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1828-1907

Bellamy Félix-Charles-Marie

Auteur de l’ouvrage de référence sur la forêt de Paimpont

Félix Bellamy, érudit local ayant des racines familiales à Montfort-sur-Meu (Ille-et-Vilaine), publie en 1896 La forêt de Bréchéliant. Cette œuvre monumentale est consacrée à la littérature arthurienne et à son implantation en forêt de Paimpont. Constamment réédité depuis plus d’un siècle, son ouvrage demeure la référence sur la forêt de Paimpont-Brocéliande.

Éléments biographiques

Félix Bellamy naît à Rennes, rue Tronjolly, le 17 juin 1828. Son père, Jean-François Thébault Bellamy (1779-1844), appartient à une famille de négociants établie depuis plusieurs générations au manoir de Tréguilly en Messac (Ille-et-Vilaine). Ils font commerce de sel, tissu et toiles sur la Vilaine, entre Redon et Rennes. Sa mère, Rose Delanoë (1784-1840), est originaire du « Manoir » en Montfort, près du bois de Saint-Lazare.

Le manoir à Montfort-sur-Meu
Félix Bellamy hérite du « Manoir » à la mort de sa mère.
Inventaire général, ADAGP

Félix Bellamy est le dernier d’une famille de huit enfants. L’imagination du jeune Félix est très tôt nourrie par les légendes de Brocéliande que sa mère, monfortaise d’origine, lui conte.

Enfant, on m’en avait conté des histoires, et j’y prenais grand plaisir ; ma mère m’en avait dit et le site et le prodige [de Barenton]. Elle m’avait parlé surtout de Merlin, de son Perron, du Tombeau de l’Enchanteur, d’Éon de l’Étoile et de ses sortilèges, et aussi d’une irrésistible fée, Viviane, qui rien qu’en les regardant d’un certain air domptait les enfants rebelles, grands et petits. Aussi, j’avais peur de Viviane et de ses yeux !

BELLAMY, Félix, La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Berenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, Vol. 2, Rennes, J. Plihon & L. Hervé, 1896, Voir en ligne. p. 220

Le jeune Félix découvre la forêt de Paimpont à l’occasion de ses visites au « Manoir », chez son grand-père maternel, maître Jean Baptiste Delanoë, qui a exercé les fonctions d’échevin et de magistrat à Montfort-sur-Meu. À la mort de sa mère, il hérite du « Manoir » avec ses frères et sœur, Paul, Angèle et Antoine.

Il revient à Rennes en 1856, après avoir terminé brillamment ses études de médecine, à Paris. Il enseigne la chimie et la toxicologie à l’école préparatoire de médecine et de pharmacie du boulevard Laënnec. Attaché de laboratoire en 1858 dans le service du doyen, le Dr. Malagutti , il est nommé professeur de chimie en 1870. Il prend sa retraite en 1901.

Félix Bellamy réside au 4, boulevard de la Tour d’Auvergne avec son frère Jean-Baptiste, puis le fils de ce dernier, Albert, et Françoise Hamelin sa cuisinière. Il montre un intérêt marqué pour la musique.

Monsieur Bellamy était aussi un dilettante très épris des œuvres de maîtres, et on pouvait le voir fréquemment à la cathédrale, surtout aux grandes fêtes, retiré dans l’ombre d’un des piliers du pourtour du chœur, absorbé dans le charme si pénétrant des mélodies religieuses si remarquablement interprétées par la maîtrise métropolitaine.

TORTELIER, Henry, « Félix Bellamy », Journal de Rennes, 5 janvier, 1907.

C’est cependant sa passion pour la forêt de Brocéliande qui occupera toute sa vie. Il décède le 2 janvier 1907, boulevard de la Tour d’Auvergne. Deux rubriques nécrologiques nous donnent une idée du personnage.

Avec lui disparait une figure rennaise d’un caractère tout particulier. Toujours vêtu de noir, une ample redingote et un pantalon donnant à ses mouvements la liberté qu’il voulait et un chapeau d’une forme à lui spéciale encadrant sa tête vénérable, M. Bellamy inspirait le respect de tous.

Tortelier Henry (1907) op. cit.

La deuxième, tirée de Ouest-Éclair, complète le portrait.

Ferme d’esprit, malgré qu’il fût à la veille de ses 80 ans, on le rencontrait dans les rues marchant d’un pas alerte, les mains derrière le dos, toujours coiffé du même chapeau haut de cuve, et fredonnant dans sa barbe blanche un air quelconque.

ANONYME, « Nécrologie - Mr le Docteur Bellamy », L’Ouest-Éclair, 4 janvier, 1907, Voir en ligne.

Les obsèques ont lieu à l’église Saint-Sauveur de Rennes, et Félix Bellamy est inhumé au cimetière du Nord. Une rue, inaugurée en 1936 par le maire de Rennes François Château, porte son nom : Rue docteur Bellamy – professeur à l’école de Médecine (1828-1907).

Publications et projets scientifiques

Félix Bellamy est l’auteur de nombreuses publications scientifiques. Il consacre sa thèse de doctorat à l’hydropisie consécutive à la scarlatine, mais s’oriente rapidement vers son domaine de prédilection, la chimie des eaux.

En 1886, il invente un uréomètre pour lutter contre les troubles de la miction. —  BELLAMY, Félix, Notice pour l’uréomètre Bellamy, Paris, Fontaine, 1886, 8 p., Voir en ligne. — Il publie de nombreux mémoires dans le Journal de Pharmacie et de Chimie, ainsi que dans les Comptes rendus de l’académie des sciences. —  KERVILER, René et CHAUFFIER, Louis, Répertoire général de bio-bibliographie bretonne. Livre premier. Les bretons. BEC-BER, Vol. 5, Rééd 1979, Rennes, J. Plihon et L. Hervé, 1886, Voir en ligne. —

Voulant conjuguer ses connaissances scientifiques et son intérêt pour la Bretagne, Félix Bellamy entreprend une étude de ses principales rivières et fontaines.

Me sera-t-il permis de dire ici que l’examen de l’eau de Bérenton […] n’est point une opération isolée ; Elle fait partie d’un travail de longue haleine que j’avais autrefois entrepris sous la direction d’un de mes maîtres, et qui consistait dans l’analyse des principales rivières et des fontaines de Bretagne importantes ou remarquables à quelque titre. Un certain nombre, en effet, furent exécutées, parmi lesquelles compte celle de Bérenton, et verront peut-être le jour. Mais d’autres occupations vinrent interrompre ce labeur ingrat et fastidieux […]

BELLAMY, Félix, La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Berenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, Vol. 1, Rennes, J. Plihon & L. Hervé, 1896, Voir en ligne. pages II

C’est dans ce cadre qu’il fait paraître Analyse de l’eau de la fontaine de la place de Redon et La Fontaine de Barenton, publiées en 1868.

1868 — Félix Bellamy étudie la Fontaine de Barenton

En 1868, paraît le premier guide touristique consacré à la forêt de Paimpont-Brocéliande. —  DU BOIS DE PACÉ, Brocéliande en deux journées, Guide du touriste à la forêt de Paimpont, Rennes, Typographie Alphonse Leroy fils, 1868, Voir en ligne. —

La même année, Félix Bellamy fait paraître dans la Revue de Bretagne et de Vendée un important article consacré à la Fontaine de Barenton. Cette première contribution à l’étude de la fontaine porte déjà la marque du docteur Bellamy : un style plaisant à la lecture, un goût pour l’exhaustivité érudite, des références bibliographiques très précises. Il est le premier à analyser méthodiquement tous les textes de ses prédécesseurs concernant la fontaine, notamment La Villemarqué, et Baron du Taya. Bellamy étudie la fontaine selon plusieurs approches : historique, littéraire et scientifique. Il est aidé dans ses recherches par l’abbé Piéderrière, recteur de Saint-Léry, avec lequel il correspond au cours de l’année 1868. — Bellamy Félix (1896) op. cit., vol. 2, appendice —

Félix Bellamy à la Fontaine de Barenton
Mme Evrard (famille Bellamy)

Son argumentation rigoureuse tend à prouver l’authenticité de Barenton et à inscrire définitivement Brocéliande à Paimpont. —  BELLAMY, Félix, « La fontaine de Barenton (1) », Revue de Bretagne et de Vendée, Vol. 23, 1868, p. 89-107, Voir en ligne. — —  BELLAMY, Félix, La fontaine de Barenton, Légendes, État actuel, analyse de ses eaux, Nantes, Imp. et lib. Forest et Grimaud, 1868.> —

1896 — Publication de La forêt de Bréchéliant

Félix Bellamy a mis trente ans pour écrire son principal ouvrage sur Brocéliande. Lorsqu’en 1896 paraît La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Barenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, — Bellamy Félix (1896) op. cit., vol.2 — aucune étude importante sur Brocéliande n’avait été publiée depuis l’ouvrage de Baron du Taya en 1839. —  BARON DU TAYA, Aymé-Marie-Rodolphe, Brocéliande, ses chevaliers et quelques légendes, Rennes, Imprimerie de Vatar, 1839, Voir en ligne. —

Dans cette somme monumentale de 1400 pages, Bellamy fait œuvre d’exhaustivité sur tout ce qui concerne l’implantation des légendes dans le massif forestier de Paimpont.

[L’ouvrage] n’a point la prétention d’apporter rien qui soit nouveau et qui ne soit connu ; il n’a eu d’autre but que de rassembler en un corps ce qui se trouve disséminé dans nombre de livres, et que j’ai pu recueillir touchant Bréchéliant et ses appartenances, de rappeler les noms de divers personnages illustres autant que fabuleux qu’attirèrent autrefois ses prodiges, de consigner quelques souvenirs et quelques traditions que j’ai récoltés sur son passé, et de remémorer certains lieux non dépourvus d’intérêt que l’on vous signale alentours.

BELLAMY, Félix, La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Berenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, Vol. 1, Rennes, J. Plihon & L. Hervé, 1896, Voir en ligne. op. cit., p. I

Pour mener à bien ses recherches encyclopédiques, Bellamy utilise toutes les ressources disponibles : une bibliographie qui se veut exhaustive, l’aide des érudits locaux, les témoignages des habitants, de nombreuses excursions en forêt et des mesures scientifiques.

Bellamy inscrit son ouvrage dans le débat sur la localisation de « Brocéliande » opposant la forêt de Lorge près de Quintin à celle de Paimpont. Pour appuyer sa conviction d’une localisation paimpontaise, il se livre tout au long de son œuvre à une analyse approfondie de la littérature arthurienne et de la mythologie dont elle est issue. Wace, Chrétien de Troyes sont tour à tour cités, ainsi que tous les auteurs qui ont écrit sur ces sujets. Pour chacun d’eux, Bellamy mentionne la bibliographie complète, les restituant dans leur profondeur culturelle et historique. En outre, l’histoire locale fait l’objet d’importants chapitres concernant Éon de l’étoile, le château de Comper ou les monuments mégalithiques de la forêt.

Ses recherches s’appuient sur les travaux inédits d’érudits locaux : J.C.D. Poignand (1761-1848), l’abbé Piéderrière et l’abbé Jarno de Concoret. Bellamy est aidé dans ses investigations par son ami Ch. Lesné, ancien chef du cadastre à Rennes et géomètre à Montfort sur Meu. En ce qui concerne Quintin, il se documente auprès de Soisbault, de la Société Historique et Archéologique des Côtes du Nord et de Piriou, de l’Association bretonne de Saint-Brieuc.

On perçoit chez Bellamy une passion pour la forêt de Paimpont qui va le mener à la parcourir durant plus de trente ans. Cette passion se manifeste parfois par un parti pris excessif. Depuis son « Manoir » de Montfort, à pied, en voiture à cheval, il arpente la forêt en tous sens.

J’ai visité Barenton à plusieurs reprises […] Aujourd’hui même, la lande et les abords de la fontaine, comme aux temps jadis, sont tout à fait impraticables aux voitures ; aussi l’affluence des curieux n’est-elle pas considérable […] Sans doute, vous rencontrez çà et là des bouts de chemins où quelque ornière vous prouve que des chars sont passés avant vous. Mais quels chemins ! Autant et mieux vaudrait absence de chemins.

Bellamy Félix (1896) op. cit., vol. 2, p. 224

Bellamy peut donc témoigner de visu de l’évolution des patrimoines de la forêt. Il le fait d’une façon méthodique, qui permet encore aujourd’hui de marcher dans ses pas.

Je me détournais un peu de mon chemin pour aller jouir une fois de plus de ce site pittoresque et contempler de nouveau les ruines vénérables du Tombeau de Merlin. Je comptais d’ailleurs y revenir prochainement, accompagné de M. Gérard, artiste photographe, afin de prendre en photographie l’aspect du monument. Nous y étions déjà allés trois fois en différentes saisons […] Mais quel fut mon désappointement, quels furent mes regrets en arrivant sur le lieu, en voyant que depuis quelques mois à peine, le monument avait été ravagé de fond en comble.

Bellamy Félix (1896) op. cit., vol. 2, p. 672

Bibliographie

ANONYME, « Nécrologie - Mr le Docteur Bellamy », L’Ouest-Éclair, 4 janvier, 1907, Voir en ligne.

BARON DU TAYA, Aymé-Marie-Rodolphe, Brocéliande, ses chevaliers et quelques légendes, Rennes, Imprimerie de Vatar, 1839, Voir en ligne.

DU BOIS DE PACÉ, Brocéliande en deux journées, Guide du touriste à la forêt de Paimpont, Rennes, Typographie Alphonse Leroy fils, 1868, Voir en ligne.

KERVILER, René et CHAUFFIER, Louis, Répertoire général de bio-bibliographie bretonne. Livre premier. Les bretons. BEC-BER, Vol. 5, Rééd 1979, Rennes, J. Plihon et L. Hervé, 1886, Voir en ligne.

TORTELIER, Henry, « Félix Bellamy », Journal de Rennes, 5 janvier, 1907.

Oeuvres

BELLAMY, Félix, La fontaine de Barenton, Légendes, État actuel, analyse de ses eaux, Nantes, Imp. et lib. Forest et Grimaud, 1868.

BELLAMY, Félix, « La fontaine de Barenton (1) », Revue de Bretagne et de Vendée, Vol. 23, 1868, p. 89-107, Voir en ligne.

BELLAMY, Félix, La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Berenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, Vol. 1, Rennes, J. Plihon & L. Hervé, 1896, Voir en ligne.

BELLAMY, Félix, La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Berenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, Vol. 2, Rennes, J. Plihon & L. Hervé, 1896, Voir en ligne.