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v. 1010 - 1069

Raoul l’Anglais

À l’origine de la dynastie des Gaël-Montfort

Raoul l’Anglais est issu d’une famille apparentée aux comtes de Rennes. Pourtant il naît et passe sa jeunesse en Angleterre. En 1024, il est témoin dans plusieurs chartes en Bretagne où il apparaît comme notable. Il se marie à une bretonne dont il a un fils, Raoul, né en Bretagne. En 1042, il entre au service du nouveau roi d’Angleterre, Édouard le Confesseur près duquel il occupe un rang élevé. En 1066, il soutient activement Guillaume le Conquérant pendant la conquête de l’Angleterre et en récompense est nommé comte d’Est Anglie.

Raoul l’Anglais : un Breton né en Angleterre

Raoul l’Anglais (Radulfus Anglicus) est un Breton né en Angleterre au début du 11e siècle (vers 1000-1010). Son père fait partie des Bretons qui ont traversé la Manche bien avant la conquête normande de 1066.

Avant même la conquête de l’Angleterre par Guillaume le Bâtard, des Bretons avaient franchi la Manche pour se mettre au service du dernier roi anglo-saxon Edouard le Confesseur. Tel fut le cas de Ralph l’Ecuyer [Raoul l’Anglais].

CHÉDEVILLE, André et TONNERRE, Noël-Yves, La Bretagne féodale, XIe-XIIIe siècle, Rennes, Editions Ouest-France, 1987. [page 78]

Le nom de Raoul l’Anglais apparait sous différentes formes dans les actes des deux côtés de la Manche : Ratdulfi, Radulfus, Ralph, Raoul ou Ranulf, auxquels s’ajoutent celles de Anglicus, Angli, Anglus, Anglais.

L’historienne Katharine Keats-Rohan insiste sur l’appellation Anglicus qui est un trait distinctif très important 1.

A cette époque, l’ethnonyme anglicus signifiait que celui qui le portait était né en Angleterre, et il existe de solides preuves que tel était bien le cas.

KEATS-ROHAN, Katharine, « Raoul Anglicus et Raoul de Gaël : un réexamen des données anglaises et bretonnes », in Montfort-sur-Meu et son pays. Histoire et patrimoine., Rennes, S.H.A.B Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, 2016, p. 33-63. [page 34]

Origine paternelle

Le père de Raoul, dont on ignore le nom, est un Breton proche des comtes de Rennes. Il émigre en Angleterre dans la seconde moitié du 10e siècle.

L’hypothèse retenue par les historiens actuels est que le père de Raoul l’Anglais a suivi jusqu’en Normandie, Judith de Rennes (†1017), sœur du duc de Bretagne et comte de Rennes Geoffroi Ier (†1008), lors de son mariage avec le duc de Normandie Richard II (996-1026). Il se rend en Angleterre en 1002, au mariage d’Emma, sœur de Richard II, avec le roi d’Angleterre Æthelred II. De leur union nait Édouard, né en 1003 ou 1004, surnommé « le Confesseur » 2, quand il devient roi d’Angleterre en 1042. —  KEATS-ROHAN, Katharine, « Le rôle des Bretons dans la politique de la colonisation normande d’Angleterre (c.1042-1135) », in Published MSHAB 74, 1996, p. 181-215, Voir en ligne. [page 1]  —

Le père de Raoul l’Anglais aurait épousé une anglaise. Le Domesday Book 3 nous apprend que son frère porte le nom anglo-saxon de Godwin et qu’un membre de sa famille celui d’Ailsi.

Raoul l’Anglais et la dynastie des Gaël-Montfort

Raoul l’Anglais est à l’origine de la dynastie des seigneurs de Gaël-Montfort. Il ne faut pas confondre Raoul l’Anglais avec son fils, Raoul Ierde Gaël, considéré comme le premier seigneur de Gaël. Ce lignage prend le nom de Montfort avec Raoul Ier à la fin du 11e siècle. Il est étranger aux Montfort originaires de Montfort-l’Amaury qui règnent sur le duché de Bretagne à partir de 1365 4.

L’appellation Anglicus est un surnom qui lui est attribué dans les actes des deux côtés de la Manche.

Origine du prénom Raoul

Le prénom Raoul est extrêmement rare dans la Bretagne du 11e siècle.

[...] ce n’est qu’entre 1130 et 1160 que le prénom Raoul apparaît [...] où il occupe la neuvième et dernière place. A l’époque de Raoul l’Anglais et de sa famille, le prénom était encore considéré comme faisant partie du patrimoine familial et était donné à l’enfant en vertu de règles établies de longue date. Les aînés recevaient un prénom emprunté au lignage paternel et les cadets à celui de leur mère.

KEATS-ROHAN, Katharine (2016) op. cit., p. 36

Le prénom Raoul est un marqueur d’une lignée carolingienne des Rorgonides 5 installée dans le Poutrocoët.

D’après l’étude prosopographique de Katharine Keats-Rohan portant sur le lignage parental de Raoul l’Anglais

[...] la plus ancienne apparition connue de ce prénom dans un contexte purement breton est celle de Raoul, évêque d’Alet vers 990-1013-1026/32.

KEATS-ROHAN, Katharine (2016) op. cit., p. 41

Le père de Raoul l’Anglais, contemporain de l’évêque Raoul, appartenait à cette même grande famille alliée aux comtes de Rennes.

Le nom Raoul (d’Alet) est cité dans la notice concernant la restauration de l’ancienne abbaye de Saint-Méen et Saint-Judicaël de Gaël. Dans ce même document figurent la duchesse Havoise, ses fils le duc de Bretagne Alain III et Eudes de Penthièvre.

[…] Hinkeneus archiepiscopus Dolensis, Guarinus episcopus Redonensis, Radulphus episcopus Aletensis, Gauterius episcopus Nannetensis […]

GUILLOTEL, Hubert, GUIGON, Philippe, HENRY, Cyprien, [et al.], Les actes des ducs de Bretagne (944-1148), Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, Presses Universitaires de Rennes, 2014. [pages 219]

La mort de l’évêque est connue par une charte de fondation du couvent de femmes de Saint-Georges de Rennes vers 1026-1034. Hamon est cité pour la première fois comme évêque d’Alet.

[…] Radulfus cantor testis ; Incomaris gramaticus testis ; Radulfus Anglicus testis ; Gaufridus filius Hugonis testis ; Andulphus Scomarchi filius ; Walterius ; Mainigenius ; Garinus filius Guillermi ; Aldronicus presbiter ; Robertus Nannetensis et multi alii. […] Jungenius Dolensis archiepiscopus, G [arinus] Redonensis, Judicaelis Venetensis, Adam episcopus Sancti Brioci, Guillelmus Salomon, Orscandus et Galterius Nannetensis, Haymon Sancti Maclovii.

GUILLOTEL, Hubert, GUIGON, Philippe, HENRY, Cyprien, [et al.], Les actes des ducs de Bretagne (944-1148), Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, Presses Universitaires de Rennes, 2014. [pages 219]

Hamon succède à Raoul 6 dans l’évêché d’Alet, avant le 21 février 1034 (date de la mort de la duchesse Havoise).

On retrouve ce prénom Raoul porté par différents membres de cette famille issue des Carolingiens : Raoul de Tinténiac et Raoul de Fougères.

Raoul le Chantre, Radulphi Cantoris figure dans une charte où se trouve Raoul l’Anglais. Pour Katharine Keats-Rohan, Raoul Cantor est probablement un parent proche de l’évêque Raoul. Raoul Cantor apparaît aussi en 1032 à propos des dons faits par le duc Alain III à l’abbaye du Mont-Saint-Michel, charte où Raoul l’Anglais figure aussi comme témoin.

[...] Signum Radulphi Cantoris. S. Ratfredi Clerici. S. Gorenton. S. Oberti Clerici. S. Aldronis. S. Ratdulfi Angli. S. Gaufredi filii Hugonis. Acta vel sirmata est hujus cartæ conscriptio anno ab Incarn. Domini nostri Jesu Christi MXXXII. [...]

MORICE, Dom Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Vol. 1, Paris, Charles Osmont, 1742, Voir en ligne. col. 372-373

Parmi les Raoul cités dans les chartes en présence de Raoul l’Anglais, figure aussi Raoul le Large Radulfus Largus dont les descendants deviendront seigneurs d’Aubigné. Son nom apparait auprès de Raoul de Gaël cité comme fils de Raoul l’Anglais dans une notice en date de 1056-1057. Il s’agit d’un don d’Eudes de Bretagne 7 concernant un échange de terres consenti entre les moines de Saint-Aubin d’Angers et Foulques Nerra (†1040) 8.

Comes Eudo, uxor ejus Orguen, et filii eorum Gausfridus, Alanus, Willelmus, Rotbertus, Ricardus ; Maino episcopus, Niellus vicecomes, Rodaldus filius Constantini, Radulfus Largus, Mainbonius filius Marioni, Herveus filius Goranti, Gradelonius, Ebrardus mercator, Judicalis de Triguer, Rogerius filius Ascelini monachi, Hermandus, Lotharius filius Pringuenti, Gausfridus filius Mainonis, Radulfus filius Radulfi Englesi, Hildrocus, Anscherius filius Anauti, […] DE BROUSSILLON, Bertrand, Cartulaire de l’abbaye de Saint-Aubin d’Angers., Vol. t. 2, Angers, Germain et Grassin, 1903, Voir en ligne. p. 173

Présence de Raoul l’Anglais des deux côtés de la Manche

Raoul l’Anglais fait des séjours répétés et prolongés en Bretagne jusqu’en 1034. Nous ne savons rien de son activité entre 1034 et 1042. Plusieurs actes bretons le concernant entre 1024 et 1034 environ montrent néanmoins qu’il était de même rang que d’autres officiers publics. C’est durant ces années qu’il se marie en Bretagne avec une bretonne. Son fils ainé, Raoul de Gaël nait en Bretagne entre 1030 et 1040. L’Anglo-Saxon Chronicle mentionne que Raoul de Gaël était Breton par sa mère, alors que son père, appelé Raoul lui aussi, était Anglais et né dans le Norfolk. —  KEATS-ROHAN, Katharine (2016) op. cit., p. 34-35 et 48 —

La présence de Raoul l’Anglais dans les actes correspond aux évènements qui ont lieu en Bretagne durant cette première moitié du 11e siècle.

Les destructions des abbayes bretonnes occasionnées lors des invasions vikings du 10e siècle amènent Alain III à une restauration importante qui passe par une redistribution du patrimoine monastique. Dès le début du 11e siècle, le duc entreprend la reconstruction de nombreuses abbayes dont celles de Saint-Gildas de Rhuys, de Locminé, mais aussi de celle Gaël. Durant les décennies qui ont suivi la désertification des monastères, les nobles et les paysans se sont appropriés les nombreuses terres appartenant aux religieux.
Cette nouvelle répartition survient alors que se met en place la naissance des seigneuries qui touche aux territoires.

Gleudennus Judicaël mène la révolte des barons. Propriétaire d’un castrum à Gaël, il voit ses droits seigneuriaux sérieusement entamés par la reconstruction de l’abbaye de Saint-Méen et Saint-Judicaël de Gaël. Avec d’autres barons, il mène une guerre contre le duc durant laquelle il est tué. Ce conflit qui se termine en 1024 conduit Alain III à donner tout ou partie des biens de Gleudennus autour de Gaël — dont une partie de la forêt de Brécilien — à Raoul l’Anglais. Cette donation serait à l’origine de la seigneurie de Gaël.

Emplacement du château de Gaël. Peut-être celui du castrum de Gleudennus Judicaël ?
Extrait du cadastre de 1823

Katharine Keats-Rohan n’exclut pas la possibilité que Raoul l’Anglais ait pu être un alleutier à Gaël ou dans ses environs. En effet, une union entre Raoul l’Anglais et une femme ayant droit à l’alleu de Gaël a pu faire de lui temporairement un alleutier.

Il est possible que l’homme que distinguait son lien avec l’Angleterre ait été marié à une femme de la lignée de Gleudenn, une femme dont les parents survivants auraient permis de compenser l’absence d’abord de son mari, puis de son fils.

KEATS-ROHAN, Katharine (2016) op. cit., p. 51

En 1042, Raoul l’Anglais a rejoint Édouard le Confesseur 9, nouveau roi d’Angleterre, auprès duquel il assure des fonctions de conseiller en tant que « staller ».

[…] à mi-chemin entre celui de « sheriff » (vicomte) et de celui de comte (comes), le terme étant parfois, par la suite, traduit par celui de « constable ».

KEATS-ROHAN, Katharine (2016) op. cit., p. 51

Edouard le Confesseur meurt sans postérité en 1066. Deux prétendants au trône d’Angleterre s’affrontent : Harold Godwinsson 10 et Guillaume II de Normandie (surnommé ensuite « Guillaume le Conquérant »).

Raoul l’Anglais soutient Guillaume dans la conquête de l’Angleterre. Son fils ainé Raoul de Gaël participe aux batailles, dont celle d’Hastings. C’est seulement suite à la victoire du « Conquérant » que Raoul l’Anglais se voit nommer comte d’Est Anglie (Norfolk et Suffolk) par Guillaume le Conquérant. Dès lors, son statut change, il n’est plus qualifié Radulfus staller mais Radulfus comes vetus — Keats-Rohan, Katharine (2016) op. cit., p. 51-52 —

D’après les données du Domesday Book concernant la famille de Raoul l’Anglais, les terres attribuées à Raoul et plus tard à son fils ainé étaient tenues en vertu des fonctions officielles confiées. — Keats-Rohan, Katharine (2016) op. cit., p. 54 — Raoul de Gaël n’hérita aucune des tenures de son père dans le comté de Lincoln ou en Cornwall, — Keats-Rohan, Katharine (2016) op. cit., p. 55 —

Donation de Raoul l’Anglais et de son fils Raoul à l’abbaye de Saint-Riquier

Un seul document montre le père et le fils agissant de concert en Angleterre.

[…] c’est la confirmation d’un don fait à l’abbaye de Saint-Riquier 11, dans le Ponthieu 12, par Raoul l’Anglais avec l’accord du roi Edouard le Confesseur […] et confirmé au printemps 1068 avec l’accord de son fils Raoul et de Guillaume le Conquérant.

Katharine Keats-Rohan, (2016) op. cit., p. 34

Au 12e siècle, Hariulfe, moine de Saint-Riquier, rédige le Chronicon Centulense (Chronique de l’abbaye de Saint-Riquier). Une traduction du Chronicon, parue en 1899, nous fait part au chapitre XXIII d’une donation de plusieurs domaines anglais à l’abbaye, venant des comtes Raoul, du temps du roi Edouard le Confesseur. Il s’agit de Raoul l’Anglais et de son fils, tous deux nommés ici Raoul, non identifiés par le traducteur, le marquis Le Ver :

Edgard, [lire Edouard] roi d’Angleterre, après avoir parcouru avec bonheur la carrière de la vie accordée aux mortels, mérita la gloire éternelle. Pendant qu’il vivait encore et qu’il possédait son royaume terrestre, un noble, breton d’origine et nommé Raoul, qui jouissait d’un grand crédit et de grands honneurs auprès de lui, donna en aumône à S. Riquier, par les mains du vénérable Gervin, quelques terres et quelques revenus, dont le produit total était assez considérable.

LE VER, marquis Louis Augustin, « Chronicon Centulense », ou Chronique de l’abbaye de Saint-Riquier, Abbeville, Imprimerie Fourdrinier, 1899, Voir en ligne. p. 252

En décembre 1066, Guillaume le Conquérant s’empare de la couronne d’Angleterre, succédant ainsi au Confesseur. Dans le Chronicon, Hariulfe rapporte la présence de l’abbé Gervin à la cour du roi, venu légitimer les avoirs de Saint-Riquier en terre anglaise.

L’abbé le pria de confirmer, par un acte de son autorité, les donations que le feu roi Edgard avait faites à S. Riquier, Raoul et son fils, qui portait le même nom que son père, joignirent leurs instances à celles de Gervin, et Guillaume, se rendant aux prières de celui-ci et à celles de ses amis, fit dresser la charte suivante :
« Au nom de la sainte et indivisible Trinité, moi Guillaume (...) par l’exhortation de mes amis le comte Raoul et Raoul son fils, et du consentement de tous les grands de ma cour, je confirme, suivant le droit qui appartient au roi, toutes les donations faites par ledit comte et son fils, au profit des frères de S. Riquier ; et j’ai jugé bon de désigner, dans ce présent écrit, les églises et les maisons cédées par lesdits donateurs, afin que tout le monde puisse les connaître. Telle est la terre de S. Riquier, située en Angleterre et donnée audit saint par le comte Raoul [...] »

Une liste détaillée énumère les biens possédés par l’abbaye 13. Dans son Histoire de l’abbaye et de la ville de Saint-Riquier, l’abbé Hénocque explique que

Le monastère a joui de ces domaines jusqu’à la guerre de Cent ans, où toutes les relations entre l’Angleterre et la France furent interrompues et les biens monastiques confisqués, sans qu’il ne fût jamais possible de les recouvrer.

HÉNOCQUE, Jules, Histoire de l’abbaye et de la ville de Saint-Riquier, Vol. 1, Amiens, 1880, Voir en ligne. p. 356

Raoul l’Anglais meurt en 1069. On lui connaît deux fils : Raoul I de Gaël, seigneur de Gaël et Harduin dont l’histoire n’a rien retenu. Raoul hérite des biens de son père en Bretagne et se voit attribuer des fonctions administratives en Angleterre.


Bibliographie

DE BROUSSILLON, Bertrand, Cartulaire de l’abbaye de Saint-Aubin d’Angers., Vol. t. 2, Angers, Germain et Grassin, 1903, Voir en ligne.

CHÉDEVILLE, André et TONNERRE, Noël-Yves, La Bretagne féodale, XIe-XIIIe siècle, Rennes, Editions Ouest-France, 1987.

GUILLOTEL, Hubert, GUIGON, Philippe, HENRY, Cyprien, [et al.], Les actes des ducs de Bretagne (944-1148), Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, Presses Universitaires de Rennes, 2014.

HÉNOCQUE, Jules, Histoire de l’abbaye et de la ville de Saint-Riquier, Vol. 1, Amiens, 1880, Voir en ligne.

KEATS-ROHAN, Katharine, « Raoul Anglicus et Raoul de Gaël : un réexamen des données anglaises et bretonnes », in Montfort-sur-Meu et son pays. Histoire et patrimoine., Rennes, S.H.A.B Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, 2016, p. 33-63.

KEATS-ROHAN, Katharine, « Le rôle des Bretons dans la politique de la colonisation normande d’Angleterre (c.1042-1135) », in Published MSHAB 74, 1996, p. 181-215, Voir en ligne.

LE VER, marquis Louis Augustin, « Chronicon Centulense », ou Chronique de l’abbaye de Saint-Riquier, Abbeville, Imprimerie Fourdrinier, 1899, Voir en ligne.


↑ 1 • Les historiens le nomment aussi Ralph l’Écuyer. Par souci de justesse vis-à-vis des actes qui en témoignent, nous suivons Katharine Keats-Rohan en ne citant qu’un seul nom : celui de Raoul l’Anglais qui fait référence à Radulfus Anglicus.

↑ 2 • Édouard le Confesseur est un prince de la maison de Wessex, né vers 1004 et mort le 5 janvier 1066. Fils du roi Æthelred le Malavisé, il règne sur le royaume d’Angleterre de 1042 à sa mort. Sa succession contestée est à l’origine de la conquête normande de l’Angleterre par Guillaume le Conquérant quelques mois après sa mort.

↑ 3 • Le Domesday Book rédigé vers 1086-1087, est le fruit d’une enquête, ordonnée par Guillaume le Conquérant, sur les avoirs des propriétaires fonciers de chaque comté du royaume d’Angleterre. Cette compilation rédigée vers 1086-1087 est une première dans l’histoire médiévale.

↑ 4 • Arthur II succède à Jean II au duché de Bretagne de 1305 à 1312. Arthur II se marie à deux reprises. Avec sa première épouse, Marie de Limoges, il a trois enfants dont l’ainé, Jean III. Avec la seconde, Yolande de Dreux, comtesse de Montfort-l’Amaury, il a six autres enfants dont l’aîné, Jean de Montfort. Jean III prend la succession d’Arthur II. À sa mort en 1341, Jean III ne laisse pas de postérité et ne désigne pas de successeur. Deux prétendants revendiquent l’héritage du duché : sa nièce, Jeanne de Penthièvre mariée à Charles de Blois, neveu du roi Philippe VI et Jean, le fils de Yolande de Dreux qui est comte de Montfort-l’Amaury. Cette situation entraine une guerre de succession qui dure jusqu’en septembre 1364, au terme de laquelle le traité de Guérande avril 1365 reconnait Jean IV de Montfort, fils de Jean de Montfort († 1345) et de Jeanne de Flandre, comme duc de Bretagne.

↑ 5 • Les Rorgonides sont une famille de la noblesse franque dont plusieurs membres se prénommèrent Rorgon (ou Roricon).

↑ 6 • Une approche familiale de Hamon est possible avec Roiantelina, vicomtesse de Dol, mère de Rivallon qui fit don de l’important prieuré de La Chapelle-Janson à l’abbaye Saint-Georges de Rennes. Un autre des prieurés de Saint-Georges était Tinténiac donc le premier seigneur fut Donoal, dont le fils (?) Raoul apparait avec Rivallon de Dol. —  KEATS-ROHAN, Katharine (2016) op. cit., p. 40 —

↑ 7 • Eudon (Eon) de Bretagne (†1079) est le frère d’Alain III, comte de Penthièvre. À la mort de son frère, il gouverne la Bretagne durant la minorité de son neveu Conan II, de 1040 à 1047.

↑ 8 • Les noms concernant notre propos apparaissent en gras.

↑ 9 • En 1002, Emma, sœur du duc Richard II de Normandie, est mariée au roi anglo-saxon Ethelred II (Æthelred II the Unready) qui meurt en 1016. Leur fils ainé, Edouard, doit prendre la succession mais le Danois Knud Ier s’empare du pouvoir, cumulant ainsi les royaumes : celui d’Angleterre en 1016, du Danemark en 1018 et de Norvège en 1028. Emma veuve, se voit contrainte d’épouser Knud Ier qui meurt en 1035. Harold Ier Harefoot, fils d’un premier mariage de Knud Ier devient roi jusqu’en 1040, puis Hardeknud, fils d’Emma qui meurt en 1042. Durant ce temps, Edouard vit son exil en Normandie, sous la protection de son oncle, le duc Richard II, époux de Judith de Rennes, fille du duc de Bretagne Conan 1er.

↑ 10 • Lorsqu’il prend la couronne en 1042, Édouard se trouve face à une puissante et riche famille ennemie du nom de Godwin. Elle contrôle l’imposant comté de Wessex et a une forte emprise sur la majorité de la haute aristocratie anglo-Saxonne. Harold II, le fils de Godwin, s’empare de la couronne d’Angleterre à la mort du Confesseur. Il se heurte à Guillaume de Normandie qui lève une grande armée sur le continent. Une bataille a lieu à Hastings en 1066, au terme de laquelle Guillaume le Conquérant coiffe la couronne d’Angleterre le 25 décembre 1066.

↑ 11 • À la naissance de cette abbaye : au 7e siècle, le jeune Riquier fut initié par le moine irlandais Cadoc, disciple de saint Colomban. Il donne son nom à la ville de Centule devenue Saint-Riquier (Somme) sous le règne du roi mérovingien Clotaire II.

↑ 12 • Le Ponthieu est le nom d’un ancien comté français, dont la capitale était Abbeville.

↑ 13 • 

[…] le village connu sous le nom d’Esperlais, et qui compte 37 hostes, qui paient tous les ans, à la Nativité de notre Seigneur, chacun deux chevaux chargés de brais (malt), et qui doivent à leur seigneur trois jours de travail par semaine, à compter de la fête de S. Jean-Baptiste jusqu’à celle de S. Michel, et un jour seulement par semaine dans les autres saisons de l’année, pour tous les ouvrages qu’on leur commande ; il y a là 6 charrues, un bon bois, des terres labourables et incultes et des prés produisant toute espèce ; un autre village nommé Acra où sont deux hostes, 3 moulins rapportant 35 ores d’argent, sans compter que les hommes dudit village doivent moissonner trois jours par semaine pour leur seigneur, et que toutes leurs charrues doivent, également trois jours par semaine, labourer, pour semer ses blés et ses avoines ; un troisième village nommé Culesturpon, qui rapporte 5 ores d’argent, et dont les charrues doivent au seigneur trois jours par semaine, pour semer ses blés et ses avoines ; deux autres villages nommés Achoutes et Apichence, dont les charrues doivent au seigneur le même service que celles des villages précédents ; un sixième village connu sous le nom de Merefort, dont 8 charrues font, deux jours par semaines, le labour des blés et des avoines du seigneur, et dont 25 hommes moissonnent, au mois d’août, deux jours par semaine, pour le seigneur ; un autre village nommé par les gens du pays Assuafe, qui paie la dîme des blés et des autres récoltes ; enfin un autre village, connu sous le nom de Guenite, qui possède un moulin et un bois et un étang excellent. Toutes lesquelles possessions je confirme audit S. Riquier, afin qu’aucun tyran ne puisse les envahir ; et afin que cette charte soit stable et permanente pendant les siècles à venir, je l’ai munie de mon autorité royale.