1884
Le sanctuaire de la Grotte de Paimpont
Le sanctuaire de la Grotte de Paimpont est construit en 1884 à proximité de l’ancienne fontaine « Notre-Dame-des-Chesnes ».
1567-1884 — Le lieu avant la construction de la Grotte
1567 — Les terres de la Cheyne
La plus ancienne mention du terrain sur lequel la Grotte est bâtie date de 1567. Les parcs et terres
de la Cheyne
sont alors propriétés de l’abbaye Notre-Dame de Paimpont.
Deux aultres parcs de terres s’entre joignans appellez la Cheyne scys entre l’estange de la dite abbaye et les landes appellées les Landes de Paimpont.
La fontaine Notre-Dame-des-Chesnes
Une fontaine située sur ces terres est dénommée « Notre-Dame-des-Chesnes » ou « de la Cheyne ». Elle est attestée comme une étape rituelle du pèlerinage de Pentecôte de Notre-Dame-de-Paimpont durant l’Ancien Régime.
Le complément obligé du pèlerinage a été de temps immémorial, un pieux voyage à la fontaine de la Vierge, dont l’eau a toujours passé pour avoir une vertu curative extraordinaire.
1792 — La vente des biens de l’abbaye
La Révolution met fin à plusieurs siècles d’existence de la communauté religieuse de l’abbaye Notre-Dame-de-Paimpont ainsi qu’au pèlerinage annuel de Pentecôte.
- Le décret du 2 novembre 1789 met les biens de l’Église, dont ceux des congrégations, à la disposition de la Nation.
- Le décret du 13 février 1790 interdit les vœux monastiques et supprime les ordres religieux réguliers.
Le 7 novembre 1791, la municipalité nouvellement créée met en vente les terres et les biens dépendant de l’abbaye. Les vingt-trois lots n’ayant pas trouvé preneur, ils sont définitivement vendus le 30 mai 1792, par adjudication du tribunal de Montfort. — BELLEVÜE, Xavier de, Paimpont, Rééd. 1980, Marseille, Lafitte Reprints, 1912. [page 76] —
Les terres dites du « Pré-des-Carrés » - sur lesquelles se trouve la « fontaine Notre-dame des Chesnes » - sont achetées par Madame veuve Fleury, de Plélan.
1870 — Procession à la fontaine
Il faut attendre 1870 pour voir une procession prendre le chemin de l’ancienne fontaine des Chesnes devenue fontaine de la Vierge 1.
M. L’abbé Joly […] y conduisit processionnellement la paroisse, afin d’implorer le secours tout-puissant de la très Sainte Vierge sur les jeunes gens de la localité qui couraient les plus grands périls dans la guerre Franco-Allemande.
1884 — Le renouveau du pèlerinage
François Sauvé, recteur de Paimpont nommé en mars 1883, entreprend de relancer l’ancien pèlerinage de Notre-Dame de Paimpont interrompu depuis la Révolution.
A mon arrivée à Paimpont, (mars 1883) la pensée de travailler à faire revivre l’ancien pèlerinage de Notre-Dame-de-Paimpont prit aussitôt le dessus sur toutes les autres préoccupations du moment. J’en fis part à mes aimables et zélés confrères qui se demandaient comme moi si ce désert ne retrouverait pas un jour la vie ; si cette solitude n’était pas destinée à refleurir, si ces sentiers couverts d’ajoncs et de bruyères ne reverraient plus jamais les longues files de pèlerins du temps passé, les antiques et célèbres processions du moyen-âge, en un mot, si ce lieu tant aimé et fréquenté des âges précédents, témoin de la manifestation éclatante de foi et de la piété de nos aïeux, le rendez-vous journalier des malades, des infirmes, des âmes en peine, ne reconquiérerait pas bientôt sa sainteté et sa gloire. Et nous prierons tous de notre mieux Notre-Dame-de-Paimpont d’exaucer nos pieux désirs.
Le 11 mars 1884, mademoiselle Marie Fleury, récente héritière du bien, fait donation à la paroisse d’un hectare du Pré-des-Carrés, parcelle sur laquelle se trouve la fontaine de la Vierge ainsi que de l’allée qui y conduit.
Le dimanche premier juin 1884, jour de Pentecôte, le pèlerinage reprend. Les paroissiens ont pour l’occasion réalisé une grotte en papier-rocher dans la lignée des nombreuses répliques de la grotte de Lourdes construites à cette époque. L’abbé Evenot, curé-doyen de Mauron et prédicateur, inaugure le nouveau monument en donnant à la foule nombreuse de fidèles une éloquente et onctueuse instruction de circonstance.
— Gervy, Abbé Louis (1907) op. cit., vol. XXXVII, p. 367 —
La sainte demandait un monument en ce lieu. Le plan fut trouvé au livre du Cantique des Cantiques. Quasi platanus exaltata sum juxta aquam in plateis. Les matériaux seront trouvés là où on ne les supposait guère, dans les ravins avoisinant l’étang du Pas du Houx, ensevelis sous terre depuis des siècles. Une grotte offrant une certaine imitation de celle de Lourdes est décidée. Elle sera en scories de fer. M. Pariche, célèbre rocailleur de Nantes, émerveillé de la beauté comme de l’originalité de ces matériaux tout nouveaux pour lui commence en juillet 1884. L’œuvre est achevée fin septembre. Les blocs de scories, liés ensemble par un ciment de Vassy, simulent on ne peut mieux la forme d’un rocher naturel.
En juillet 1884, les Paimpontais se mettent à la tâche durant plusieurs semaines, un village succédant à l’autre, pour aménager le terrain marécageux et amener des scories de minerai de fer dans le but de constituer une grotte.
Ces matériaux, disposés avec art, forment une grotte monumentale qui par l’élégance de sa forme et la solidité de sa structure fera l’admiration de nos descendants.
Le dimanche 24 septembre 1884, lors de la bénédiction, plus de 6000 personnes assistent à l’arrivée d’une statue de Notre-Dame, portée par 24 jeunes gens sur un trône splendidement décoré
. La statue, œuvre du sculpteur Bouthéry, est placée solennellement dans une niche surmontant la grotte. — Gervy, Abbé Louis (1907) op. cit., vol. XXXVII, p. 370 —
Les miracles de Notre-Dame de Paimpont
Les institutions catholiques de la fin du 19e siècle se font le relais des miracles et guérisons miraculeuses à mettre au profit de Notre-Dame de Paimpont.
[...] les pèlerins avaient coutume de s’y laver en se rendant à l’abbaye, et ses eaux ont conservé la réputation d’être miraculeuse, car d’après le registre paroissial de Paimpont, un grand nombre de miracles se sont opérés et s’opèrent encore par l’intercession de Notre-Dame de Paimpont.
Le miracle de la fondation de la fontaine
Pour accompagner le renouveau du pèlerinage, une fondation miraculeuse de la fontaine est inventée. La légende chrétienne est représentée sur un des vitraux du chœur de l’église abbatiale de Paimpont, daté de 1899. On y voit la Sainte Vierge apparaître à Judicaël, en présence de bergers. Elle lui désigne un lieu d’où, d’un coup de bâton, le roi fait jaillir une source miraculeuse appelée dès lors fontaine de Notre-Dame-de-Paimpont.
1884-1885 — L’épidémie de variole
En 1884-1885, une importante épidémie de variole sévit dans la région de Paimpont. Pour la conjurer, les paroissiens venus de tous les villages se rendent à la Grotte en une longue procession, le 1er dimanche de mars 1885.
A partir de ce jour, il n’y eut aucun nouveau cas de la terrible maladie, et tous ceux qui étaient déjà atteints, même ceux dont on désespérait, se rétablirent en quelques jours.
Selon l’abbé Gervy, durant cette même épidémie, l’intercession de la Vierge est aussi à l’origine de la guérison miraculeuse d’une jeune fille.
La veille de la Pentecôte, jour de la bénédiction de la grotte, une petite fille de sept ans n’avait plus que quelques heures à vivre, d’après la déclaration des médecins. On invoqua Notre-Dame de Paimpont, et le lendemain la petite malade était guérie.
1891 — Un miracle rapporté par l’abbé Gervy
En 1891, un jeune homme de Paimpont, ouvrier à Saint-Servan, fut atteint d’une bronchite tellement grave que le médecin le déclara perdu. Il fut recommandé à Notre-Dame de Paimpont et on promit une messe d’actions de grâce s’il guérissait. Le jeune homme recouvra la santé au grand étonnement du médecin.
1906 — Un miracle rapporté par Marie Chevallier
En 1906, Marie Chevallier mentionne un autre miracle de la Vierge daté de la fin du 19e siècle.
La Vierge de la grotte. — Le 15 septembre, on va à la grotte située en forêt, en procession, portant sur un brancard la sainte Vierge ; on s’adresse à cette Vierge dans tous les ennuis de la vie. Ainsi par exemple : il y a vingt ans une petite fille, allant avec sa grand-mère couper de la litière en forêt, s’égara en cueillant des lucets. Elle y resta trois semaines, et l’on croyait l’enfant dévorée par les bêtes ; les parents promirent un voyage à Notre-Dame de Paimpont ; un nommé Pattier, quelque temps après, en coupant de la litière, retrouva la petite devenue sauvage, s’enfonçant dans une broussaille. On la ramena de force à ses parents, qui attribuèrent ce miracle à la Vierge de Paimpont.
1932 — Un dimanche de Pentecôte à Paimpont
Charles Le Goffic a donné une description de la procession de Pentecôte à laquelle il a assisté vers 1930.
J’ai suivi, par un pluvieux dimanche de Pentecôte, la procession annuelle en l’honneur de Notre-Dame-de-Paimpont. Elle se rendait à la grotte. La pluie n’empêchait pas l’affluence ni les cantiques. Je ne sais si la Vierge est ici une aussi puissante guérisseuse qu’à Rumengol en Cornouailles, où elle est appelée « Notre-Dame de tout remède ». Mais des femmes buvaient l’eau de la fontaine. Des pièces de monnaie, des billets même, tombaient avec assez d’abondance dans une caisse posée sur le sol, derrière la grille. Ce n’était pas le pittoresque des « pardons » bas-bretons : pas de coiffes, ou si peu ! pas de feutre à rubans et à boucle, pas de mendiants, pas d’éclopés et d’aveugles tendant leur sébile, lamentant leur complainte. Mais c’était la même foi, avec plus de gravité et d’ordre...