1834-1918
Orain, Adolphe
Un folkloriste en Brocéliande
Adolphe Orain (1834-1918) est le plus important collecteur de contes, chansons et traditions populaires de la fin du 19e siècle en Ille-et-Vilaine. Il se rend en forêt de Paimpont entre 1867 et 1886 et y collecte huit contes et douze chansons dont Les filles de Forges de Paimpont.
Éléments biographiques
Le cadre familial
Son père, Jean-Baptiste Orain (1794-1861), est le fils d’un paysan du village des Riais en Bain-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine). Sa mère, Véronique Delaunay (1813-1894) est la fille du maitre d’hôtel de la Croix-Verte situé à Bain.
[Elle] n’avait pas de dot. C’est pour cela qu’elle épousa Jean-Baptiste Orain, beaucoup plus âgé qu’elle, qui possédait la succession de son père décédé un petit capital de quinze mille francs.
Jean-Baptiste Orain, qui a appris le métier de mégissier (tanneur et teinturier) achète un terrain au bord du ruisseau de l’étang de Bain et y fait construire une tannerie. Il fait malheureusement faillite peu de temps après, abusé par un marchand rennais. Sa mère parvint par son courage et son travail, à élever sa famille et à payer les dettes de son mari.
Enfance
Adolphe Pierre Julien Orain, nait le 19 avril 1834, rue de la Rouëre, à Bain-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine). Il passe une enfance bercée par les histoires et les anecdotes, la lecture ; il se passionne pour les oiseaux et le braconnage.
Je n’ai jamais eu qu’un maître, un pauvre instituteur de village chez lequel je suis resté jusqu’à l’âge de quatorze ans. Il était seul pour une centaine d’élèves, aussi n’y avait-il que les grands à travailler sérieusement. J’appris chez lui mon arithmétique et assez bien puisque j’ai pu, plus tard, à la préfecture devenir chef de la comptabilité [...] Il m’enseigna, avec cela, un peu de grammaire et de géographie, mais ce fut tout. Le peu que je sais je l’ai appris seul, en lisant beaucoup.
Les débuts dans la carrière administrative
Un cousin germain de sa mère, nommé précepteur à Bain, l’embauche à quatorze ans. Il travaille ensuite, à partir de dix-sept ans, au bureau de l’enregistrement à Rennes. Il habite alors l’hôtel Piré, une pension située dans la rue du Champ de Mars. Tous les samedis, il se rend à pied à Bain et parcourt les trente-deux kilomètres de nuit. Le lendemain, après quelques heures de sommeil, il accompagne son père à la chasse.
Lorsque son supérieur, M. Phétu part à la retraite, Adolphe Orain doit trouver une autre situation. Il est embauché par M. Phétu fils au bureau des actes judiciaires de Brest. Il y reste peu de temps et obtient grâce à son oncle un emploi à la préfecture d’Ille-et-Vilaine à partir du 12 juillet 1854 2. Il retrouve sa pension de l’hôtel Piré et ses camarades du bureau de l’enregistrement avec lesquels ce fut le bon temps
. Adolphe Orain est attaché à la 3e division de la Préfecture (Finances).
Une vie de famille
Il loge ensuite dans un petit appartement situé rue de la Monnaie. De sa fenêtre, il aperçoit une jeune fille qui deviendra bientôt sa femme. Adolphe Orain se marie à Rennes le 14 avril 1863 avec Marie-Anne Julien (1844 Paris- ?).
M. Robinot Saint-Cyr, alors maire de Rennes, nous fit un joli petit discours, nous prédisant une union heureuse puisque l’amour seul nous avait attirés l’un vers l’autre. Mon frère fut mon garçon d’honneur et j’eus pour témoin M. Deluen notaire à Bain et conseiller général. La mariée avait pour fille d’honneur sa gentille petite sœur Marie Tullien, et pour témoin M. Duval, maire de Paimpont, directeur de forges et conseiller général.
Leur fille Anne nait le 26 janvier 1864. Puis naissent deux garçons, Marcel, mort à 5 ans et André mort à 14 ans (1881-1895). En raison de la santé délicate de leur fils André, la famille Orain quitte son domicile de la rue Saint-Louis pour un logement plus bourgeois situé au nord de Rennes.
Ce fut le 4 juin 1895 que nous achetâmes pour notre cher fils malade la propriété de Saint-Laurent. Le pauvre enfant le désirait vivement et c’est à peine s’il put en jouir. Il succomba à une maladie de coeur dès le 28 juillet de la même année. Nous avions, pendant les trois ans qui précédèrent cet achat, loué tout à côté une campagne au village du Gast. Oh ! ces trois années passées avec mon fils dans un grand et beau jardin. Comme elles furent courtes ! Quelles ravissantes promenades à deux, dans les champs, même le soir, tard après souper, autour de notre humble ermitage. Quelles causeries délicieuses ! André avait alors quatorze ans, il était instruit, avait beaucoup lu et raisonnait déjà comme un petit homme. Qu’ai-je donc fait à Dieu pour m’avoir enlevé la joie de ma vieillesse ?
Un érudit en société
Passionné par de nombreux domaines - littérature, histoire, contes et traditions populaires, ornithologie, etc. - Adolphe Orain apparait à ses proches et ses collègues comme un érudit curieux de toutes choses.
Plusieurs témoignages insistent, de même, sur la très grande culture d’Adolphe Orain, passionné de tout, proche du modèle traditionnel de l’honnête homme. Son bureau, raconte Charles Rulon, « était un petit musée de curiosités ».
Il obtient les Palmes académiques puis la Légion d’honneur le 29 décembre 1886, sur proposition du préfet M. de Brancion.
Considérons encore ce document, aussi insolite que précieux, que constituent les 56 cartes de visite reçues par Adolphe Orain après sa nomination comme chevalier de la Légion d’honneur en 1886. Ces cartes dessinent très précisément les contours du réseau social qu’Orain s’est constitué grâce à ses travaux d’ethnologie. Or, remarquons que sur les 41 individus dont la profession est identifiable, 69 % appartiennent aux élites sociales. Parmi les huit membres de l’administration préfectorale, se trouvent quatre préfets, un secrétaire général, un sous-préfet, un conseiller de préfecture, et seulement un fonctionnaire intermédiaire en la personne du secrétaire de sous-préfecture Augustin Tual. Fait notable, donc, grâce à son activité d’érudit Orain est parvenu à tisser des relations avec des individus que ni ses origines ni sa carrière ne lui laissaient au départ l’espoir de fréquenter. Aussi peut-on faire l’hypothèse qu’à l’instar de certains cadres municipaux, son engagement dans la vie culturelle locale a constitué pour lui une manière détournée de s’élever dans la hiérarchie sociale.
Journalisme et politique
Le 1er mai 1888, Adolphe Orain quitte la préfecture après 35 ans de services. Il travaille alors comme secrétaire particulier du député Émile Récipon, membre de l’Union Républicaine (1839-1895). Il fonde par ailleurs le journal rennais La dépêche bretonne, dont il est administrateur jusqu’en 1895.
Le 13 mai 1900, il est élu maire de sa commune natale, Bain-de-Bretagne en tant que candidat républicain patriote, opposé au candidat sortant républicain dreyfusard.
Nous nous réjouissions de voir figurer au nombre des élus M. Adolphe Orain, ancien chef de direction à la préfecture d’Ille-et-Vilaine, tout naturellement désigné pour devenir maire de Bain. Son frère, M. Jules Orain, avait été autrefois investi de cette fonction. Une cabale montée par ses adversaires amena le maire dreyfusard, M. Guérin, à la première charge de notre ville. Par un juste retour des choses d’ici bas, M Adolphe Orain chassera à son tour, de la mairie le Louangeur du ministère Dreyfusard.
Il quitte la mairie de Bain en 1902 et abandonne la politique.
Les dernières années
Marqué par la mort de ses deux fils, Adolphe Orain passe les dernières années de sa vie dans la nostalgie des jours heureux. Le 26 juillet 1907, il écrit :
Je ne reviens jamais au pays natal sans éprouver un nouveau chagrin. Tout ce qui charmait ma jeunesse n’existe plus. Les bois où j’aimais à aller rêver ont été abattus. Les ronces ont envahi les petits sentiers qui conduisaient au télégraphe aérien sur la vieille tour féodale du Coudray. Seule une hulotte a fait entendre sur ma tête son cri désolé.
Il meurt le 27 avril 1918, âgé de 84 ans, laissant derrière lui une œuvre foisonnante louée par ses contemporains. — RULON, Charles, « Adolphe Orain (1834-1918) », Bulletin Archéologique de l’Association Bretonne, LXVII, 1959, p. 83. —
Avec Adolphe Orain disparait une source qui semblait inépuisable de traditions populaires et de souvenirs locaux.
Sa tombe se trouve au cimetière du Nord (section 8, rang 9, tombe 31), à Rennes.
— CARNOY, Henry, « Galerie traditionniste - Adolphe Orain », La Tradition, Vol. 14, 1904, p. 108-109, Voir en ligne. —
L’écrivain
Dès son enfance à Bain-de-Bretagne, Adolphe Orain a entendu nombre de conteurs. Il avoue leur devoir sa notoriété d’écrivain, mais il reconnait aussi l’importance d’Émile Souvestre et de son contemporain Paul Sébillot dans sa vocation.
C’est Souvestre, et plus tard Sébillot, qui me donnèrent l’idée d’écrire à mon tour les récits des bonnes gens qui venaient travailler en journée chez ma mère, couturiers et couturières qui charmaient nos veillées à mon frère et à moi. Qu’ils étaient drôles et amusants les contes du père Constant Tual, de Nenotte Jumel, de la mère Chevalier, de Margr’ite Courtillon, de Marie Niobé et de tant d’autres ! Les uns de ces récits nous faisaient rire aux larmes et les autres nous glaçaient de terreur. Nous en rêvions la nuit. Ce sont eux qui, racontés par moi, m’ont valu d’être lauréat de l’Académie française.
Durant sa longue existence, il s’intéresse à la culture gallèse sous toutes ses formes, contes, chansons, langue, traditions, usages, etc.
Après Souvestre, qui le premier en Bretagne, s’est occupé de recueillir les traditions populaires, après MM. de la Villemarqué, Luzel et Sébillot, je viens moi aussi offrir mon humble cueillette. Vaudra-t-elle la peine que je me suis donnée ? Je n’en sais rien ; mais qu’importe si je suis arrivé à sauver de l’oubli une élégie du temps passé, un conte de revenants, à rappeler les coutumes, les usages, les goûts de nos pères si différents des nôtres ? J’aurais au moins apporté mon grain de sable aux savants qui s’occupent de l’oeuvre du Folklore, et cela me suffira. Enfin, j’aurais peut-être donné à d’autres l’idée de continuer ces recherches qui m’ont charmé et qui certainement les charmeront à leur tour
L’œuvre d’Adolphe Orain ne se limite pas à la publication d’ouvrages. Il est membre de plusieurs associations culturelles. Il rédige une centaine d’articles, de 1866 à 1913, dans de nombreuses revues : La semaine des familles, La semaine des enfants, L’Hermine, la Revue de Bretagne et de Vendée, Mélusine, la Revue du traditionnisme Français et étranger, La Tradition, la Revue illustrée des provinces de l’Ouest, Le Concours des muses - universel et permanent, les Annales de Bretagne, les Mémoires de la Société archéologique d’Ille-et-Vilaine, L’annuaire officiel d’Ille-et-Vilaine 3... Il est notamment l’auteur d’une quarantaine d’articles dans la Revue de Bretagne et de Vendée ou dans L’Hermine.
Plus tard encore, au tournant du siècle, dans un contexte de renaissance culturelle, de nouvelles structures font leur apparition, comme l’Association artistique et littéraire de Bretagne, dont Adolphe Orain devient un sociétaire très actif .
Les revues lui permettent de publier une partie du collectage (contes, devinettes, chansons, etc.) qu’il n’a pas eu la possibilité d’éditer dans ses principales anthologies. Elle lui donnent aussi l’occasion d’écrire des biographies de poètes, des études historiques, des monographies inédites, des poèmes... Elles lui donnent enfin la possibilité, alors que sa notoriété de folkloriste est reconnue, de se faire entendre au delà du cercle des intellectuels bretons.
Il s’est intéressé à de nombreux sujets, mais c’est avant tout son œuvre de folkloriste qui lui vaut la reconnaissance générale à partir des années 1890.
Toutes les heures de loisirs que lui laissèrent ses occupations furent consacrées par lui à la littérature, à l’histoire et au folklore de son département natal. Aussi son œuvre est-elle des plus importantes, aussi bien par son étendue que par sa haute valeur. Comme traditionniste tout particulièrement M. Adolphe Orain jouit d’une réputation très méritée qui depuis longtemps a franchi les bornes de la Bretagne et qui le met de pair avec les Bladé, les Luzel, les Rolland, les Gaidoz, les Sébillot, les Laisnel de la Salle, pour ne citer que les plus connus des traditionnistes français.
Contes, chansons et traditions populaires
Les contes
Adolphe Orain publie plus de cent cinquante contes de 1868 à 1914, presque intégralement collectés en Ille-et-Vilaine. Il rédige son premier recueil de contes en 1868. — ORAIN, Adolphe, Les Veillées du fermier Jean-Louis, Redon, L. Guillet, imprimeur-libraire, 1868, 31 p. —.
Entre 1868 et 1872, il fait paraitre sept contes inédits dans La semaine des enfants : Fleur d’épine, La bûche d’or, collecté en forêt de Paimpont, Les trois bossus, La couronne d’Hoël III, dont l’action se déroule à Gaël, La levrette blanche, L’eau qui danse, la pomme qui chante et l’oiseau qui dit tout et enfin L’âne qui fait l’or 4.
De 1870 à 1897 paraissent neuf contes inédits dans la Revue de Bretagne et de Vendée : Le Sifflet merveilleux, Le Rocher d’Uzel, Sainte Onenna – récit de la gardeuse de vaches collecté à Paimpont, La médaille de sainte Anne, Le sire de Changé, Les Histoires du pays de Bruz, Le Bon Dieu à Laillé, Petite légendes de l’Ille-et-Vilaine qui comprend L’histoire du Thélin, ainsi que Les contes de l’antique forêt de Brocéliande qui comprend l’histoire de La Fée aux trois dents 5.
En 1894, il publie Le boeuf d’or 6 dans la Revue illustrée des provinces de l’Ouest. En 1898, six contes paraissent dans les Annales de Bretagne : Jacques Robert à la porte du Paradis, L’origine des puces, La tête du mort, Légendes bretonnes : Anne de Bretagne, Du Guesclin, et Gargantua 7.
Un second recueil de ses collectages est publié en 1901. L’édition comprend plusieurs contes de la forêt de Paimpont, tous précédemment publiés dans des revues 8. — ORAIN, Adolphe, Contes de l’Ille-et-Vilaine, Paris, J. Maisonneuve, 1901, Voir en ligne. —
Les contes publiés dans ce premier volume ont été recueillis en Ille-et-Vilaine depuis 1860 jusqu’à l’époque actuelle. On reconnaîtra facilement les anciens des nouveaux par la raison qu’il y avait autrefois des conteurs et qu’il n’en existe plus. Il s’en suit que les récits d’aujourd’hui ne sont qu’une analyse sèche de ceux du temps passé.
Entre 1898 et 1909, il fait paraitre cinq contes dans la revue L’Hermine : Le rocher d’Uzel - légende des bords de la Vilaine, Les trois légendes du château de Fontenay, L’eau qui danse, la pomme qui chante et l’oiseau qui dit tout , déjà paru en 1872, Un récit du foyer dans l’arrondissement de Vitré et Le géant de la forêt de Brocéliande collecté à Paimpont 9.
Son dernier recueil de contes populaires, paru en 1904, réunit les histoires racontées par Marg’rite Courtillon qui tenait à Bain une misérable auberge, dans la rue de la Rouëre
, ainsi que La princesse Yvonne, conte inédit collecté à Paimpont. — ORAIN, Adolphe, Contes du pays Gallo, Rennes, Honoré Champion, 1904, Voir en ligne. —
De 1902 à 1905, Adolphe Orain publie dans la revue La tradition trois contes inédits, Le merle blanc et le renard, La Poule coupée par la moitié, et L’Innocent qui veut se marier et L’âne qui fait de l’or paru précédemment 10.
Il continue à faire paraitre des contes inédits dans la Revue de Bretagne et de Vendée de 1905 à 1911, La légende de Saint Melaine , Légende bretonne : Rieux et Redon, ainsi que Devant l’Âtre 11.
Entre 1906 et 1914, il publie sept contes dans la Revue du traditionnisme Français. Six d’entre eux sont inédits, Le Bon Dieu dans la tirette, Jean l’Ours, Jean Bête, Les facéties du curé de Saulnière, L’enfant changé en vieillard 12.
Les chansons populaires
Adolphe Orain a une influence importante dans le domaine du répertoire traditionnel en pays gallo. Il est avec Lucien Decombe (1834-1905) et Paul Sébillot (1843-1918) l’un des premiers collecteurs de Haute-Bretagne. Il recueille cinq à six cents chansons 13. Elles font l’objet de deux publications principales ainsi que de nombreux articles dans des revues diverses.
Adolphe Orain publie ses premières chansons dans La Semaine des enfants. Le Battoué cassé, collectée à Paimpont, est publiée dans l’édition de 1869, Tu ris, tu ris bergère, collectée à Montfort, dans l’édition de 1870. En 1881, il publie Les sabots de la reine Anne qui le font connaitre dans les milieux parisiens 14.
Ce fut dans la forêt de Rennes, au mois de juin 1880, que j’entendis chanter Les Sabots d’Anne de Bretagne. J’envoyais cette chanson, avec sa mélodie, à un journal illustré de Paris, qui la fit paraitre aussitôt. M. Bourgault-Ducoudray, professeur au conservatoire national de musique, m’écrivit : « Vos sabots d’Anne de Bretagne ont ici un véritable succès ».
Plusieurs chansons populaires collectées par Adolphe Orain paraissent dans la revue Romania 15 entre 1880 et 1882 : Les Filles des forges de Paimpont, Le Battoué cassé, Le prisonnier de Rennes, ainsi que Le grand loup du bois 16.
En 1886, il publie un premier recueil d’une centaine de chants du pays gallo avec les airs notés par le commandant Legrand en 1886. — ORAIN, Adolphe, Glossaire patois du département d’Ille-et-Vilaine, suivi de chansons populaires avec musique, The Internet Archive, Paris, Maisonneuve frères et Ch. Leclerc éditeurs, 1886, Voir en ligne. — suivi un an plus tard d’une édition qui donne plus d’audience à son travail d’ethnomusicologue. — ORAIN, Adolphe et LEGRAND, Commandant, Chansons populaires recueillies dans le département d’Ille-et-Vilaine, V, Paris, Rolland Eugène, 1887, 78 p., (« Recueil de chansons populaires »). —
Il y a trente ans, lorsque je commençais à chercher des chansons, j’avais pour ami le commandant Legrand, de Rennes, un excellent musicien auquel je fis partager ma passion pour les mélodies bretonnes et qui m’accompagna dans mes pérégrinations.
En 1888, il publie quatre chansons inédites dans la revue parisienne Mélusine - revue de mythologie, littérature populaire, traditions et usages dont une version des Gas des Campénéac collectée à Paimpont 17. En 1900, treize chansons paraissent dans les Annales de Bretagne 18.
En 1897, il intègre de nombreuses chansons parues antérieurement, accompagnées de chansons, comptines et rondes inédites dans le premier tome de ses collectes de croyances et traditions populaires d’Ille-et-Vilaine. — ORAIN, Adolphe, De la vie à la mort : folklore de l’Ille-et-Vilaine, Vol. 1, Paris, J. Maisonneuve, 1897, Voir en ligne. —
En 1902 parait une seconde anthologie de chansons populaires. — ORAIN, Adolphe, Chansons de la Haute-Bretagne, Rennes, Hyacinthe Caillière, éditeur, 1902, 423 p. — 19
Adolphe Orain continue à publier des chansons inédites jusqu’en 1913, dans la Revue du Traditionnisme français et étranger ainsi que dans la revue La Tradition 20.
Les traditions populaires
Adolphe Orain publie ses premières contributions au folklore de Haute-Bretagne (chansons, devinettes, usages...) dans la revue Mélusine. De 1886 à 1888 paraissent un article sur les Moeurs et usages en Haute-Bretagne, un article sur les êtres maléfiques de l’imaginaire gallo 21 qui comprend une version de La bête de la Lohière, collectée au Loutehel, ainsi qu’un article sur les Devinettes de la Haute-Bretagne 22.
En 1891, il publie Curiosités, croyances, superstitions, chansons et coutumes de l’Ille-et-Vilaine. - Un charmant pays, article dédié aux traditions populaires de son village natal, Bain-de-Bretagne, dans la Revue illustrée des provinces de l’Ouest 23.
Adolphe Orain compile l’ensemble de ses collectages concernant les traditions populaires du pays gallo dans une anthologie en deux volumes parue en 1897, — ORAIN, Adolphe, De la vie à la mort : folklore de l’Ille-et-Vilaine, Vol. 1, Paris, J. Maisonneuve, 1897, Voir en ligne. — 24 puis en 1898 pour le second volume. — ORAIN, Adolphe, De la vie à la mort : folklore de l’Ille-et-Vilaine, Vol. 2, Paris, J. Maisonneuve, 1897, Voir en ligne. — 25
Lorsqu’il y a vingt ans je parcourus les communes de l’Ille-et-Vilaine pour décrire la Géographie pittoresque de notre département, j’entendis derrière les haies d’aubépine des mélodies suaves, au coin du foyer des récits étranges. J’assistai à des cérémonies gaies et tristes qui m’intéressèrent et m’impressionnèrent. Je me promis alors de me livrer plus tard à de nouvelles études sur mon cher pays. Des loisirs m’ont permis de mettre mon projet à exécution, et c’est ce que j’ai vu et entendu dans le fond de nos campagnes que je publie aujourd’hui.
De 1902 à 1906, il fait paraitre dans la revue La Tradition trois articles sur les Traditions populaires d’Ille-et-Vilaine, Les monstres enfants du diable, L’enfance, et Jean Simon dans le Paradis 26.
En 1906, il publie dans la Revue du Traditionnisme français et étranger un article sur l’histoire du collectage dans le pays Gallo. Il y évoque les œuvres d’Émile Souvestre, d’Auguste Brizeux, de Luzel, d’Alfred Fouquet, de Paul Sébillot, ainsi que sa propre contribution à l’étude du folklore breton 27. En 1908 il publie un article sur la médecine populaire dans la Revue du Traditionnisme français et étranger 28. En 1909 il fait paraitre son dernier article sur les Traditions populaires de l’Ille-et-Vilaine, en l’occurrence La chasse nocturne, dans L’Hermine 29.
Le gallo
En 1886, Adolphe Orain fait œuvre de précurseur 30 en publiant un ouvrage consacré au gallo, préfacé par l’un de ses savants amis, François-Marie Luzel. — ORAIN, Adolphe, Glossaire patois du département d’Ille-et-Vilaine, suivi de chansons populaires avec musique, The Internet Archive, Paris, Maisonneuve frères et Ch. Leclerc éditeurs, 1886, Voir en ligne. —
je ne vois pas grand’chose à reprendre à votre travail, qui est conçu et exécuté avec conscience et conformément à la méthode recommandée par l’école critique actuelle, dans ce genre d’études.
Jean Choleau, militant de la langue gallèse, membre des Compagnons de Merlin qui signe sous le pseudonyme de Jean Lancelot, écrit en 1942 à quelle place il situe l’œuvre d’Adolphe Orain pour son apport à la culture gallèse. — MORIN, Gilles, « Les Compagnons de Merlin », Cahiers du Laboratoire d’études et de recherches Gallèses, 1982, p. 111-155. —
Nous sommes en retard de cinquante ans au moins sur la Basse-Bretagne. Notre La Villemarqué s’appelle Orain et il est de la fin du 19e siècle.
Géographie, Histoire de Bretagne, poésie...
Outre son œuvre de folkloriste consacrée à l’Ille-et-Vilaine, Adolphe Orain est l’auteur de nombreux ouvrages et articles aux thèmes variés.
Géographie de l’Ille-et-Vilaine
En 1866, il publie le Guide du voyageur dans Rennes et ses environs, volume de cinq cents pages aux nombreuses illustrations qui connait des rééditions en 1867 et 1904. — ORAIN, Adolphe, Guide du voyageur dans Rennes et ses environs, 1867, Redon, L. Guillet, imprimeur-libraire, 1866, Voir en ligne. — 31
En 1882, il fait paraitre un inventaire du patrimoine matériel et immatériel du département d’Ille-et-Vilaine. Cette somme de près de cinq cents pages abonde en informations sur tous les aspects des communes du département : hydrographie, climat, démographie, monuments mégalithiques, traditions populaires, etc — ORAIN, Adolphe, Géographie pittoresque du département d’Ille-et-Vilaine - Histoire et Curiosités des 357 communes - Personnages célèbres, Littérateurs, Poètes, Artistes, etc. - Agriculture, Commerce, Industrie.., Rennes, Imprimerie Alph. le Roy fils, 1882. —
Nous prédisons au livre de M. Orain le plus franc et le plus légitime succès. Il abonde en notices historiques, en descriptions pittoresques, en renseignements instructifs. En un mot, c’est un ouvrage considérable à tous les points de vue, et M. Orain en le publiant rend un véritable service à son pays.
Adolphe Orain fait appel à six artistes pour illustrer son nouvel ouvrage : Tancrède Abraham (1836-1895), Albert Philippon, Édouard Vaumort (1823-1886), Henri Arondel (1827-1900), Théophile Busnel (1843-1918) pour la partie concernant Paimpont et Henri Saintin (1846-1899) à qui il confie notamment les illustrations de la région de Montfort.
En 1892, il publie un guide du Pays de Rennes préfacé par Louis Tiercelin 32. — ORAIN, Adolphe, Au Pays de Rennes, Rennes, Hyacinthe Caillière, 1892, Voir en ligne. —
Ce livre est plus qu’un guide, et moins qu’une véritable histoire. Il est à la fois l’un et l’autre. Il a pour but de faire connaitre au profane, le beau pays de Rennes.
Adolphe Orain est l’auteur de deux monographies sur des villages d’Ille-et-Vilaine. La première consacrée à Guipel parait en 1887 — ORAIN, Adolphe, Guipel, son château, ses manoirs, ses chapelles, ses souvenirs, Rennes, P. Dubois, 1887, 19 p., Voir en ligne. —, la seconde parue en 1905 est consacrée à l’histoire de son village natal, Bain-de-Bretagne. — ORAIN, Adolphe, Bain, son histoire, Imprimerie de F. Simon, 1905. —
En 1906, l’article À travers le département d’Ille-et-Vilaine parait dans les Mémoires de la Société archéologique d’Ille-et-Vilaine. — ORAIN, Adolphe, « A travers le département d’Ille-et-Vilaine », Mémoires de la Société archéologique d’Ille-et-Vilaine, Vol. 34, 1906, p. 289-305. —
En 1910, il publie un dernier article géographique sur trois communes du sud-ouest de Rennes, Châtillon-sur-Seiche, Saint-Erblon et Bruz. — ORAIN, Adolphe, « Monographies de trois communes du canton sud-ouest de Rennes : Châtillon-sur-Seiche, Saint-Erblon, Bruz », Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou, Vol. 44, 1910, p. 249, Voir en ligne. —
Histoire de Bretagne
L’intérêt d’Adolphe Orain pour l’Histoire de Bretagne s’est développé avec les années. Ses premières contributions historiques paraissent alors que sa renommée de folkloriste est déjà établie.
En 1890, il fait paraitre un premier ouvrage consacré à une figure rennaise 33. — ORAIN, Adolphe, Erection d’un monument à Leperdit, ancien maire de Rennes, notice biographique, Rennes, Alph. Le Roy, Imprimeur, 1890, Voir en ligne. —
De 1898 à 1910, il publie huit articles historiques dans les revues L’Hermine, la Revue de Bretagne et de Vendée et la Semaine religieuse du diocèse de Rennes : une biographie du malouin Jean de Calais, des articles sur Gilles de Bretagne (1420-1450), sur Duguesclin (1320-1380), sur le Parlement de Bretagne au 18e siècle, deux articles sur l’année 1836 à Rennes, sur le transport des reliques de saint Donatien et de saint Rogatien à Poligné le 2 juin 1654, ainsi qu’un article sur Godefroy Brossay-Saint-Marc (1803-1878) premier archevêque de Rennes 34.
Adolphe Orain s’est fortement intéressé à la chouannerie dans les dernières années de sa vie. Sa première publication sur le sujet est un article de la Revue de Bretagne et de Vendée, entre le conte et l’Histoire, sur trois curés réfractaires de Bruz durant la Révolution. — ORAIN, Adolphe, « Légendes du pays de Bruz : trois martyrs », Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou, Vol. 18, 1897, p. 230-235, Voir en ligne. —
De 1905 à 1914 paraissent huit articles sur la chouannerie. Les deux premiers sont publiés dans L’Hermine en 1905 et 1909. Le premier sur le chef chouan Pierre Guillemot (1759-1805) est suivi d’une étude sur l’année 1793. Cinq autres articles sur la chouannerie sont parus dans la Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou de 1910 à 1914 35.
Poésie
La carrière d’auteur d’Adolphe Orain commence avec un recueil de poèmes paru en 1866, intitulé Les filles de la nuit. Cette première publication est un succès. Certains poèmes ont été traduits en langues étrangères. — ORAIN, Adolphe, Les Filles de la nuit, Rennes, Hamon, 1866. —
En 1907, il publie un poème sur Dinard dans la Revue de Bretagne et de Vendée. — ORAIN, Adolphe, « Dinard, poésie », Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou, Vol. 41, 1909, p. 80, Voir en ligne. —
Biographies d’artistes bretons
L’intérêt d’Adolphe Orain pour la poésie se manifeste aussi par l’écriture d’articles biographiques sur des poètes. Entre 1866 et 1911, il publie dix articles sur des littérateurs bretons dans la Revue de Bretagne et de Vendée : Mme la princesse de Salm-Dyck (1767-1845), Pierre-Louis Ginguené (1748-1816), Guillaume René Kerambrun (1813-1852), Émile Souvestre (1806-1854), Jean Elleviou (1769-1842), Louis Léon César Faidherbe (1818-1889), Bernard de la Durantais (-1806), Victor Drouyer (-1871), ainsi que deux articles sur Leconte de Lisle étudiant en droit à Rennes et Le séjour en Bretagne de célébrités littéraires et scientifiques 36.
En 1868 la biographie du poète Édouard Delatouche parait dans Le Concours des muses - universel et permanent 37.
De 1902 à 1910, il publie plusieurs articles sur des artistes bretons dans la revue L’Hermine. Le premier d’entre eux est consacré au peintre Jean-Louis Hamon (1820-1874), puis paraissent des articles sur le poète romantique Evariste Boulay-Paty (1804-1864), sur l’acteur Glatigny (1839-1873) au théâtre de Rennes, sur Les amours d’Hippolyte Lucas et de Laure de Martel, sur l’écrivain briochain Villiers de l’Isle-Adam (1838-1889), sur Les aventures de M. Jean-Marie Blanchet, curé de Lanrigan et enfin sur Le théâtre à Rennes au siècle dernier 38.
Ornithologie
Adolphe Orain s’intéresse à l’ornithologie depuis son enfance. Il publie un premier article, dédié au rossignol dans La Semaine des familles en 1867. — ORAIN, Adolphe, « Le retour du printemps », La semaine des familles : revue universelle illustrée, 1867, p. 517-518, Voir en ligne. — En 1868, il fait paraitre un ouvrage ornithologique intitulé Le Nid, avec une préface de l’écrivain rennais Hippolyte Lucas (1807-1878). — ORAIN, Adolphe, Le Nid, Redon, L. Guillet, imprimeur-libraire, 1868, 121 p. —
Voulez-vous connaître les mœurs des oiseaux qui vivent autour de nous ? Ouvrez le petit livre de M. Orain, et vous verrez passer tour à tour devant vous la fauvette, le rossignol, l’alouette, la grive, la bergeronnette, le rouge-gorge, le bouvreuil, le roitelet, le troglodyte, le merle, la bécasse, la mésange, voire même le canard sauvage ; tous divers de vêtements, de mœurs et de chants ; tous intéressants et charmants à étudier. M. Orain a beaucoup observé ses héros et il éprouve pour eux une vive tendresse de cœur : cela se sent et se communique.
Horticulture
Adolphe Orain a publié deux articles consacrés à l’horticulture. Le premier, dédié au lierre, est publié dans La Semaine des Enfants de 1869. — ORAIN, Adolphe, « Horticulture - Le lierre », La Semaine des enfants, Vol. 19 / 988, 1869, p. 383, Voir en ligne. — Le second, sur les jardins de Mordelles, parait dans la Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou de 1908. — ORAIN, Adolphe, « Les Jardins d’autrefois ; Promenade horticole à Mordelles ; Tribulation d’un horticulteur à ses débuts. », Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou, Vol. 39, 1908. —
Adolphe Orain en forêt de Brocéliande
Tout n’est que merveilles dans cette forêt superbe, remplies de grands étangs, de vallées ombreuses, de méandres sans fin et de fontaines hantées par les fées et l’enchanteur Merlin.
Avril 1867 — Première visite
Dans l’introduction de La bûche d’or, conte collecté à Paimpont, Adolphe Orain explique les circonstances dans lesquelles il s’est pour la première fois rendu en forêt de Brocéliande. Il y écrit que sa bonne, originaire du village du Cannée lui avait vanté les talents des conteurs de Brocéliande. Ah ! monsieur, que c’est donc amusant ! Mais, si vous alliez dans mon pays, l’on vous dirait encore de bien plus belles histoires que ça.
Intrigué par les dires de sa bonne, Adolphe Orain part pour Brocéliande en avril 1867.
Depuis longtemps je caressais le rêve d’aller errer à ma guise, à l’aventure, dans ces grands bois de Baignon, de Trécélien, de la Moute, des Noës-de-la-Source, afin de visiter la fontaine de Baranton, où l’enchanteur Merlin et la fée Viviane venaient se mirer, et la fontaine de Jouvence, dont l’eau a le privilège de rajeunir les gens. Au mois d’avril dernier, j’ai pu mettre mon projet à exécution. Je suis parti de Rennes un mardi à midi, avec un ancien forgeron des hauts fourneaux de Paimpont, actuellement aubergiste au village du Canée, et qui effectue chaque semaine, avec une petite voiture, le voyage de Rennes, pour faire le commerce des beurres et des œufs.
Cet ancien forgeron nommé Jean-Baptiste Peillon le dépose au milieu de la nuit au Cannée, où il est attendu chez les parents de sa bonne. Après s’être reposé, il propose au fils de ses hôtes, José, de le conduire à travers les méandres de la forêt, à la fontaine de Barenton, afin d’y être de très-bonne heure le matin.
A cette demande, l’effroi se peignit aussitôt sur tous les visages, et la mère Jeanne, prenant la parole, me dit presque en tremblant : « Vous n’y songez pas, monsieur ; c’est pour rire, bien sûr, ou vous ignorez les rencontres que l’on peut faire la nuit dans les crezées de la forêt ! (carrefours de la forêt). — Complétement, répondis-je. — Vous n’avez jamais entendu parler de la mort du marquis de Trécélien ? — Jamais. — Ni de la rencontre faite par Rose Duchemin ? — Non plus. » Oh ! alors, la mère Jeanne me raconta des histoires affreuses, épouvantables, que je me donnerai bien garde de vous répéter. Comme elle voyait, à chacun de ses récits, un sourire d’incrédulité passer sur mes lèvres, elle s’animait davantage et renchérissait à qui mieux mieux. « Vous ne croyez peut-être pas davantage à l’histoire de la Bûche d’or ? »
Bien sûr, il ne faut pas prendre cette introduction de La bûche d’or au pied de la lettre. Ce préambule littéraire a pour fonction d’introduire le conte. Cependant, Adolphe Orain y glisse des informations qui pour la plupart semblent véridiques. Ainsi, Jean-Baptiste Peillon apparait comme bûcheron à Paimpont en 1826 39. Adolphe Orain écrit par ailleurs qu’il a collecté ce conte auprès de Marie Niobé du Cannée en Paimpont. Le fils de ses hôtes, José, l’emmène le lendemain à la fontaine de Barenton, or le fils de Marie s’appelle Joseph.
Les contes de Brocéliande
Adolphe Orain est le plus important collecteur de contes, légendes, chansons et traditions populaires de la forêt de Paimpont-Brocéliande. Il y prospecte entre 1867 et 1886, sur les bords de l’Aff, à Campénéac, au Loutehel, à Plélan-le-Grand, à Paimpont, aux villages de Cannée et de l’Abbaye-de-Telhouët.
L’idée me vint d’aller, à mon tour, errer à l’aventure dans les grands bois de Brocéliande, de suivre les sentiers capricieux du Val sans Retour et de Folle-Pensée, de parcourir les rives fleuries de l’étang du Pas-du-Houx, de visiter le château de Comper où le vieux maréchal d’Aumont fut blessé à mort, de découvrir le tombeau de Merlin et les fontaines de Jouvence et de Barenton. J’y recueillis mes plus beaux contes, la bûche d’or, la fée aux trois dents, le géant de la forêt. J’y entendis les chansons composées jadis par un ancien ouvrier des Forges : les filles des Forges de Paimpont, le grand loup du bois, le gars Mathurin.
Adolphe Orain considère que la forêt de Paimpont est un endroit privilégié pour le collectage de contes et légendes. Il recueille une grande partie de ses contes populaires auprès de la famille Niobé du Cannée en Paimpont.
Quiconque voudra s’en donner la peine, recueillera des contes et des légendes tant qu’il en voudra dans cette partie de l’Ille-et-Vilaine et du Morbihan qui n’a pas été explorée par les folkloristes. Mais il y a une condition : le paysan ne dit pas ses histoires au premier venu. Il faut vivre dans son intimité, s’asseoir à son foyer, l’entretenir des choses du temps passé et provoquer ses confidences. Lorsque sa langue est déliée, il ne tarit plus [...] Il y a trente ans environ nous fîmes la connaissance d’une famille de cultivateurs demeurant au village du Canée en pleine forêt, et dans cette seule maison, nous recueillîmes un grand nombre de contes, de légendes et de chansons.
C’est notamment auprès de cette famille qu’il collecte au village du Cannée en Paimpont :
- La bûche d’or auprès de Marie Niobé ,
- Sainte Onenna auprès de Jeanne Niobé,
- La princesse Yvonne auprès de Julien Niobé,
- La fée aux trois dents auprès de la famille Niobé.
Il a aussi publié deux autres contes de Brocéliande, une histoire du Thélin, ainsi qu’une légende et un conte collectés auprès de M. de la Vigne, maire du Loutehel 40.
- La couronne du roi de Domnonée collecté auprès de Vincent Guyot à Saint-Méen,
- Le géant de la forêt collecté auprès d’Étienne Péan, âgé de 54 ans, sabotier dans les bois de la Fleuriais, commune d’Ercée-en-Lamée,
- Histoire du curé du Thélin, l’abbé Levrel et de l’araignée.,
- La bête de la Lohiére, légende collectée au Loutehel,
- Le Curé de Guer, conte collecté au Loutehel
Adolphe Orain fait paraitre ces contes dans des revues ou dans ses deux recueils entre 1870 et 1914. En 1880, il publie une brochure dédié à la forêt de Paimpont. — ORAIN, Adolphe, Une excursion dans la forêt de Paimpont : Le conte de la bûche d’or - La chanson des filles des Forges, Rennes, L. Caillot, 1880, 48 p., Voir en ligne. —
Des contes d’Adolphe Orain adaptés en Brocéliande
Cinq contes d’Adolphe Orain ont été adaptés et localisés en Brocéliande par Jules Dorsay en 1925, par le conteur Patrick Lebrun (1954- 1994) et par la conteuse concorétoise Ernestine Lorand (1921-2008). Une croyance populaire collectée à Paimpont a aussi fait l’objet d’une adaptation en conte par Jean Markale (1928-2008).
Les quarante voleurs est un conte de Jules Dorsay publié en 1925. Ce conte est une libre adaptation en forêt de Brocéliande d’un conte d’Adolphe Orain, initialement localisé en forêt de Rennes, publié en 1904 sous le même titre dans Contes du Pays Gallo.— DORSAY, Jules, « Les quarante voleurs », in Contes d’Armorique, Paris, Nathan, 1925, p. 177-192. —
Patrick Lebrun avait intégré ce conte à son répertoire. En 1993, il en donne une version, illustrée par Hélène Roinel, sous le titre Les trois dents de la fée. — ROINEL, Hélène, CALINDRE, Henri, HÉDÉ, Arsène, [et al.], Contes et Histoires du Pays Gallo, Le Ploërmelais, 1993. [pages 82-85] —
Patrick Lebrun a adapté et localisé en forêt de Brocéliande un conte collecté et publié par Adolphe Orain en 1904 sous le titre Le panier de Pêche. En 1993, il en donne une version, illustrée par Hélène Roinel, sous le titre Les trois pêches. — ROINEL, Hélène, CALINDRE, Henri, HÉDÉ, Arsène, [et al.], Contes et Histoires du Pays Gallo, Le Ploërmelais, 1993. [pages 90-94] —
Les trois Jean de Brocéliande est une adaptation de Jean l’ours d’Adolphe Orain. Patrick Lebrun a repris la première partie de ce conte en la modifiant légèrement et en la localisant en Brocéliande. — ROINEL, Hélène, CALINDRE, Henri, HÉDÉ, Arsène, [et al.], Contes et Histoires du Pays Gallo, Le Ploërmelais, 1993. [pages 86-89] —
Le grand hébété est un conte d’Ernestine Lorand publié en 1999. Il s’inspire de Jean l’hébété, conte publié en 1904 par Adolphe Orain, sur le thème - commun en Ille-et-Vilaine et dans le pays de Brocéliande - des aventures comiques d’un candide. — CARREFOUR DE TRÉCÉLIEN, Contes et légendes de Brocéliande, Terre de Brume, 1999. [pages 202-209] —
Le recteur fantôme est l’adaptation en conte par Jean Markale de la croyance en un prêtre fantôme sur la commune de Paimpont, collectée par Adolphe Orain en 1882. — MARKALE, Jean, Contes et légendes de Brocéliande, Ploërmel, Les Éditions du Ploërmelais, 1961, 48 p. —
Chansons de Brocéliande
Adolphe Orain a collecté de nombreuses chansons dans la région de Brocéliande, auprès de ses sources préférées comme Marie Niobé du village du Cannée en Paimpont mais aussi dans les villages environnants, Plélan, Maxent, Campénéac...
- Le grand loup du Bois
Chanson des patous de la lande de Lambrun près de la forêt de Paimpont.
- Le battoué cassé
Chanté par Marie Niobé, du village du Canée, commune de Paimpont.
- Les filles des Forges de Paimpont
Ronde bretonne
- Le Gars Mathurin
Recueillie au village de L’Abbaye de Tallouet
- Ma Mignonnette
Chanson des bûcherons de la forêt de Paimpont
- Adieu donc, ma chêre Nanon
Chanson du village du Canée, dans la forêt de Paimpont
- Les trois gas de Guer
Chanson de Plélan, dans l’arrondissement de Montfort
- La jeune batelière
Chanson des bords de l’Aff
- Les Conscrits
Chanson de conscrits du canton de Plélan.
- Tu ris, tu ris, bergère
Ronde recueillie à Montfort
- Les Gars des Campénéac
Traditions populaires de la forêt de Paimpont
La curiosité d’Adolphe Orain pour les croyances et traditions populaires ne connait guère de limite ; devinettes, berceuses, dictons, superstitions religieuses, anecdotes, croyances aux êtres fantastiques, l’intéressent.
Il collecte auprès des habitants de la forêt de Paimpont - Marie Niobé du village du Cannée, Jean Ruelland du Pertuis du Faux ou Auguste Provost, cloutier à la Ville-Danet - traditions, us et coutumes.
Au mois d’avril 1885, j’allais faire une excursion dans la forêt de Brocéliande, qu’on appelle aujourd’hui Paimpont.[...] En allant visiter le petit bourg de Concoret [...] je demandais à mon guide Auguste Provost, cloutier à la Ville-Danet, en Paimpont, pourquoi lorsqu’on parlait de Concoret on ajoutait toujours, le pays des sorciers. - Parce que, me dit-il, il y en avait beaucoup autrefois qui demeuraient à Concoret, et qui se réunissaient dans les Crézées (clairières) des bois où dans l’aire à battre le grain des villages environnants.
Les collectes concernant ces traditions de la forêt de Paimpont sont regroupées dans deux ouvrages.
Géographie pittoresque du département d’Ille-et-Vilaine publié en 1882.— ORAIN, Adolphe, Géographie pittoresque du département d’Ille-et-Vilaine - Histoire et Curiosités des 357 communes - Personnages célèbres, Littérateurs, Poètes, Artistes, etc. - Agriculture, Commerce, Industrie.., Rennes, Imprimerie Alph. le Roy fils, 1882. [pages 472]-473 —
Des histoires plus bizarres les unes que les autres , sont encore racontées par les habitants des hameaux cachés dans la forêt.
- Croyances et traditions populaires de Paimpont 41
- Les avénements 42
- La clairière aux garous en forêt de Paimpont 43
- Un prêtre fantôme à Paimpont 44
De la vie à la mort : folklore de l’Ille-et-Vilaine, tomes 1 et 2, publiés en 1897.— ORAIN, Adolphe, De la vie à la mort : folklore de l’Ille-et-Vilaine, Vol. 1, Paris, J. Maisonneuve, 1897, Voir en ligne. — — ORAIN, Adolphe, De la vie à la mort : folklore de l’Ille-et-Vilaine, Vol. 2, Paris, J. Maisonneuve, 1897, Voir en ligne. —
- Fontaine Notre-Dame-des-Chesnes à Paimpont 45
- Fontaine de Barenton 46
- Fontaine Saint-Fiacre à Plélan-le-Grand 47
- Fontaine Saint-Méen et chapelle du Louya à Gaël 48
- Fontaine Saint-Méen à Saint-Méen 49
- Fontaine Saint-Genou à Monterfil 50
- Statue de sainte Onenna de Tréhorenteuc 51
- Le Pas de Saint-Martin en Iffendic 52
- Chapelle Saint-Jouan en Saint-Malon 53
- Une tradition de Montfort 54
- Le Curé de Guer 55
- Les sorciers de Concoret 56
- Les Avènements par Marie Niobé du Cannée en Paimpont 57
- L’enfant mort de Saint-Gonlay 58
- La chasse Artus 59
- La messe des morts du curé de Saint-Méen 60
Le gallo de la région de Montfort, Paimpont et Plélan
Adolphe Orain parle couramment le gallo. Cette maitrise de la langue lui permet de converser avec les habitants des campagnes d’Ille-et-Vilaine. Au cours de ses collectes en forêt de Paimpont et dans les environs, il recueille une trentaine de mots gallos spécifiques à la région, qu’il a intégrés à son Glossaire patois du département d’Ille-et-Vilaine 61 — ORAIN, Adolphe, Glossaire patois du département d’Ille-et-Vilaine, suivi de chansons populaires avec musique, The Internet Archive, Paris, Maisonneuve frères et Ch. Leclerc éditeurs, 1886, Voir en ligne. —
Il y note par ailleurs les spécificités du dialecte de l’arrondissement de Montfort.
D’un autre côté les paysans parlant très vite, et par suite supprimant un certain nombre de syllabes, il est presque impossible à un étranger de suivre la conversation des habitants du fond des terres, et notamment des arrondissements de Redon et de Montfort.
Les mégalithes du massif forestier de Paimpont
Adolphe Orain mentionne quatre mégalithes du massif forestier de Paimpont dans sa Géographie pittoresque du département d’Ille-et-Vilaine publié en 1882.— ORAIN, Adolphe, Géographie pittoresque du département d’Ille-et-Vilaine - Histoire et Curiosités des 357 communes - Personnages célèbres, Littérateurs, Poètes, Artistes, etc. - Agriculture, Commerce, Industrie.., Rennes, Imprimerie Alph. le Roy fils, 1882. —
- Le tombeau de Merlin en Paimpont 62
- La Pierre Longue en Iffendic 63
- Le grès de saint Méen en Talensac 64
- Le cromlech de la Poulanière en Montfort avec une illustration d’Henri Saintain
En 1897, il évoque un autre mégalithe de la région de Brocéliande, Le Pas Saint-Martin dans le bois de Trémelin en Iffendic.
Il existe dans la commune d’Iffendic une dalle en pierre qui semble être un monument mégalithique. Elle a une excavation qui, dit-on, est l’empreinte de l’un des pieds de saint Martin. Pour cette raison, elle est appelée le Pas de Saint-Martin. On s’y rend pour la guérison de la fièvre et on dépose dans l’excavation des sous et des petites croix de bois.