard.
Surnommée la femme oiseau, elle provoque l’engouement du public et devient l’héroïne de la manifestation. Son monoplan est qualifié par les journalistes de l’époque comme "gracieux, semblant un énorme papillon élargissant ses ailes d’or autour de son corselet." [...] "serrée dans un manteau de laine blanche coiffée d’un polo rouge" elle suivra l’évolution de son propre appareil, monté par Frantz 15, son tout jeune mécanicien de dix-sept ans dont le brevet n’a guère que trois mois. Enfin, à son tour, elle fait frémir la foule en frôlant la cime des arbres qui bordent la route de Bordeaux et pique du nez à l’atterrissage. Il y a heureusement plus de peur que de mal, "la béquille correspondant aux roues de patins est cassée et les bouts des deux ailes de l’hélice sont éraflés" 16.
Le meeting de Gaillac
Le meeting aérien de Gaillac (Tarn) a lieu du 20 au 22 mai 1911.
Le Comité des fêtes générales de Gaillac organisait une formidable manifestation aérienne, avec la participation de trois aviateurs : messieurs Frantz, Labouchere et Prevost (détenteur en 1913 du record de vitesse à 200 km/h), ainsi que d’une aviatrice : Madame Niel. La première journée, le 22 mai 1911 sous un orage violent, 3000 personnes attendent, bravant une pluie diluvienne, l’envol des aviateurs. Mais, le terrain détrempé et les mauvaises conditions créent de "légers incidents" : appareils enlisés, décollages ratés, hélice cassée. Jusqu’au 26 mai, ces pionniers de l’aviation tiendront en haleine une foule toujours plus nombreuse, car, en plus des 3500 spectateurs payants, tous les champs des alentours sont pris d’assaut par les resquilleurs.
Marthe Niel est grièvement blessée au cours de ce meeting.
[...] l’aviatrice madame Niel, a fait une chute en aéroplane. Elle a été grièvement blessée à la tête, mais ses blessures ne mettent pas ses jours en danger.
Le meeting de Tulle
Le meeting aérien de Tulle (Corrèze) se tient du 29 au 31 juillet 1911.
Marthe Niel vole sur monoplan Kœchlin. Elle est accompagnée de son mécanicien Joseph Frantz, également pilote et de Jean Daillens sur Biplan Sommer de 70 HP (horsepower ou chevaux-vapeur).
Quand arrive le tour de Marthe Niel, son mécanicien Joseph Frantz n’arrive pas à lancer le moteur. Il faut renoncer au grand désespoir de l’aviatrice qui éclate en sanglots et un journaliste de conclure : "son instrument n’est pas au point, on aurait dû s’en assurer en avance." [...]
Le lendemain 31 juillet, c’est au tour de son mécanicien Joseph Frantz d’essuyer un échec.
[...] Comme la veille, madame Niel fond en larmes et le même journaliste enfonce le clou... "Elle pleure ? Rien ne sert de pleurer il faut réparer à temps." Le soir un grand repas réunit tous les participants au Grand Hôtel Notre-Dame, quai de Lyon. Au cours de la soirée, l’infortunée aviatrice sera à nouveau envahie par le chagrin, heureusement, monsieur Leprince, aéronaute et galant homme fera renaitre son sourire en citant des vers de Victor Hugo. Tout à sa tâche de la réconforter, il oubliera d’aller prendre le train qui devait le ramener vers Paris 17.
Le meeting de Ussel
Le meeting aérien de Ussel (Corrèze) a lieu le 7 août 1911. Marthe Niel vole en compagnie de Joseph Frantz et de Lucien Bossoutrot sur un aéroplane Farman.
Ainsi que le « Réveil » l’avait annoncé, madame Niel arrivait dans nos murs samedi dernier. Son appareil volant fut transporté vers le Mazeix, où aussitôt arrivèrent de nombreux curieux pour assister au montage du grand oiseau. […] Lundi matin, les aviateurs mirent au point leurs appareils et le soir, vers six heures, au milieu d’une affluence énorme le monoplan reprenait son envolée, passait comme la veille au-dessus de la ville et allait atterrir dans un champ non loin de son départ. Un quart d’heure après, il repartait pour une seconde randonnée aérienne, évoluait toujours avec aisance et enfin, allait atterrir au même point que précédemment. […] Il nous a été donné d’assister à l’une des plus grandes manifestations du génie humain !
Le meeting de Saint-Yrieix
Selon certaines sources, Marthe Niel participe au meeting de Saint-Yrieix (Haute-Vienne) les 13, 14 et 15 août 1911. — LA RÉDACTION, « Beignon - Carnet de deuil », Le Progrès du Morbihan, 25 novembre, 1928, p. 3, Voir en ligne. LACAN, Claude, Histoire de l’aviation en Limousin, Lavauzelle, 1998, 288 p. [page 71] —
La fin de la carrière de pilote de Marthe Niel
Les meetings de Ussel et de Saint-Yrieix sont les dernières participations de Marthe Niel à ce type d’événement.
Ce sera sa dernière participation connue en tant que démonstratrice. Sans nul doute que les avatars liés à l’entretien du moteur, les frais engagés pour participer à ces meetings et la crainte toujours renouvelée pour Paul de voir sa femme être victime d’un accident finirent par avoir raison de sa motivation.
C’est désormais Paul Kœchlin lui même qui vole lors des derniers meetings aériens avant la cessation d’activité de la maison « Pivot-Kœchlin » à la fin de l’année 1911.
On retrouve Paul Kœchlin et Marthe Niel en janvier 1912 comme passagers d’un Farman lors du meeting de Bouy (Marne)
Le 24 janvier 1912, on les retrouve à Bouy sur un 70HP Farman comme passagers de Fischer lequel effectue des vols impressionnants [...].
Après cette dernière apparition, Marthe Niel et Paul Kœchlin disparaissent des comptes-rendus de l’actualité aéronautique.
Retour en Bretagne
Le mariage avec Paul Kœchlin
En août 1914, Paul Kœchlin s’engage comme volontaire. Il est affecté comme conducteur au 13e régiment d’Infanterie à Apremont, près de Verdun
.— A.D.I.V., Femmes aviatrices, les pionnières françaises de l’aviation, 2023, Voir en ligne.
[page 7] —
Le 18 novembre 1915, il obtient une permission pour se marier avec Marthe Niel en mairie de Paimpont. L’acte de mariage stipule qu’elle est alors domiciliée au Pont du Secret sur la commune de Paimpont. — L’AGENT DÉLÉGUÉ, « Copie d’acte de mariage n° 2 de KOECHLIN Jules Jean Jacques Paul et de DENIEUL Marie Ange », 1915, Voir en ligne. —
Le 4 décembre 1915, quelques jours après leur mariage, Marthe Niel est mentionnée comme membre de l’Aéroclub féminin Stella situé au 86 boulevard Flandrin à Paris. Elle participe aux donations pour les pilotes de l’aéronautique engagés dans le conflit mondial. — ANONYME, « Aéroclub féminin Stella : dons pour les troupes de l’aéronautique », L’aérophile, 1915, p. 292, Voir en ligne. —
La mort de Paul Kœchlin
Le 31 mai 1916, Paul Kœchlin est affecté au 20e escadron du Train comme conducteur. Du 28 avril au 11 août 1916 son corps d’armée combat dans la Somme. Le 1er août 1916, il est grièvement blessé au cours d’une attaque aérienne allemande. Évacué par ambulance, il décède le 17 août 1916. — Busch, Philippe (2016) op. cit. p. 202-205 —
Le mariage avec Raymond Clerc
Le 2 août 1919, Marthe Niel se remarie à Saint-Malo-de-Beignon avec Raymond Clerc, journaliste au Progrès du Morbihan.— ANONYME, « Le salon de feu l’aviatrice Marthe Niel », L’auto : automobile aéronautisme, cyclisme, 23 mai, 1929, p. 2, Voir en ligne. —
En 1919, elle propose ses services à la société des Avions Farman afin de concourir à la traversée aéronautique de l’Atlantique 18.
[Elle] fut reprise de la nostalgie de l’air dès les premières tentatives de la traversée de l’Atlantique et sollicita de la maison Farman de piloter « l’Oiseau Bleu » de France en Amérique, après réentrainement. Elle se montra contrite de ne pas voir, pour diverses raisons, son désir se réaliser.
La mort de Marie-Ange Denieul
Marie-Ange Denieul décède le 18 novembre 1928, à l’âge de 49 ans, dans une clinique de Rennes, à la suite de complications survenues quelques jours après une intervention chirurgicale parfaitement réussie qui laissait originairement de très sérieux espoirs.
Elle est inhumée le 20 novembre à Beignon, dans la sépulture de sa famille. Une assistance nombreuse, parmi laquelle on remarquait de nombreuses personnalités civiles et militaires, a accompagné le corps de la défunte à sa dernière demeure.
— LA RÉDACTION, « Beignon - Carnet de deuil », Le Progrès du Morbihan, 25 novembre, 1928, p. 3, Voir en ligne. —
Sans descendance, la succession de Marthe Niel est partagée entre son mari et ses frères et sœurs.
Les 26 et 27 mai 1929, sa maison et ses biens sont vendus aux enchères au Pont-du-Secret en Paimpont. — ANONYME, « Vente mobilière après décès », L’Ouest-Éclair, 19 mai, 1929, p. 5, Voir en ligne. p. 11 —
Aucune offre n’ayant atteint le prix de réserve, une seconde vente par licitation 19 est organisée le mardi 29 juillet 1930. — ANONYME, « Vente par licitation des immeubles du Pont du Secret », L’Ouest-Éclair, 6 mai, 1930, p. 11, Voir en ligne. —
Commémorations
Contrairement aux autres pionnières de l’aviation, Élisa Deroche (1882-1919), Hélène Dutrieu (1877-1961) ou Marie Marvingt (1875-1963), la renommée de Marthe Niel décline rapidement.
Redécouverte au début des années 2000, son nom apparait dans plusieurs expositions qui lui redonnent sa place dans l’histoire de l’aviation.
2005 — Les premières femmes de l’aviation au Bourget
Marthe Niel est une des dix pionnières de l’aviation mises en valeur à l’occasion de l’exposition Les premières femmes de l’aviation à l’aéroport du Bourget en 2005.
2014 — L’allée Marthe Niel à Rennes
L’allée Marthe Niel est dénommée par délibération du conseil municipal de la Ville de Rennes le 20 janvier 2014. Cette voie se situe entre le boulevard de Cleunay et la Rue Roger-Henri Guerrand.— DAVID, Joël, « Allée Marthe Niel », 2024, Voir en ligne. —
2018 — L’école Marthe Niel à Paimpont
L’école primaire publique de Paimpont prend le nom d’« École publique Marthe Niel » à la suite d’une consultation populaire, actée par une décision du Conseil municipal de Paimpont du 21 juin 2018.
Le nom est officiellement dévoilé à l’occasion de la kermesse de l’école du 23 juin 2018.
2023 — Marthe Niel aux Archives Départementales
En 2023, Les Archives Départementales d’Ille-et-Vilaine (A.D.I.V.) réalisent une exposition intitulée Femmes aviatrices, les pionnières françaises de l’aviation. Marthe Niel y est présentée sur trois panneaux. — A.D.I.V., Femmes aviatrices, les pionnières françaises de l’aviation, 2023, Voir en ligne. [pages 6-8] —