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Éon de l’Étoile en Brécilien

Des écrits du 19e siècle sur Éon de l’Étoile

La présence d’un ermite nommé Éon de l’Étoile en forêt de Brécilien en 1145 est attestée par les chroniqueurs rapporteurs de son procès au concile de Reims.

Cette présence pourrait être rapprochée d’un manuscrit, écrit entre 1791 et 1800, auquel il a été donné le titre de « Registre de Concoret », dans lequel l’abbé Pierre-Paul Guillotin rapporte des faits relatifs à Éon de l’Étoile.

En 1145, le Chronicon Britannicum 1 témoigne qu’un dénommé Eudes (Éon) s’en prend aux ermites en forêt de Brécilien dans le diocèse d’Alet. En 1148, Éon de l’Étoile est condamné devant le concile de Reims, par le pape Eugène III, à finir ses jours en prison.

Au 19e siècle, à Concoret, village au nord de la forêt de Paimpont, l’abbé Guillotin cite cet Éon de l’Étoile, personnage qu’il rattache à une histoire locale se déroulant vers 1140.

Nous faisons le distinguo entre les faits officiels des textes contemporains d’Éon et les écrits du 19e siècle qui situent le personnage dans un récit constitutif de la tradition locale.

Éon de l’Étoile dans un récit de l’abbé Guillotin

C’est durant la période révolutionnaire que quelques auteurs vont évoquer l’histoire d’Éon de l’Étoile en forêt de Brécilien (aujourd’hui forêt de Paimpont). L’abbé Guillotin et le chanoine Mahé en sont les principaux rapporteurs.

Entre 1791 et 1800, l’abbé Pierre-Paul Guillotin (1750-1814) rédige un manuscrit sans titre où il reporte ses mémoires, document dénommé par la suite « Registre de Concoret ». Ce prêtre réfractaire a, durant ces neuf années, transcrit jour après jour les événements qui ont eu lieu à Concoret et sa région. Il relate également des épisodes antérieurs ayant marqué l’histoire des Concorétois : c’est ainsi qu’il raconte un fait qui se serait déroulé au 12e siècle dans le nord de la forêt de Brécilien. Les personnages sont d’une part, le seigneur de Montfort-Gaël et son châtelain de Belanton (Barenton), et d’autre part, une communauté d’ermites parmi lesquels Éon de l’Étoile. L’abbé Guillotin semble parfaitement informé des faits malgré les six siècles écoulés. Une lacune, cependant, l’abbé ne cite pas ses sources, ce qui décrédibilise son récit que voici.

Vers 1140 Guillaume, sire de Montfort 2, fit bâtir la maison du Rox pour loger son châtelain de Belanton qu’il trouvait dans un lieu trop isolé et trop exposé au brigandage. Il avait en même temps le projet de transférer à Belanton les religieux dont les possessions convenaient beaucoup à ses plans, et surtout à ceux de ses agents.

Jean de Châtillon 3, évêque d’Aleth, étant venu à Montfort et dans les environs faire des visites épiscopales, le plan lui fut communiqué par le Duc et il l’approuva soit par condescendance pour l’autorité temporelle, soit parce que la situation de Belanton était fort convenable à des ermites. [...]

Les moines furent très mécontents de perdre leur position des Croix-Richeux et d’être transférés à Belanton. Ce lieu est à la vérité dans un bon air avec une belle perspective, mais situé au coin d’une vaste forêt et au bord d’une grande lande éloignée de bourgs et de villages. Les ermites firent éclater leurs plaintes contre tous ceux qui avaient été la cause de leur changement.

Un d’entre eux, nommé Éon de l’Étoile, issu d’une famille noble du pays de Loudéac et qui à cette époque était prieur de la maison, en fut tellement affecté qu’il tomba dans des égarements d’esprit. Il se mit à débiter des extravagances ; il en fut jusqu’à se dire le fils de Dieu et le juge des vivants et des morts, par une grossière allusion de son nom de « père Éon » avec les mots du Rituel : « per eum qui venturus est judicare vivos et mortuos » 4.

Le châtelain du Rox et autres contre lesquels il déclamait souvent, le dénoncèrent au Duc et à l’évêque d’Aleth comme hérétique et sorcier. L’évêque d’Aleth se vit obligé de supprimer la communauté de Belanton ainsi qu’il en est rapporté dans le Sanctoral Romain Malouin page 96.

GUILLOTIN, abbé Pierre-Paul, « Registre de l’abbé Guillotin », Concoret, 1791, Voir en ligne.

Les faits rapportés dans cet épisode nécessitent quelques remarques.

  • Rien ne confirme l’existence d’un Château à Barenton au 12e siècle et aucun document, hormis des récits tardifs et imprécis, ne mentionne l’existence d’un châtelain à cet endroit.
  • Par ailleurs, si le château du Rox existe aujourd’hui, rien ne prouve qu’il existait déjà au 12e siècle, comme l’affirme l’abbé Guillotin. Quant à la communauté d’ermites, la toponymie révélée par l’abbé Guillotin peut laisser penser qu’elle aurait existé en un lieudit appelé « Croix-Richeux », aujourd’hui disparu.
  • S’il est confirmé qu’Éon de l’Étoile a bien existé et que des écrits témoignent de sa présence en forêt de Brécilien, il n’est pas possible de faire un lien avec la narration de l’abbé Guillotin issue de la tradition locale.
  • L’abbé Guillotin prend pour preuve le Sanctoral Romain Malouin, mais contrairement à ses dires, il n’y est pas question de la communauté de Belanton. On y trouve seulement un court passage dans lequel l’évêque chasse de son diocèse des hérétiques rassemblés en forêt de Paimpont, qui avaient commis des violences contre la haute classe ecclésiastique. Le nom d’Éon n’y est jamais cité 5.

Éon dernier des druides selon Poignand

D’après Jean Côme Damien Poignand, juge à Montfort-sur-Meu, la forêt de Brécilien est un lieu où les traditions druidiques se seraient perpétuées jusqu’au règne de Judicaël au 7e siècle. Toujours selon lui, la religion des druides aurait connu deux résurgences, l’une au 9e siècle avec le roi Salomon, qui y aurait été initié avant de devenir chrétien, l’autre avec Éon de l’Étoile dont il fait le dernier druide de Brécilien.

C’était donc vraisemblablement les restes épars des anciens sectateurs du druidisme, qu’avait cherché à rallier Éon de l’Étoile dans les environs de la forêt de Brécilien. [...] Cette forêt de Brécilien a été mal à propos supposée être la forêt de Lorges, proche Loudéac, parce qu’Éon de l’Étoile se trouvait natif de Loudéac ; mais ce n’est pas ordinairement dans son propre pays que l’on peut devenir prophète. Celui-ci essaya de l’être où l’avait été Merlin, où il passait pour reposer avec son épouse sous des aubépines , où était son perron fameux, ainsi que la miraculeuse fontaine de Barenton, en haute forêt, proche la commune de Concoret, dont les habitans ont toujours conservé le sobriquet de sorciers de Concoret, à cause de cela, et où l’on dit aussi en proverbe que les saints de Concoret ne datent de rien, parce que la plupart des malades ont été pendant long-tems de préférence porter en secret leurs pèlerinages à cette fontaine, et à d’autres monumens du druidisme dans la forêt.

POIGNAND, Jean Côme Damien, Antiquités historiques et monumentales de Montfort à Corseul par Dinan et au retour par Jugon, Rennes, Duchesne, 1820, Voir en ligne. p. 89

Historiens, poètes, folkloristes, littérateurs, du début du 19e siècle explorent la forêt, animés par une même passion pour la quête des origines celtiques. Cet extrait de Poignand, précurseur dans l’invention d’une mythologie druidique spécifique à la forêt de Paimpont, porte l’empreinte du néodruidisme. La théorie fantaisiste selon laquelle le culte druidique aurait perduré jusqu’à l’époque d’Éon de l’Étoile sera reprise par de nombreux auteurs.

Les confusions du chanoine Mahé

Éon, magicien ou sorcier de Brécilien

Le chanoine Joseph Mahé (1760-1831), abbé réfractaire lui aussi, est un des fondateurs de la Société polymathique du Morbihan en 1826. Pour lui, comme pour la plupart des érudits du 19e siècle, il est admis que la Bretagne était autrefois recouverte d’une grande forêt centrale nommée Brécilien. Il n’est donc pas étonnant que Loudéac et Concoret en fissent partie.

Eudon naquit d’une famille noble dans les environs de la forêt de Loudéac, ou plus précisément dans la paroisse de Concoret, où une rue porte encore son nom ; car alors la forêt de Loudéac s’étendoit plus qu’aujourd’hui et faisoit partie de la forêt de Brécilien dont l’étendue n’étoit pas petite. Il fut hermite dans la forêt de Brécilien […]

MAHÉ, chanoine Joseph, Essai sur les antiquités du département du Morbihan, Vannes, Galles aîné, 1825, Voir en ligne. p. 422

La rue dont il est question ici est La Rue Éon, un hameau situé à l’ouest de Concoret, entre le bourg et la fontaine de Barenton, à proximité du château du Rox. Il s’agit de deux maisons contiguës dont celle de gauche serait la « Maison Éon », nom qui est reporté sur le cadastre. Les gens de Concoret ont cru en la présence d’Éon en ce lieu, comme en témoigne un acte de vente sous signatures privées, daté d’octobre 1885 où elle est désignée « Maison de l’Étoile ».

Le logis dans lequel il aurait vécu consiste en une grande pièce unique d’habitation au rez-de-chaussée, seulement éclairée par une fenêtre garnie de trois barreaux de fer. Au-dessus est un grenier où le jour pénètre par une lucarne ayant deux barreaux de fer ; à droite de cette maison, une autre à peu près semblable. Ces deux maisons sont construites en pierres de schiste pourpré.

Nous ignorons si ce sont les écrits des érudits qui ont contribué à officialiser ce lieu ou si cette croyance est plus ancienne. Il est impossible de dire s’il y avait des maisons à cet endroit au 12e siècle. Quant à prouver le lieu de naissance d’une personne à cette époque, la possibilité en est extrêmement faible.

Le chanoine Mahé s’appuie sur la tradition locale qui témoignerait d’un lieu où se retrouvait Éon de l’Étoile pour y opérer sa magie.

Tandis que cet homme [Éon] extraordinaire était cantonné dans la forêt de Brécilien, il conduisoit nuitamment les sectateurs qu’il avoit à Concoret près de la Fontaine de Baranton pour y célébrer avec eux ses orgies, et comme il passait pour magicien, et que d’ailleurs ces assemblées nocturnes ressembloient au sabat, les habitans de Concoret reçurent le nom de sorciers, qu’ils ont porté jusqu’à ce jour et qu’ils porteront encore long-temps 6.

Mahé Joseph (1825) op. cit., p. 425

Pour expliquer ce pouvoir magique, le chanoine n’hésite pas à faire entrer Éon dans l’univers propre à « Brocéliande ». Il cite Merlin et Morgane ainsi que les lieux légendaires de la forêt dans lesquels ils ont accompli leur magie. Il entretient une correspondance avec Blanchard de la Musse, l’inventeur du Val sans retour en forêt de Paimpont.

Le chanoine Mahé va plus loin en faisant l’amalgame avec d’antiques forêts qu’il compare à celle de Brocéliande. La magie qu’il dépeint ici est beaucoup plus sombre, plus proche d’une magie évocatrice que d’une sorcellerie démoniaque.

Le poëte commence par décrire une forêt voisine du palais d’Atrée, et toute semblable à celles des Druides. On n’y voyoit, dit-il, aucun de ces arbres qui réjouissent la vue ou qu’on a coutume de cultiver […] Dans un réduit ombragé couloit lentement une triste fontaine, joignant un marais, dont les eaux noires et croupissantes ressembloient à celles du Styx […] La nuit on y entendait gémir des divinités funestes […] On y recevoit d’un dieu, et avec grand bruit, des oracles certains […]

Pour la comparaison, le chanoine Mahé choisit un extrait des romans de la Table ronde de Creuzé de Lesser, un romancier français contemporain.

Comparez la description de cette effrayante forêt avec celle que les vieux romanciers font de la forêt de Brocéliande, aujourd’hui de Paimpont, et vous serez surpris de leur conformité. Dans l’une et l’autre forêt couloit une fontaine, dans l’une et l’autre on entendoit la nuit des gémissements et des mugissements affreux ; tous les arbres paroissoient en feu sans se consumer ; on y découvroit des fantômes lugubres et épouvantables. (4e Chant de la Table Ronde.)

Creuzé de Lesser cité par Mahé Joseph (1825) op. cit., p. 233

Les paroissiens de Concoret victimes de la magie de la fontaine de Barenton

Le chanoine met en avant la forêt et sa fontaine mythiques, où opère Éon, pour expliquer son pouvoir magique. On retrouve ce pouvoir qu’exercent à la fois le lieu et le personnage dans une note qui accompagne le dernier paragraphe ci-après, note dans laquelle le chanoine révèle que les habitants de Concoret délaissent les saints de leur église dans leurs prières, pour aller s’adresser à la fontaine de Barenton. Le chanoine fait des Concorétois les victimes, sinon les adeptes, de la sorcellerie d’Éon dont il avait déjà fait part.

Ces fables, restes de la mythologie Celtique, ont eu cours pendant plusieurs siècles, et au temps d’Éon de l’étoile elles régnaient encore et même long-temps après lui ; de sorte qu’il ne pouvoit choisir un théâtre plus convenable pour ses enchantements, réels ou prétendus, qui se trouvoient en harmonie avec les féeries et avec la diabolique célébrité du local.

Quelqu’un a même avancé que ce brouillon vouloit renouveler la religion des Druides, en preuve de quoi on pourroit citer son application à la magie, son séjour dans une forêt, ses assemblées nocturnes et son affection pour la fontaine de Baranton. Mais cette opinion ne trouve dans ces faits qu’un bien foible appui ; aucun témoignage historique ne la confirme […] [Note] Pendant long-temps les habitans de Concoret eurent le même goût que le bizarre Éon, et au lieu de s’adresser à Dieu ou à ses Saints dans leurs maladies, ils en cherchèrent le remède dans la fontaine de Baranton, soit en la priant, à la mode des Gaulois, soit en buvant de ses eaux, ce qui donna naissance à ce dicton, les Saints de Concoret ne datent de rien, dicton qui subsiste encore, aussi-bien que la curieuse fontaine.

Mahé Joseph (1825) op. cit., p. 427

Éon de l’Étoile chez Baron du Taya

En 1839, un autre écrivain, Baron du Taya, reprend des passages du livre de Mahé sans rien y ajouter. Par contre il ne fait nullement mention des écrits de l’abbé Guillotin. Il fait cependant part d’une révélation pour le moins énigmatique.

Selon la tradition de Concoret, en ces derniers temps, les livres d’Éon étaient conservés par quelques habitants du pays, et ils existaient encore dans le XVIIIe siècle ; mais tous ces livres, que les prêtres pouvaient saisir, étaient immédiatement brûlés. Depuis la mort du dernier sorcier au XIXe siècle, ils ont été cachés dans un ruisseau qui ne les altère pas.

BARON DU TAYA, Aymé-Marie-Rodolphe, Brocéliande, ses chevaliers et quelques légendes, Rennes, Imprimerie de Vatar, 1839, Voir en ligne. p. 349

Ce texte de Baron du Taya indiquerait que l’abbé Guillotin et le chanoine Mahé n’ont fait que reprendre une histoire du personnage qui était déjà connue des habitants de Concoret. Nous pouvons toutefois nous demander si l’histoire d’Éon qui nous est rapportée par ces religieux n’avait pas pour but de s’opposer à des écrits antérieurs - que mentionnent Baron du Taya - valorisant le personnage. Rien n’atteste l’existence à cette époque d’un exemplaire de ces livres. Comment ce fait-il alors que surgisse à Concoret, plusieurs siècles plus tard, l’histoire de ce personnage ? Sinon, qu’à cette époque post-révolutionnaire, le clergé y trouvait un intérêt.

Un couvent d’ermites en Concoret ?

Le couvent du Moinet

L’abbé Guillotin se fait l’écho d’une communauté d’ermites qui aurait abrité Éon : le couvent du Moinet. Dans un autre chapitre consacré aux monuments de piété situés en Concoret, l’abbé parle de plusieurs belles croix de granit, ainsi que de pierres tombales, que des habitants du pays auraient mises au jour dans la seconde moitié du 18e siècle. Elles auraient été découvertes à 800 mètres environ au nord-ouest du château du Rox, sur l’ancien chemin allant de Tubœuf à Mauron, en un lieu appelé « Croix Richeux ». Aujourd’hui il ne reste rien de ces croix ni de leur emplacement.

Il y avait autrefois dans le même endroit à peu près, plusieurs belles croix de pierre de grain avec des pierres tombales. Celles des cimetières de Concoret et de Saint-Léry en furent tirées 7. Ces croix sont mentionnées dans les plus anciens titres […]

Guillotin Abbé (1811) op. cit.

Les « Croix-Richeux »

Les « Croix-Richeux » ne suffisent pas à elles seules comme preuve de l’existence d’un couvent du Moinet. C’est la toponymie du lieu avancée par l’abbé Guillotin qui laisse deviner une présence religieuse à une période reculée.

Le terrain voisin des croix Richeux se nomme Moinet, un terrain contigü planté de chênes au midi vers le Rox, se nomme le « Champ-aux-moines », un pré voisin appartenant à la famille Morfouesse s’appelle le « Purgatoire » qui signifie probablement « cimetière », le terrain au nord s’appelle « Breil » qui en vieux français veut dire « Enclos » […] tout cela annonce évidemment un établissement religieux et on ne peut douter que ce ne soit dans cet endroit qu’était située la communauté des ermites de Saint-Augustin dont Éon de l’Étoile était membre.

Guillotin Abbé (1811) op. cit.

Cette toponymie a été retrouvée sur des documents anciens non officiels, ce qui nous semble insuffisant pour affirmer l’existence d’une communauté religieuse à cet endroit. On se demande sur quoi s’appuie l’abbé Guillotin pour indiquer qu’il s’agit d’une communauté d’ermites de Saint-Augustin alors que les premières abbayes de cet ordre dans la région sont postérieures à Éon de l’Étoile 8.

Notre opinion est que dans cette forêt de Brécilien des 11e et 12e siècles, où les ermites sont en nombre, un groupement a très bien pu prendre forme et s’entendre pour installer une communauté religieuse érémitique, comme ce fut le cas dans d’autres forêts 9. Il est possible en effet pour une communauté religieuse de garder son indépendance vis-à-vis de toute abbaye. Cela se fait en accord avec le seigneur du lieu. Néanmoins sa survie, si elle n’est pas reconnue officiellement par l’Église, est fragile. Dans ces conditions de grande précarité, il est difficile de croire à l’existence, en cette première moitié du 12e siècle, d’un édifice de pierres taillées avec de superbes croix. Ces éléments, que l’on retrouve aujourd’hui dans la construction d’anciennes maisons ne peuvent donc, contrairement aux idées reçues, provenir de bâtiments religieux de grande importance.

Les indices toponymiques ainsi rapportés pourraient témoigner, s’ils sont confirmés, de l’établissement d’une communauté religieuse à cet endroit. Toutefois, il est impossible d’affirmer qu’elle aurait abrité le sieur Éon de l’Étoile.


Bibliographie

BARON DU TAYA, Aymé-Marie-Rodolphe, Brocéliande, ses chevaliers et quelques légendes, Rennes, Imprimerie de Vatar, 1839, Voir en ligne.

GUILLOTIN, abbé Pierre-Paul, « Registre de l’abbé Guillotin », Concoret, 1791, Voir en ligne.

LAURENTS, Antoine-Joseph des, Sanctorale Macloviense, seu officia propria diœcesis Macloviensis, Saint-Malo, Le Conte, Jean-Baptiste ; Valais, Jules, 1768, Voir en ligne.

MAHÉ, chanoine Joseph, Essai sur les antiquités du département du Morbihan, Vannes, Galles aîné, 1825, Voir en ligne.

MORICE, Dom Pierre-Hyacinthe, « Chronicon Britannicum », in Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Vol. 1, Paris, Charles Osmont, 1742, Voir en ligne.

POIGNAND, Jean Côme Damien, Antiquités historiques et monumentales de Montfort à Corseul par Dinan et au retour par Jugon, Rennes, Duchesne, 1820, Voir en ligne.


↑ 1 •  MORICE, Dom Pierre-Hyacinthe, « Chronicon Britannicum », in Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Vol. 1, Paris, Charles Osmont, 1742, Voir en ligne.

↑ 2 • Actuellement Montfort-sur-Meu en Ille-et-Vilaine

↑ 3 • Jean de Châtillon, surnommé « Jean de la Grille », fut sacré évêque d’Aleth en 1144 ; il transféra le siège épiscopal à l’île d’Aaron où est actuellement la ville de Saint-Malo en 1150 et mourut aux calendes de février 1163 ; il fut béatifié par le pape Léon X. Le diocèse de Saint-Malo célèbre sa fête le 1er jour de février.

↑ 4 • par celui qui viendra juger les vivants et les morts

↑ 5 • Texte original :

Depositi custos vigilantissimus Haereticum hominem qui se vivorum ac mortuorum Judicem futurum summa cum impietate & stupiditate asserebat, ejusque discipulos in sylva Painponensi delitescentes, e Dioecesi sua eliminavit. Ecclesiasticorum bonorum invasioni & cujuslibet iniquitatis generi quasi murum æneum sese opposuit. Summa tamen in eo erat animi lenitas, caritasque singularis quam in injuriarum oblivione & condonatione præcipue manifestavit. Denique cum refrigescentem pietatis ardorem verbis & exemplis excitasset, obiit Kalendis Februarii anno Domini millesimo centesimo sexagesimo tertio, sepultus est in Choro Ecclesiæ Cathedralis : ejus tumulo majoris reverentiæ causa additi sunt Cancelli ferrei, ex quibus cognomen de Craticulâ fortitus est. […]

LAURENTS, Antoine-Joseph des, Sanctorale Macloviense, seu officia propria diœcesis Macloviensis, Saint-Malo, Le Conte, Jean-Baptiste ; Valais, Jules, 1768, Voir en ligne. pp. 96-97

↑ 6 • Le chanoine Mahé fait erreur sur l’origine du surnom de sorciers qui aurait été donné aux habitants de Concoret à cause du talent de magicien d’Éon. Il apparait plutôt que ce sobriquet vient du fait que ce village détenait de nombreux cloutiers, travail lié à la forge. Les forgerons avaient une réputation de « sorciers » qui s’est transmise aux habitants.

↑ 7 • Ces croix, encore visibles de nos jours dans le cimetière de Saint-Léry, ont toujours été rapportées comme étant celles du couvent de Moinet. Il serait intéressant d’effectuer des recherches pour trouver à quel moment ces croix ont été amenées dans le cimetière. On trouve également de nombreuses pierres taillées imbriquées dans l’habitat traditionnel de différents lieux autour de Concoret, à l’exemple du hameau de « Folle Pensée » près de Barenton. Dans chaque cas, la tradition veut qu’elles proviennent soit du château de Belanton ou de Ponthus, soit du couvent du Moinet.

↑ 8 • La présence des abbayes augustiniennes en Bretagne commence vers 1130 avec celle de Sainte-Croix de Guingamp. Pour Brécilien, les deux abbayes relevant de saint Augustin sont celles de Saint-Jacques à Montfort, construite en 1152, et celle de Paimpont, érigée dans la première décennie du 13e siècle, donc après les événements rapportés ici.

↑ 9 • Le cas le plus connu est celui de Robert d’Arbrissel, le fondateur de l’abbaye de Fontevrault, qui, avant de devenir le grand homme que l’on sait, a débuté comme ermite, vivant en communauté informelle dans la forêt de Craon.