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Le prieuré Sainte-Magdeleine de Bréal

Un prieuré dépendant de l’abbaye de Paimpont

Le prieuré Sainte-Magdeleine de Bréal a pour origine une léproserie attestée au 12e siècle. Elle devient un prieuré rattaché à l’abbaye Notre-Dame-de-Paimpont jusqu’en 1714.

La léproserie Sainte-Magdeleine

Selon Guillotin de Corson, le prieuré Sainte-Magdeleine de Bréal pourrait avoir été fondé au 12e siècle et avoir été précédé par une léproserie.

Fondé dans le bourg de Bréal-sous-Montfort, ce prieuré remontait aux commencements de l’abbaye de Paimpont, peut-être même était-il antérieur à l’an 1199. [...] Comme l’on ignore l’origine de la chapelle Sainte-Magdeleine, qui semble être plus ancienne que l’abbaye de Paimpont, dont elle devint un prieuré, il est possible que ce sanctuaire ait été construit par les premiers seigneurs de Bréal pour le service d’une léproserie.

GUILLOTIN DE CORSON, abbé Amédée, Pouillé Historique de l’archevêché de Rennes, Vol. 2, Rennes, Fougeray éditeur, 1891, Voir en ligne. p. 712

Cette supposition de Guillotin de Corson est confirmée par Jean-Charles Sounia et M. Trévien qui mentionnent Bréal dans leur inventaire des léproseries de Bretagne. À l’origine, la chapelle de la Magdeleine de Bréal était bien une caquinerie 1.

Les lieux dits « La Madeleine » offrent une grande présomption en faveur d’une ancienne caquinerie. En effet nous avons dit que la plupart des hameaux des lépreux étaient pourvus d’un édifice cultuel ; il fut presque toujours placé sous le patronage de sainte Marie-Magdeleine, la sœur de Lazare le ressuscité. On peut objecter qu’un groupe de fermes ordinaires peut se munir d’une chapelle, et la vouer à sainte Madeleine si c’est la mode à cette époque et dans cette région ; mais pourquoi invoquer précisément Madeleine, la patronne des lépreux, et de préférence à tout autre saint local ? Toutes ces chapelles sont d’origine médiévale, et elles sont différentes des Madeleines fondées en ville (par exemple Brest), au xve ou au xvie siècle, fondations qui s’attachaient au relèvement des filles perdues.

Un autre argument en faveur des caquineries installées à l’ombre de la chapelle Sainte-Madeleine, est le cimetière dont elle est presque toujours flanquée. Dès le xe ou xie siècle, les autorités civiles ou religieuses ont insisté pour que les fidèles soient tous ensevelis dans le cimetière jouxtant l’église paroissiale, nulle part la multiplication de nécropoles n’a été favorisée, alors que les lépreux au contraire étaient exclus du cimetière commun ; mais comme ils avaient cependant droit à une terre chrétienne, un cimetière particulier devint le complément normal de la chapelle de la caquinerie.

SOUNIA, Jean-Charles et TRÉVIEN, M., « Essai d’inventaire des léproseries en Bretagne », Annales de Bretagne, Vol. 75 / 2, 1968, p. 317-343, Voir en ligne.

Un prieuré attesté au 14e siècle

Le prieuré Sainte-Magdeleine est, selon le Marquis de Bellevüe, fondé en 1286 par les seigneurs de Montfort. Pourtant, aucun document ne vient étayer cette affirmation.—  BELLEVÜE, Xavier de, Paimpont, la forêt druidique, la forêt enchantée et les romans de la table ronde, Rennes, Simon, 1903. [page 98] —

Les plus anciennes mentions du prieuré Sainte-Magdeleine proviennent du Livre noir de Painpont et ne datent que de la fin du 14e siècle. Josselin, évêque de Saint-Malo, approuve la reconstruction de la chapelle par le chevalier Molant en faveur des chanoines réguliers de Paimpont.

1382 F14 Jocelinus eps Maclou pro prioram de Bréal 28 fev. 1382 [Jocelin évêque de Saint-Malo pour le prieuré de Bréal le 28 février 1382]

Livre noir de Painpont in ANONYME, « Recueil d’extraits de divers chartriers de Bretagne : Manuscrit Bibl. nat., fr. 22325 », Rennes, 1601, Voir en ligne. p. 421

Charte de Josselin évesque de st. Malo par laquelle il approuve comme le prieuré de la Magdeleine ayant esté ruiné du temps des guerres qui furent entre Jean de Montfort à présent Duc de Bretagne et Charles de Bloys de bonne mémoire, lesquelles ruines environ l’espace de quarante ans en telle sorte que l’abbé de Paimpont n’estant en état de pouvoir rebastir le d. prieuré qui dépendait de son abbaye, ce que voyant noble Guillaume Levesque chevalier seigneur de Molant et jeanne de Montfort son épouse donne vingt livres de rentes pour rebastir le d. prieuré à condition qu’ils soient considérés comme advenir comme les fondateurs d’iceluy de l’an 1382.

1382 Gilles Lesvesque chevalier seigneur dou Mollant […] que la grâce que luy a fait l’abbé de Paimpont de recevoir Dom Jean de Tromeneur […] dans son abbaye en qualité de chanoine dans son […] ne luy acquierre aucun droits.

Livre noir de Painpont p. 478

Le fief du prieuré Sainte-Magdeleine

Le prieuré Sainte-Magdeleine, situé dans le bourg de Bréal, ne représentait pas un bénéfice important pour les chanoines réguliers de l’abbaye de Paimpont.

Le prieuré de la Magdeleine [...] se composait seulement : de la maison priorale ; — de la chapelle de ce nom et de son cimetière, converti plus tard en jardin ; — d’un champ appelé le champ de la Voie-Joyeuse ; — d’un dîmereau s’étendant dans le trait des Galandes, en Bréal-sous-Montfort, se levant à la douzième gerbe et se partageant, par tiers, entre le prieur, le recteur de Bréal-sous-Montfort et le sieur des Courroyers ; — de deux autres petits dîmereaux, l’un en Bréal-sous-Montfort et l’autre en Goven ; — d’une juridiction seigneuriale en moyenne et basse justice, s’exerçant, avec sénéchal et procureur fiscal, en l’auditoire de Bréal-sous-Montfort ; — enfin, d’un bailliage en Bréal-sous-Montfort valant chaque année 6 livres 42 sols, 18 buces (la buce vaut environ 3 boisseaux) et 2 boisseaux d’avoine, 11 poules et deux corvées et demie pour les vendanges. En 1540, le prieur de la Magdeleine jouissait d’un autre bailliage en Mauron et d’une rente de 7 livres, due par le seigneur du Molant.

Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 713

Les génovéfains

Au cours de l’année 1649, Vincent Barleuf, prieur de l’abbaye génovéfaine de Saint-Jacques de Montfort, introduit la réforme de Sainte-Geneviève à l’abbaye de Paimpont. Cependant, la réforme n’atteint le prieuré de Sainte-Magdeleine qu’en 1666, avec la prise de possession du premier prieur génovéfain, le frère Guillaume Le Large.

Frère Guillaume Le Large, prieur de 1666 à 1714 est aussi prieur de Saint-Barthélemy-des-Bois en Paimpont depuis 1664.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —

La réformation du domaine Royal de Ploërmel du 14 avril 1679, mentionne le prieuré de la Madeleine en Bréal, à la présentation du seigneur de Molant faisant partie des bénéfices dépendant de la dite abbaye de Paimpont.—  BELLEVÜE, Xavier de, Paimpont, la forêt druidique, la forêt enchantée et les romans de la table ronde, Rennes, Simon, 1903. [page 73] — En 1680, les génovéfains afferment tous les biens de Sainte-Magdeleine pour 150 livres de rente (Déclaration du prieuré en 1680 - Archives départementales d’Ille-et-Vilaine, 1 H, 3).— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 713 —

Après 1714, les Bénéfices de Sainte-Magdeleine de Bréal ne sont plus du ressort de l’abbaye de Paimpont. Les prieurs de Bréal ne sont alors plus membres de Notre-Dame de Paimpont mais dépendent d’autres communautés génovéfaines.

Frère Anne-Jean de la Noë de Coëtpeur prend possession le 27 mars 1715 et décède en 1719. — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 — Il exerce la charge de délégué de la province de Bretagne pour les génovéfains.—  Petit, Nicolas (2008) p.216 — Frère Henri Vignon prend possession le 22 mai 1719.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., (p. 714) —Il est alors prieur de Notre-Dame de Beaulieu de Dinan. Il conserve sa charge jusqu’à sa mort en 1762.—  Petit, Nicolas (2008) p.368-369 —

En 1719, la chapellenie de Sainte-Catherine, desservie dans l’église de Bréal-sous-Montfort, était annexée au prieuré de la Magdeleine.

Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 713

L’affermage du prieuré ainsi que le régime de la commende semblent avoir eu pour conséquence l’abandon et la ruine progressive de la chapelle. En 1766, l’évêque de Saint-Malo, visitant la paroisse de Bréal-sous-Montfort, ordonne de restaurer la chapelle de la Magdeleine, alors en assez mauvais état, et d’en acquitter fidèlement les fondations de messes (Archives départementales d’Ille-et-Vilaine).— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 713 —

Frère Jean Savary est pourvu en 1775 et prend possession le 15 mai 1776.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., (p.714) —Il est alors membre de l’abbaye Notre-Dame de Beaulieu de Dinan.—  Petit, Nicolas (2008) p. 341 — Il résigne pour Frère Jean-Baptiste Piéron, chanoine régulier de Sainte-Geneviève, et dernier prieur de Bréal, demeurant à Paris, nommé par le roi le 19 décembre 1787 — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —

La fin du prieuré

Le décret du 2 novembre 1789 met les biens de l’Église, dont ceux des congrégations, à la disposition de la Nation. Le décret du 13 février 1790 interdit les vœux monastiques et supprime les ordres religieux réguliers. La communauté religieuse de l’abbaye de Paimpont n’existe plus.

Les terres et les biens de l’abbaye deviennent biens nationaux. Vingt-trois lots de bâtis et de terres, dépendant de l’abbaye, sont mis en vente nationalement par adjudication le 7 novembre 1791. Deux lots de Bréal font partie des propriétés mises en vente. — Bellevüe, Marquis de (1903) op. cit., p. 76 —

  • 1° La chapellenie de Caro en Bréal : 800 livres
  • 2° La pièce des Plantes en Bréal : 1300 livres

Sainte-Magdeleine de Bréal, sécularisée depuis la Révolution, sert à la fin du XIXème siècle de lieu de décharge et se trouve au milieu du bourg. C’est un édifice peu considérable, mais dont le mur septentrional est encore ajouré de meurtrières romanes qui attestent sa haute antiquité. On remarque aussi que le chevet droit, avec sa fenêtre à meneaux trilobés, doit être l’oeuvre du seigneur du Molant, vers la fin du XIVème siècle. Dans un four voisin, l’on a employé une pierre tombale de cette dernière époque, qui semble provenir de la chapelle.

Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 713

Les prieurs de Sainte Magdeleine

  • Frère Geffroy de Lalouaye rend aveu au duc de Bretagne le 14 septembre 1459— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Georges Malin fait de même le 23 août 1483. — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère François de la Ripvière fait une semblable déclaration le 1er juillet 1522.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Geoffroy de Témadeuc est présenté le 18 juin 1525 par le seigneur du Molant.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère François des Grées prend possession le 8 novembre 1535 et rend aveu le 17 juin 1540.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Grégoire des Grées rend aveu au roi en 1556.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère N... de Loras est pourvu le 2 février 1559.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Grégoire des Prés prend possession le 27 janvier 1582.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Raoul Houesnard est pourvu le 31 juillet 1583.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère N... Le Breton prend possession le 20 janvier 1597. — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Jacques de Saint-Jean est pourvu le 30 octobre 1610, il prend possession le 4 novembre et assiste aux synodes de 1632 et 1646. — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Jean Le Breton est pourvu le 2 décembre 1654, et prend possession le 17 février 1655.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
    À partir de 1666, les prieurs de Sainte-Magdeleine de Bréal sont des génovéfains.
  • Frère Guillaume Le Large prend possession le 22 février 1666 2— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Anne-Jean de la Noë de Coëtpeur prend possession le 27 mars 1715 ; décédé en 1719. — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Henri Vignon prend possession le 22 mai 1719. 3— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Jean Savary est pourvu en 1775 et prend possession le 15 mai 1776 ; 4.— Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —
  • Frère Jean-Baptiste Piéron, chanoine régulier de Sainte-Geneviève, demeurant à Paris, est nommé par le roi le 19 décembre 1787 5 — Guillotin de Corson, Amédée (1891) op. cit., p. 714 —

Bibliographie

ANONYME, « Recueil d’extraits de divers chartriers de Bretagne : Manuscrit Bibl. nat., fr. 22325 », Rennes, 1601, Voir en ligne.

BELLEVÜE, Xavier de, Paimpont, la forêt druidique, la forêt enchantée et les romans de la table ronde, Rennes, Simon, 1903.

GUILLOTIN DE CORSON, abbé Amédée, Pouillé Historique de l’archevêché de Rennes, Vol. 2, Rennes, Fougeray éditeur, 1891, Voir en ligne.

PETIT, Nicolas, Prosopographie génovéfaine, École Nationale des Chartes, 2008, Voir en ligne.

SOUNIA, Jean-Charles et TRÉVIEN, M., « Essai d’inventaire des léproseries en Bretagne », Annales de Bretagne, Vol. 75 / 2, 1968, p. 317-343, Voir en ligne.


↑ 1 • 

Nous désignerons sous le nom de caquineries de véritables hameaux réservés aux lépreux, hameaux qui semblent avoir été particulièrement nombreux en Bretagne. La forme complète de la caquinerie comportait, d’après Trévédy, plusieurs maisonnettes autour d’un placitre commun, une source ou un puits, une chapelle et un cimetière. Ainsi était réalisé non plus l’enfermement des lépreux, du moins leur isolement.

SOUNIA, Jean-Charles et TRÉVIEN, M., « Essai d’inventaire des léproseries en Bretagne », Annales de Bretagne, Vol. 75 / 2, 1968, p. 317-343, Voir en ligne. p. 321

↑ 2 • Selon Guillotin de Corson, Frère Guillaume Le Large décède en 1714. Nicolas Petit mentionne son décès le 19 janvier 1715 à Saint-Pierre de Rillé, à 86 ans. —  Petit, Nicolas (2008) p. 237 —

↑ 3 • Guillotin de Corson indique la date de 1775 pour la mort d’Henri Vignon. Selon Nicolas Petit il décède en 1762—  Petit, Nicolas (2008) p. 368-369 —

↑ 4 • Selon Guillotin de Corson, Jean Savary décéde en 1787. Nicolas Petit indique qu’il décéde le 19 aout 1821.—  Petit, Nicolas (2008) p. 341 —

↑ 5 • Frère Jean-Baptiste Pieron—  Petit, Nicolas (2008) p. 304 —