14 août 1352
La bataille de Mauron - I
Un épisode méconnu de la Guerre de Succession de Bretagne
La bataille de Mauron (Morbihan) se déroule le 14 août 1352 pendant la Guerre de Succession de Bretagne dite aussi « Guerre des deux Jeanne ». Cette guerre débute en 1341 et dure 23 ans. Elle s’inscrit dans le cadre plus général de la Guerre de Cent ans, 1337-1453, opposant les « Plantagenêt », rois d’Angleterre et seigneurs d’immenses territoires sur le continent, aux « Valois », rois de France.
Le contexte — La crise de succession au duché de Bretagne
En 1341, une crise dynastique s’ouvre en Bretagne lors de la disparition sans héritier légitime du duc Jean III 1, fils d’Arthur II de Bretagne. Jean III a bien un fils naturel, Jean le Bastard, seigneur de Rosporden, mais sa bâtardise l’empêche d’accéder à la couronne.
En Bretagne les filles peuvent prétendre à la couronne ducale selon les règles de la primogéniture. En pratique, cette règle ne s’est appliquée dans le passé qu’en absence de descendants mâles vivants de la même génération. Jean III n’a pas d’enfants, donc la succession fait retour aux descendants de son père, Arthur II, ce qui ouvre un débat juridique sans précédent.
En effet, Arthur II a plusieurs enfants mâles dont Guy VII, comte de Penthièvre, né de son premier mariage, décédé en 1331, et Jean, comte de Montfort-l’Amaury (Yvelines) 2 né de son second mariage, seul survivant mâle d’Arthur II en 1341.
Selon la coutume successorale bretonne basée sur la primogéniture, Jeanne de Penthièvre 3, fille de Guy VII, dite « Jeanne de Blois » suite à son mariage en 1337 avec Charles de Blois 4, prétend à la couronne ducale. En tant qu’héritière de Guy VII, Jeanne de Penthièvre s’oppose aux prétentions de son oncle Jean, comte de Montfort-l’Amaury, marié à Jeanne de Flandre dite « Jeanne La Flamme », qui se prétend héritier de son demi-frère, Jean III. — LEGUAY, Jean-Pierre et MARTIN, Hervé, Fastes et malheurs de la Bretagne, Ouest-France, 1982, 435 p., (« "Ouest-France" université »), Voir en ligne. [page 99] —
Deux prétendants soutenus par les rois ennemis de France et d’Angleterre
Chacun des prétendants à la couronne ducale rallie des seigneurs bretons à son camp.
Philippe VI de Valois soutient Jeanne de Blois
Jeanne de Blois reçoit le renfort du roi de France, Philippe VI de Valois 5. Elle est soutenue par nombre de grands seigneurs bretons tributaires du roi de France ayant des possessions en France.
Le 7 septembre 1341, par l’arrêt de Conflans (Yvelines) Charles de Blois est reconnu duc-baillistre 6 du duché par les pairs et le Parlement de France. En tant que duc de Bretagne et pair de France, il appelle Philippe VI de Valois à son secours.
Philippe VI de Valois engage l’armée française dans le conflit afin de ne pas perdre son influence en Bretagne.
Édouard III soutient Jean de Montfort
Jean de Montfort reçoit l’appui du roi d’Angleterre, Édouard III 7. Surtout soutenu par la moyenne noblesse bretonne dont certains membres ont des intérêts économiques avec les Anglais, il se déclare duc de Bretagne.
Pour Édouard III, la Bretagne avec ses ports entre l’Angleterre et l’Aquitaine est un enjeu stratégique pour le commerce et un point d’entrée en France.— LEGUAY, Jean-Pierre et MARTIN, Hervé, Fastes et malheurs de la Bretagne, Ouest-France, 1982, 435 p., (« "Ouest-France" université »), Voir en ligne. [pages 100-101] —
Fin 1341, Jean de Montfort est fait prisonnier à Nantes. Philippe VI de Valois le fait enfermer au Louvre. Pendant sa détention, son épouse, « Jeanne La Flamme », retranchée à Hennebont (Morbihan) galvanise ses partisans et les pousse aux combats.
En 1342, elle négocie une alliance durable avec Edouard III. Mais considérée comme folle, Jeanne est écartée de l’action politique 8.
La Bretagne en guerre
La trêve de Malestroit
En janvier 1343, une trêve entre la France et l’Angleterre est signée à Malestroit (Morbihan).
Édouard III devient le tuteur de Jean de Montfort
Le 1er septembre 1344, Jean de Montfort est libéré et reprend le combat mais meurt le 26 septembre 1345. Le roi d’Angleterre, Édouard III devient le tuteur du fils de Jean de Montfort, âgé de 4 ans, futur duc de Bretagne sous le nom de Jean IV 9.
Edouard III nomme des capitaines anglais qui tiennent des forteresses et des villes du duché pour le compte de Jean de Montfort.
Philippe VI est battu à Crécy
En 1346, le roi de France Philippe VI accumule les échecs notamment en perdant la bataille de Crécy (Somme) puis Calais (Pas-de-Calais) en 1347. Le parti de Blois perd du terrain en Bretagne. La « grande peste » sévit alors, ajoutant aux malheurs du temps.
Charles de Blois est fait prisonnier à la bataille de La Roche-Derrien
En 1347, Charles de Blois est fait prisonnier à la bataille de La Roche-Derrien (Côtes-d’Armor) 10. Il est retenu prisonnier pendant neuf ans en Angleterre avec quelques libérations temporaires. En 1347, la trêve de Calais entre Philippe VI et Edouard III suspend le conflit. Jeanne de Blois consacre son énergie à rassembler le prix de la rançon exigée pour la libération de son époux. Chaque partie occupe des territoires à l’intérieur de la Bretagne. Ainsi des Franco-Bretons - de Jeanne de Blois - tiennent Josselin (Morbihan) tandis que des Anglo-Bretons - de Jeanne de Montfort - sont à Ploërmel (Morbihan).
Le « Combat des Trente » est gagné par les Franco-Bretons
Le 26 mars 1351 a lieu le « Combat des Trente » à la lande de Mi-Voie, entre Josselin et Ploërmel (Morbihan). Cet affrontement, gagné par les Franco-Bretons sera magnifié ultérieurement mais il s’agit plus d’un duel collectif, donnant l’occasion aux chevaliers de montrer leur courage, que d’un épisode militaire. — GICQUEL, Yvonig, Le combat des Trente, Coop Breizh, 2004. —
Les Anglo-Bretons tiennent Ploërmel
Le 1er août 1351 la guerre reprend. Les partisans de Jeanne de Blois et de Jeanne de Montfort s’affrontent de nouveau en Bretagne. Les alentours de Josselin et de Ploërmel connaissent les envahissements successifs des troupes blésoises (franco-bretonnes) et montfortistes (anglo-bretonnes). Ces dernières occupent toujours Ploërmel et c’est en vain que Jean II, vicomte de Melun, grand chambellan de Philippe VI, aidé du maréchal Jean de Beaumanoir, tente de reprendre la ville. — LEGUAY, Jean-Pierre et MARTIN, Hervé, Fastes et malheurs de la Bretagne, Ouest-France, 1982, 435 p., (« "Ouest-France" université »), Voir en ligne. [pages 100-101] —
16 novembre 1351. Jean II le Bon fonde l’Ordre de l’Étoile
Jean II le Bon, successeur du roi de France Philippe VI de Valois, crée l’Ordre de l’Étoile en 1351, en réponse à la création de l’Ordre de la Jarretière en 1348 par Édouard III d’Angleterre.
La cérémonie inaugurale a lieu à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), le 6 janvier 1352. Ses statuts prévoient de regrouper autour du roi les cinq cents meilleurs chevaliers de la noblesse française. D’après ces statuts, les chevaliers ne doivent jamais tourner le dos à l’ennemi et jurent de ne pas reculer plus de quatre pas.
Ce serment prêté lors de la première fête de l’Ordre de l’Étoile coûte la vie à de nombreux chevaliers à la bataille de Mauron en 1352.
[...] c’est ainsi qu’en 1353, dans une simple embuscade tendue en Bretagne les Anglais du parti de Montfort, nombre de chevaliers de l’Étoile se feront inutilement tuer parce que leur serment leur interdit de rompre l’engagement pour se rassembler. Friand de prouesses mais non de suicides, le chroniqueur Jean le Bel date de ce premier combat l’effondrement de l’Étoile : « Onques puis ne fut parlé de celle noble compagnie, et m’est avis qu’elle soit allée à néant, et la maison vague demeurée. Il est de fait que nul ne parle plus de l’Étoile. »
Sous le règne de Charles V (1364), cette décoration est tellement distribuée qu’elle en perd toute valeur. L’Ordre devient alors moins un ordre de chevalerie qu’une marque honorifique. — WIKIPÉDIA, « Ordre de l’Étoile (France) », sans date, Voir en ligne. —
14 août 1352. La bataille de Mauron
L’arrivée de Guy de Nesle à la tête des troupes françaises
En mars 1352, à l’initiative du nouveau roi de France, Jean II le Bon 11, une importante armée française est rassemblée et mise sous le commandement d’un capitaine général et souverain pour le pays de Bretagne
, Guy de Nesle 12 , seigneur d’Offemont, maréchal de France. S’y rallient de nombreux capitaines bretons pro-blésois dont Jean de Beaumanoir ainsi que le seigneur suzerain de Mauron, Raoul IX de Montfort-Gaël, accompagné de son fils et de ses beaux-frères, Jean Ier du Plessis, son capitaine pour Mauron, et Renaud II de Montauban (Ille-et-Vilaine), fils du châtelain du Bois-de-La Roche (Morbihan). Les troupes franco-bretonnes de Guy de Nesle, partant de Rennes et Malestroit (Morbihan), font route sur Ploërmel puis Mauron. 13
Du 15 avril au Ier mai, Gui de Nesle fut à Rennes, où se faisait la concentration de ses troupes. Son but était de débusquer les Anglais des places qu’ils tenaient autour de cette ville, comme Bécherel, Ploërmel, Fougerai [aujourd’hui Grand-Fougeray]. Le 7 mai il était devant la dernière de ces places, qu’il assiégea jusqu’à la fin de ce mois. N’ayant pu la prendre, il planta devant elle une grosse bastille bien gardée, pour attendre son retour, et achemina ses troupes vers Redon, d’où elles devaient gagner Malestroit, tandis qu’il retournait lui-même à Rennes, puis en Normandie, chercher de nouveaux renforts à même destination. Dans l’intention où il était de reprendre l’attaque contre Ploërmel, Malestroit devait être sa base d’opération. Il y était effectivement au commencement d’août (du 2 au 12).
Le commandant anglais, Gautier de Bentley, arrive à Mauron
Pendant ce temps le commandant anglais, Walter Bentley 14, forme à Brest une armée anglo-bretonne où se retrouvent des capitaines « montfortistes » dont Tanguy du Chastel, Yves de Tréziguidy et Garnier de Cadoudal. Il s’approche de Ploërmel par le nord et se dirige vers Mauron où un pont ouvre la route conduisant de Saint-Malo à Ploërmel.
En réaction Guy de Nesle s’empresse d’établir ses troupes en ce point névralgique. Le commandant des forces anglaises, Walter Bentley décrit la situation au Lord Chancelier d’Angleterre, l’évêque John Thoresby de Worcester.
Révèrent piere en Dieu, vous please savoir qe, puis mon ariver en Bretaigne, lez gentz qe maveient este ordeignez et moy, avaunt entrer en nul forteresse, avons chivachez par decea et avons taunt esploitez, loiez ent soit Dieu, qe la ville et le chastiel de Ploermelle et de Founger ount este mult bien confortez et vitaillez, et pris par assaut une bastille qavoit este fait par lez enemys devaunt Fonger. Et, ceo fait, mes compaignons et moy chevachons sur le pais sur enemys et taunt qe le marschal du Fraunce, od tut son poar du Fraunce, de Normandie, de Angou, de Maine, de Peyto, de Toraigne, de Xantoigne, et de Bretaigne, on mult graunt nombre des gentz darmes et dautres gentz sauntz nombre vindrent a lencountre de nous, pres dun ville appelle Maurone, entre Rennes et Ploermelle, sur les plaines champs, saunz boys, sannz fossez, od aultre forteresce ; et illesqes nous combatoms ovesqe eaux. 15
Parmi les diverses hypothèses concernant la localisation de la bataille, celle qui prévaut la situe aux environs de Brambily.
Selon cette hypothèse, le château de Mauron, situé à Brambily sur la rive droite du Doueff, est commandé par Jean Ier du Plessis au nom de Raoul de Montfort-Gaël. Comme la forteresse de Brambily, de modeste dimension, ne peut abriter qu’une petite garnison, Guy de Nesle investit Mauron qu’il fortifie sommairement. Appuyé sur ces positions, il installe le gros de ses forces, rassemblant cinq mille hommes, dans la prairie de l’Orme, en bas de Mauron de l’autre côté de la rivière, devant le château de Mauron.
Le maréchal français, Guy de Nesle, est confiant
Walter Bentley dispose de trois mille combattants. Guy de Nesle, avec ses cinq mille hommes, est persuadé de sa supériorité et lui envoie un parlementaire pour lui proposer un armistice conditionné par le retrait des troupes anglo-bretonnes, ce que le chef anglais refuse.
Walter Bentley choisit de ne pas entreprendre le siège des défenses fixes franco-bretonnes et dans la nuit du 13 au 14 août place ses troupes au sud de Brambily sur les hauteurs à proximité du village du Bran face aux troupes mobiles blésoises concentrées sur la rive gauche du Doueff. Il installe ses archers à l’orée d’un bois bordé de fourrés pour leur permettre de tirer tout en restant à l’abri. Ses troupes dominent la prairie de l’Orme et ses cavaliers sont déployés sur des terres sans obstacles dont la pente favorisera leurs charges.— GICQUEL, Yvonig, Le combat des Trente, Coop Breizh, 2004. [pages 129-138] —
Guy de Nesle connait une complète défaite
Le 14 août, la bataille est engagée. Face aux Anglo-Bretons, le maréchal d’Offemont dispose en bas de la prairie ses hommes en trois « batailles » qui combattent à pied. La « bataille » du centre, commandée par le maréchal d’Offemont est constituée de nobles. La « bataille » de droite est sous les ordres du maréchal breton Jean III de Beaumanoir secondé par les vainqueurs du combat des Trente (Even Charruel, Guillaume de la Marche, Renaud de Montauban, Robin de Raguenel, Jean de Tinteniac et Maurice de Tréziguidy). La gauche du dispositif est constituée par un corps de cavalerie de 140 hommes sous les ordres de Roch d’Hangest.
Grâce au tir de ses archers, Walter Bentley bloque les mouvements des troupes de Guy de Nesle. Les arbalétriers de ce dernier ont le soleil dans les yeux et ses cavaliers s’épuisent dans la montée.
Toutefois l’aile gauche franco-bretonne des cavaliers de Roch d’Hangest et de Renaud de Trie, seigneur de Mareuil, finit par renverser l’aile droite anglaise en tuant plus de 600 archers.
Le combat est terriblement meurtrier et en cet après-midi du 14 août, Guy de Nesle connait une complète défaite malgré sa résistance forcenée.
L’auteur anonyme de La Chronique normande (1369-1372) 16 donne de nombreux détails d’une bataille à laquelle il a vraisemblablement participé.
Lors alerent contre leurs ennemis et les ençontrerent prés de Mauron, et lors les Anglois descendirent à pié et se mistrent le long d’une haie, laquele ilz mistrent derriere leur dos, et mistrent leurs archiers sur leurs costez, dont ilz avoient bien VIII cens. Et Guy de Neelle, mareschal de France descendi à pié, lui et toutes ses gens, devant les Anglois, excepté le sire de Hangest que il ordonna à demourer à cheval à tout bien VII hommes d’armes pour courre seure aux archiers. En cele place ayoit grans herbes, qui greverent moult les François, qui estoient à pié, car ilz alerent courre seure aux Englois, et les Englois ne vindrent se petit non encontre eulz, et si aloient les François un petit en montant, par quoy ilz en furent plus grevez. Et toutes voies perdirent les Englois terre à l’assembler et ressortirent jusques à leur haie, mais une grant route de François, en estoit le sire de Hambuie et le sire de Beaumanoir, partirent et s’en alerent. Et lors Englois recouvrèrent, et fut la bataille très dure et ala le sire de Hangest assembler aux archiers et les desconfit, et furent bien mors plus de VI cens. Mais les Anglois, qui combatoient à pié, desconfirent le mareschal et sa route. Là fut mort le dit mareschal et le seigneur de Briquebéc, le viconte de Rohan, le seigneur de Quintin, le sire de Tintigniac et le chastellain de Beauvaiz, et tant que il y mourut vu VII bannefes et XLIIII chevaliers, et y eut bien en tout VIII cens hommes d’armes des François mors et pris, et des Anglois y eut grant foison de mors et pris. Cele journée ne vesqut gueres Gautier de Vantelay, car il y fut mout durement navrez.
Les historiens évoquent le carnage de la bataille de Mauron : près de deux mille morts, a-t-on dit, restent sur le terrain.
Selon les sources, entre 50 et 140 chevaliers franco-bretons périssent avec le maréchal Guy II de Nesle et Alain de Tinténiac, héros du Combat des Trente. Nombre d’entre eux, titulaires de l’Ordre de l’Étoile, mourront fidèles à leur serment de ne jamais reculer. Il faudra deux jours pour retrouver le cadavre du maréchal Guy de Nesle d’Offemont. — INFOBRETAGNE, « Mauron », sans date, Voir en ligne. —
L’importance du nombre des morts et des blessés cause un choc moral dans les deux partis. Bien qu’il soit d’usage de faire des prisonniers et d’éviter de tuer, car un prisonnier vaut rançon, ici la bataille s’est emballée. Des historiens ont expliqué cette tuerie par le serment des chevaliers blésois de ne pas reculer ni de se rendre.
La mort des principaux capitaines et les pertes en hommes affaiblit gravement les deux partis mais n’a pas de conséquence politique décisive.
Pendant douze années se suivent des escarmouches dispersées sur le territoire du duché, alternant avec des trêves et des transactions, notamment une proposition de partage nord et sud refusée par Jeanne de Penthièvre.
1364 — Auray. La fin de la Guerre de Succession
Les sièges de Rennes 17 et de Dinan par les anglais du duc de Lancastre, en 1356 et 1357, mobilisent peu de troupes franco-bretonnes.
Le 29 septembre 1364 à la bataille d’Auray (Morbihan) sont face à face Jean de Montfort et Charles de Blois. Charles de Blois est tué, c’est la fin de la Guerre de Succession de Bretagne. — WIKIPÉDIA, « Bataille d’Auray (1364) », sans date, Voir en ligne. —
En 1365 le traité de Guérande (Loire-Atlantique) est signé. Jean de Montfort est reconnu duc de Bretagne sous le nom de Jean IV. — WIKIPÉDIA, « Traité de Guérande (1365) », sans date, Voir en ligne. —
Pourquoi si peu de sources et d’échos ?
La littérature concernant la bataille de Mauron est pauvre et quelquefois contradictoire. La plupart des sources sont anglaises, quelques-unes françaises, aucune d’entre elles n’est écrite par un auteur breton. Voir Mauron - III.
Les nombreux auteurs qui mentionnent la bataille de Mauron citent les noms de quelques combattants anglo-bretons et ceux d’un grand nombre de combattants franco-bretons. Parmi ces derniers, certains sont difficilement identifiables. La liste des protagonistes à la bataille de Mauron fait elle aussi l’objet d’un article annexe .
Il est à noter que les auteurs anglais donnent plus de détails et de noms de combattants. La source principale provient du vainqueur de la bataille lui même, le commandant des forces anglaises Walter Bentley. — MURIMUTH, Adam, Adæ Murimuth Continuatio Chronicarum : Robertus de Avesbury de Gestis Mirabilibus Regis Edwardi Tertii, 1889, Thompson, E.M., H. M. Stationery Office, 1338, Voir en ligne. pp. 415, 416, 417 —
Les auteurs français, Johannes Cuvelier et Jehan Froissart ne consacrent que quelques lignes à cette bataille. — FROISSART, Jean et BUCHON, J.A.C., Les Chroniques de Sire Jean Froissart. Livre I, Partie II/Chapitre XII, 1835, Voir en ligne. — La Chronique normande et Guillaume de Saint-André apportent plus d’informations.— MOLINIER, Auguste et MOLINIER, Émile, Chronique normande du XIVe siècle, publiée pour la Société de l’histoire de France, Librairie Renouard, Paris, 1882, Voir en ligne. — C’est Dom Morice qui au 18e siècle mentionne le plus d’éléments concernant cette bataille. — MORICE, Dom Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne., Vol. 2, Paris, Charles Osmont, 1744, Voir en ligne. p. 312 —
L’historien Frédéric Morvan rappelle qu’à Mauron, ce n’est pas Jeanne de Penthièvre qui avait perdu mais le roi de France
. C’est en effet Philippe VI de Valois qui finance cette guerre. Est-ce une des raisons pour laquelle peu d’historiens contemporains mentionnent l’évènement. — MORVAN, Frédéric, La chevalerie bretonne au temps de Bertrand du Guesclin. 1341-1381, Vannes, ICB, 2014, 760 p., (« Histoire »). —
Est-ce que la mort du maréchal Guy de Nesle, déjà fait prisonnier à Saint-Jean d’Angély (Charente-Maritime), pousse la royauté à dissimuler le désastre et les nombreux morts ?
Cette bataille survient peu de temps après le Combat des Trente gagné par les Franco-Bretons, glorifié alors qu’il est symbolique et ne change rien à la guerre entre Blois et Montfort.
Jean-Christophe Cassard révèle que le comportement des troupes lors de la bataille entraîne ipso facto la disparition de l’Ordre de l’Étoile nouvellement créé par Jean le Bon. Est-il préférable de ne pas ébruiter l’affaire ? Il explique en partie le manque de sources par les destructions systématiques d’archives opérées dans le duché au sortir de la guerre
. — CASSARD, Jean-Christophe, La Guerre de Succession de Bretagne, Coop Breizh, 2006, 350 p.
[pp. 101-102-133 et 276] —
En effet, après 1364, le duc Jean IV cherche à freiner l’enquête en canonisation de Charles de Blois. Vanter le succès de ses alliés anglais à Mauron ne peut donner que des arguments au clan des Penthièvre, autant rester discret.
Le Centre régional de documentation pédagogique - CRDP - de Bretagne édite en 1998, Bretagne, une histoire. Les auteurs sont Louis Élégoët, professeur d’histoire, et Yves Le Gallo, agrégé d’histoire. William Marois, recteur de l’académie de Rennes, indique leur objectif en avant-propos : permettre aux jeunes de mieux connaître l’histoire de la Bretagne
— ÉLÉGOËT, Louis, Bretagne, une histoire., CDRP de Bretagne, 1998, 225 p.
[Page 72] —
Dans cet ouvrage, sous le titre La guerre de Succession de Bretagne, le Combat des Trente est signalé mais pas la bataille de Mauron.
Un lieu de bataille incertain
Aucune des sources historiques n’indique clairement le lieu de la bataille. Dans la mémoire collective, il est ancré comme étant la « prairie de l’Orme » au sud-est de Mauron.
Plusieurs questions se posent. Pourquoi la bataille a-t-elle eu lieu à Mauron ? Situé au carrefour des voies gallo-romaines Vannes-Ploërmel-Dinan et Rennes-Quimper, est-ce que Mauron est aussi important stratégiquement ? Quelle était la taille du château de Brambily aujourd’hui disparu, de Mauron, de sa population ?
La topographie autour de Mauron - une alternance de collines - permet de situer le lieu sur de multiples sites. Les historiens ont retenu cinq sites.
- En 1582, Bertrand d’Argentré mentionne le « chasteau de Bresuily ou Brebily ». Brambily est sur la commune de Saint Léry. Est-il le premier à citer le château de Brambily ? Quelle est sa source ? — ARGENTRÉ, Bertrand d’, L’Histoire de Bretagne, des roys, ducs, comtes, et princes d’icelle, Rééd. 1668, Rennes, Jean Vatar et Julien Ferré, 1582, Voir en ligne. p. 303 —
- En 1847, Cayot-Delandre 18 retient le site du Bois-de-la-Roche, sans apporter d’arguments décisifs. Le Bois-de-La-Roche est à huit kilomètres au sud-ouest de Brambily.
L’endroit où se livra la bataille n’est pas indiqué de manière précise dans l’histoire ; mais on peut supposer qu’elle eut lieu dans le voisinage du village du Bois-de-la-Roche, car on y a trouvé, il y a environ trente ans, en ouvrant un chemin, une très grande quantité d’ossemens.
- Alfred Higgins Burne, en 1955, dans The Crecy War, situe le combat au nord-ouest du château de Brambily. — BURNE, Alfred Higgins, The Crecy War, Rééd. 1999, Wordsworth Editions, 1955, Voir en ligne. pp. 237 à 247 —
- Au cours des années 1950, la famille Pellan, exploitante de la prairie de l’Orme, y a trouvé des débris d’armes ainsi que des lambeaux de vêtements dans des champs proches de la chapelle voisine. Le plan réalisé par Marcel Pellan laisse à penser qu’il situe la bataille au sud-ouest de la ferme de L’Orme, là où on remarque des talus.
- En 2011, Tom Oberhofer indique un autre lieu. Il écrit « La bataille va opposer près de Brambily ou, pour certains, sur la Lande de La Chapelle près de La Saudraie » mais finalement rejette cette dernière hypothèse. 19
Au sud du château disparu de Brambily, on constate que le centre présumé de la bataille se situe dans une cuvette marécageuse. Est-ce encore le cas en été ? Les Franco-Bretons sont à environ 60 à 65 mètres d’altitude alors que les Anglo-Bretons sont à environ 90 mètres. Cette différence de 30 mètres est un réel avantage pour les Anglo-Bretons. Le bois qui se situait derrière les troupes anglo-bretonnes n’existe plus. — Visite de terrain des encyclopédistes du 5 février 2022 —
Un monument commémoratif à Mauron
Les trois blocs de schiste du site mégalithique des Champs Morgan ont été choisis en 1974 pour servir de base au « monument commémoratif » de la bataille de Mauron (1352).
Le maire Henri Thébault (1921-1986) décide de les faire transporter dans le bourg de Mauron, faisant fi de la rumeur qui prédit la mort à ceux qui déplacent les pierres de menhir ou de dolmen. Les braves hommes qui s’attelèrent à la tâche furent victimes de ces funestes prévisions...
Les trois pierres restent sur le monument commémoratif jusqu’en 1997. La municipalité de Mauron décide alors de le remplacer par un monument contemporain conçu par le sculpteur Dominique Le Tarnec. Les pierres sont replacées sur la lande.
Des reconstitutions de la bataille
Mauron n’oublie pas ce moment fort de son histoire. À plusieurs reprises des reconstitutions ont lieu. La dernière restitution de la bataille par des enfants se déroule en 2015.
Combien de mois entre le Combat des Trente et Mauron ?
Selon le calendrier julien, si le Combat des Trente du 26 mars 1351 a lieu dans les derniers jours de 1351, alors la bataille de Mauron a lieu cinq mois après, le 14 août 1352.
Par contre, si le 26 mars 1351 est au début de l’année 1351, alors la bataille de Mauron a lieu dix-sept mois après.
Prosper Jean Levot écrit en 1857 : Deux ans après le Combat des Trente, Jean de Tinténiac est tué à la bataille de Mauron.
— LEVOT, Prosper, Biographie Bretonne, Vol. 2, Vannes, Cauderan, 1857, Voir en ligne. p. 899 —
Les autres auteurs ne mentionnent pas l’écart de temps entre le Combat des Trente et la bataille de Mauron.