1820-2020
Mégalithes de Brocéliande
Deux cents ans d’intérêt pour les mégalithes du massif forestier de Paimpont
Depuis leur redécouverte au début du 19e siècle, l’intérêt pour les mégalithes du massif forestier de Paimpont a pris des formes diverses.
Considérés par les antiquaires comme des vestiges du culte druidique durant tout le 19e siècle, ces monuments accèdent au début du 20e siècle au statut d’objets archéologiques datés du Néolithique. Durant les 19e et 20e siècle, ils suscitent des intérêts tour à tour archéologiques, historiques, touristiques. Depuis les années 1980, ils font aussi l’objet de croyances liées au néodruidisme ou au « New Age ».
Cet article comporte trois annexes. L’annexe 1 propose une chronologie des découvertes de mégalithes du massif forestier de Paimpont. L’annexe 2 propose d’examiner les cas de quinze d’entre eux, détruits ou introuvables aujourd’hui, afin de comprendre le contexte de leur destruction ou de proposer une hypothèse concernant leur localisation. L’annexe 3 propose la découverte de onze nouveaux sites mégalithiques de Brocéliande découverts entre 1990 et 2020.
Légende de la carte des mégalithes
1791 — La plus ancienne mention d’un site mégalithique en forêt de Paimpont
On doit la plus ancienne mention d’un site mégalithique en forêt de Paimpont à l’abbé Guillotin, prêtre réfractaire à Concoret durant la Révolution. L’abbé relate dans son Registre une tradition concernant les Trois roches de Trébran.
On présume que les moines de Saint-Méen avaient élevé un monument de piété à l’endroit qu’on nomme les trois Roches proche Trébran, attendu que ces trois grosses pierres étaient propres à rappeler le mystère de la Sainte Trinité, et qu’ils avaient une espèce d’ermitage au lieu que l’on nomme la Clôture qui devint une propriété du château de Comper.
Cette première mention, éloignée de toute considération archéologique, donne une origine chrétienne - le rappel de la Sainte Trinité - à ce monument mégalithique.
1820-1846 — Les précurseurs
Au début du 19e siècle, intellectuels et « antiquaires » bretons sont en quête des origines de l’Armorique. Certains d’entre eux s’intéressent aux mégalithes qu’ils considèrent comme des monuments érigés par les druides.
Ces précurseurs de l’archéologie sont surtout des chercheurs de trésors peu soucieux de publier les résultats de leurs recherches. De nombreux sites mégalithiques de la région de Brocéliande portent les traces de leurs exactions. Beaucoup d’objets présents dans les collections privées ou les catalogues des musées proviennent de ces fouilles clandestines.
Forts de leurs découvertes, les antiquaires se regroupent en sociétés savantes et éditent leurs recherches dans des revues régionales. Les premiers sites mégalithiques recensés appartiennent tous aux importants ensembles morbihannais de la région de Carnac. Les premières mentions de mégalithes de la Bretagne intérieure, et en particulier du massif forestier de Paimpont sont publiées dans les années 1820.
1820 — Intérêt pour les mégalithes et localisation de la forêt de Brocéliande
Jean Côme Damien Poignand (1761-1848), juge d’instruction à Montfort-sur-Meu, est le premier auteur du 19e siècle à localiser la forêt de Brocéliande en forêt de Paimpont. Comme tous les intellectuels de son époque, il considère la littérature arthurienne comme le travestissement poétique d’un réalité historique antérieure à son écriture.
Considérant que Merlin et son épouse Viviane ont réellement existé, l’antiquaire montfortais annonce en 1820 la découverte de leurs tombes respectives en forêt de Paimpont. Il dénomme deux allées couvertes, le Tombeau de Merlin et celui de son épouse Viviane. — POIGNAND, Jean Côme Damien, Antiquités historiques et monumentales de Montfort à Corseul par Dinan et au retour par Jugon, Rennes, Duchesne, 1820, Voir en ligne. pp. 140-141 —
L’archéologie en est alors à ses balbutiements, et les arguments avancés par Jean Côme Damien Poignand pour authentifier l’allée couverte des Landails
1 comme étant le véritable Tombeau de Merlin ont été remis en cause. Cette « découverte archéologique », qui peut aujourd’hui prêter à sourire, marque pourtant le début de la redécouverte du passé mégalithique de la forêt de Paimpont.
1825 — Les Buttes aux Tombes
En 1825, le chanoine Mahé (1760-1831) publie un essai sur les antiquités du Morbihan qui mêle superstitions populaires, anecdotes historiques et indications sur les mégalithes. Il s’agit de la première tentative de recensement des menhirs, tumulus et autres monuments attribués à l’époque aux celtes.
Joseph Mahé, qui a été précepteur dans la famille Desgrées du Loû, connait la région et s’appuie sur l’amitié de notables d’Augan ou de Campénéac, comme l’abbé Marot, pour recenser les antiquités celtiques. L’antiquaire y évoque plusieurs sites mégalithiques aujourd’hui disparus comme les deux buttes tumulaires
de Saint-Léry. Il mentionne aussi pour la première fois l’ensemble mégalithique des Buttes aux Tombes, un menhir à Guer - voisin de la Voltaie
- ou des alignements de pierres plates
à Augan.— MAHÉ, chanoine Joseph, Essai sur les antiquités du département du Morbihan, Vannes, Galles aîné, 1825, Voir en ligne. p. 196 —
1846 — Une curiosité arthurienne
Au cours du 19e siècle, l’intérêt pour les mégalithes n’est pas seulement archéologique. Certaines revues comme Le Magasin Pittoresque, mettent en avant leur caractère « sensationnel » à côté de bizarreries diverses. En 1846, un site mégalithique de Paimpont, le « Tombeau de Merlin », est mentionné par cette revue.
Ce curieux monument, qui n’avait jamais été gravé, se voit dans la forêt de Paimpont, située en partie dans le département d’Ille-et-Vilaine, en partie dans celui du Morbihan. Il a le caractère d’un cromlech ou cercle de pierres, et il rappelle tous les souvenirs des chevaliers de la Table Ronde.
La gravure qui accompagne l’article montre peut-être un site mégalithique inconnu, mais prouve plus sûrement que son auteur ne s’est jamais rendu au Tombeau de Merlin.
1847-1897 — Premiers inventaires
Au milieu du 19e siècle, des membres de sociétés savantes - Société Polymathique du Morbihan, Société Archéologique d’Ille-et-Vilaine, etc. - reprennent le travail de recensement des antiquités commencé par le chanoine Mahé dans les années 1820. De nouveaux mégalithes de la forêt de Paimpont sont peu à peu mentionnés dans leurs inventaires.
Cependant, la situation géographique du massif forestier, aux frontières des départements d’Ille-et-Vilaine et du Morbihan, est un frein à leur étude.
Premièrement, les inventaires, réalisés par département, ne considèrent pas les mégalithes du massif dans leur globalité.
Deuxièmement, les préfectures de Rennes et de Vannes où se concentrent les institutions et les sociétés savantes sont éloignées de la forêt de Paimpont. Aussi, rares sont les érudits à venir y recenser les mégalithes. La plupart se contentent d’un travail bibliographique consistant à reprendre le travail de leurs prédécesseurs.
Des érudits locaux de la fin du 19e siècle ont largement contribué à ce recensement des mégalithes. Certains d’entre eux, comme l’abbé Marot, ont fortement contribué aux premiers inventaires mégalithiques. D’autres comme Sigismond Ropartz ou l’abbé Oresve ont fait de précieuses observations sur certains sites comme le Grès Saint Méen. Mais c’est surtout Félix Bellamy qui, agissant en pionnier, a pour la première fois décrit de nombreux mégalithes et livré des observations précises sur leur état dans les années 1890.
1847 — Cayot-Delandre
En 1847, François-Marie Cayot-Delandre, secrétaire de la Société archéologique du département du Morbihan, écrit un inventaire des sites patrimoniaux du Morbihan qui, concernant les mégalithes de la forêt de Paimpont, ajoute peu au travail du chanoine Mahé.
L’érudit y décrit le site des Buttes aux Tombes.
Tréhorenteuc. — Les vestiges du culte druidique se retrouvent sur divers points de cette petite commune. Le plus remarquable de ces monumens est une figure trapézoïdale de 24 mètres sur 5, formée d’une soixantaine de pierres de 1 mètre 30 à 1 mètre 60 de hauteur, et dont une partie sont renversées. Sur le sommet d’un mamelon qu’on nomme Butte des Tombes, on voit les restes de trois tumulus, dont l’un est encore surmonté d’un petit menhir. A peu de distance de ce lieu est un monument nommé Jardin des Tombes ; il a la forme d’une plate-bande élevée d’environ 60 centimètres ; douze pierres l’accompagnent. Deux ou trois autres plates-formes de cette espèce se trouvent dans diverses parties de la commune ; la plus remarquable a 40 mètres de longueur sur 8 de largeur ; elle était bordée de pierres dont un certain nombre sont encore en place ; ces sortes de monumens, que j’ai déjà signalés dans d’autres communes, me paraissent être des sépultures.
Il mentionne aussi la présence de tumuli sur la commune de Saint-Léry.
Saint-léry. — Cette très-petite commune possède deux tumulus voisins l’un de l’autre et élevés d’environ 4 mètres.
1853 — Alfred Fouquet
L’ouvrage d’Alfred Fouquet (1810-1875) paru en 1853 a pour objet d’inventorier les antiquités celtiques et romaines du Morbihan.
Je suis bien loin de penser que ce Catalogue soit complet, je n’ai eu d’autre prétention, en le dressant, que de commencer un édifice auquel tous les Archéologues morbihannais sont invités à ajouter quelques matériaux. Maintenant que nous avons à Vannes une Société dont le but est d’étudier nos antiquités, il est facile à tous ceux qui les aiment, de signaler ceux dont nous n’avons pas parlé. On arrivera ainsi au recensement complet des monuments qui existent encore dans notre département.
Cet inventaire publié trente ans après l’ouvrage de Poignand est encore basé sur les mêmes présupposés historiques faisant des celtes le peuple des origines. L’érudit, qui distingue quatre catégories de peuplades celtiques, classe les mégalithes de Brocéliande dans la catégorie des peuplades celtes des forêts.
Je ne vous entretiendrai pas longuement, Messieurs, des autres peuplades celtes que je vous ai signalées, et même je vous dirai peu de chose de celles-ci, pour trois raisons : la première, c’est que les monuments druidiques y sont bien moins nombreux que dans celles dont j’ai parlé ; la seconde, c’est que ces monuments diffèrent peu de ceux dont j’ai étudié devant vous les formes et les destinations ; la troisième, c’est que ces peuplades n’appartenant pas en totalité au Morbihan, je les connais peu ou mal, surtout dans les autres départements.
La peuplade des forêts s’étend, je crois, dans l’arrondissement de Redon, jusqu’à Messac, au bord de la Vilaine ; et dans l’arrondissement de Montfort, jusqu’à cette ville elle-même. J’ignore entièrement quelles sont ses limites dans les Côtes-du-Nord.
Dans cette peuplade, on trouve des alignements en Langon et en Saint-Just ; des grottes aux fées presque partout, mais entre autres lieux, en Augan, en Ploërmel, en La Chapelle et en Cournon ; des tumulus en Médréac et en Saint-Léry ; des cromlec’hs en Tréhorenteuc ; et enfin un peu de tous ces genres de monuments dans l’antique forêt de Brocéliande, aujourd’hui forêt de Paimpont.
Là encore les descriptions sont sommaires et laissent penser qu’Alfred Fouquet ne s’est pas rendu sur les lieux, avouant d’ailleurs avoir ajouté peu de chose à la nomenclature que Cayot-Delandre a donnée des monuments druidiques, qui sont clairsemés dans cette peuplade.
On trouve, à Carentoir et à Tréhorenteuc, des groupes de menhirs affectant des dispositions toutes particulières, et dont on cherche en vain d’autres exemples dans le Morbihan. Au village du Gage, en Carentoir, des menhirs formés de blocs de quartz sont disposés en pattes d’oie, sur quatre rangées ; et dans Tréhorenteuc on remarque plusieurs plates-formes, dont une a jusqu’à quarante mètres de longueur sur huit de largeur, qui, toutes élevées au-dessus du sol, sont bordées de menhirs. Mais, pour être disposées ici autrement qu’ailleurs, les menhirs ne changent pas pour cela de caractère, et encore moins de destination ; toujours et partout ils marquent des tombes. Le nom de Jardin-des-Tombes donné, à Tréhorenteuc, aux plates-formes bordées de menhirs dont je parle, vient ajouter un argument de plus aux nombreux arguments que j’ai déjà fait valoir pour étayer mon opinion.
1858 — L’abbé Oresve
En 1858, l’abbé Oresve mentionne une dizaine mégalithes de la région de Brocéliande dans son ouvrage consacré à l’histoire de Montfort.— ORESVE, abbé Félix Louis Emmanuel, Histoire de Montfort et des environs, Montfort-sur-Meu, A. Aupetit, 1858, Voir en ligne. —
- Le menhir de Pierre Longue en Iffendic
- Le Grès Saint-Méen en Talensac
- Le menhir de Saint Jouan en Saint-Malon
- Neuf pierres renversées en Saint-Malon
- Le Tombeau de Merlin et de son épouse Viviane
- Le menhir de la Voltais en Guer
- La pierre longue de l’Abbaye en Montfort
- Le menhir de Coulon en Montfort
- Le dolmen de La Prise en Montfort
Les environs de la forêt de Brécilien nous ont conservé quelques monuments de la race celtique, qui attestent l’honneur qu’on y rendait au druidisme. Nous allons parler de ceux que nous avons vus et examinés.
1862 — L’abbé Brune
Le premier essai d’inventaire du patrimoine archéologique du département d’Ille-et-Vilaine est l’œuvre de l’abbé Brune 2 en 1862. L’érudit de la Société Archéologique d’Ille-et-Vilaine ne relève qu’un seul mégalithe pour l’ensemble des cantons de Montfort, Plélan et Montauban de Bretagne, la Pierre longue d’Iffendic.
IFFENDIC. — Époque celtique : Un menhir placé sur une éminence au sud-ouest du bourg, près du village de Vausavelin.[...]
1863 — Louis Rosenzweig
L’archéologue Louis Rosenzweig est l’auteur d’un inventaire des sites archéologiques du Morbihan, dans lequel les monuments mégalithiques sont considérés d’époque celtique. Les sites mégalithiques de la forêt de Paimpont sont repris à la nomenclature de Cayot-Delandre parue en 1843 à l’exception des « Pierres-Gouffier » en Mauron, qu’il classe dans la catégorie des dolmens.
MAURON. Ép. celtique. Près de la Saudraie, dolmen détruit nomme Pierres-Gouffier (Catal.).[...] NEANT. Ép. celtique. Au Jardin des Moines, chaussée et menhirs (Catal.).[...] SAINT-LÉRY. Ép. celtique. Deux tumulus voisins l’un de l’autre et élevés d’environ 4 mètres (C. D.).[...] TRÉHORENTEUC. Ép. celtique. Monument trapézoïdal de 24 mètres sur 5 mètres, formé d’une soixantaine de pierres de 1m 30 à 1m 60 de hauteur, en partie renversées (C. D.). — Sur le sommet d’un mamelon nommé Butte des tombes, restes de 3 tumulus dont l’un surmonté d’un petit menhir (ibid.). — A peu de distance de ce lieu, monument nommé Jardin des tombes, sorte de plate-bande élevée d’environ 0m 60, accompagnée de 12 pierres (ibid.). — Deux ou trois autres monuments de la même espèce en divers points de la commune (ibid.).
Louis Rosenzweig mentionne aussi deux sites mégalithiques en limite du massif forestier de Paimpont : les débris d’une « roche aux fées » à proximité du vallon Saint-Couturier en Augan - La niche à Gabineau - et près du village de Brambelec en Campénéac
- L’allée couverte de Brambelay.
1883 — Paul Bézier
Le premier inventaire officiel des mégalithes d’Ille-et-Vilaine est réalisé pour répondre à un souhait émis le 5 décembre 1878 par la Société d’anthropologie de Paris qui envisage de classer « monument historique » certains mégalithes de France et d’Algérie. Un questionnaire est adressé aux personnes chargées de réaliser l’inventaire. Celles-ci commencent leur travail de prospection dans leur département en se faisant seconder par des bénévoles.
En Ille-et-Vilaine, ce travail est réalisé par une commission de trois personnes, M. Danjou, l’abbé Guillotin de Corson et Paul Bézier. Ce dernier est chargé de l’édition du rapport. Le premier tome parait en 1883 — BÉZIER, Paul, Inventaire des monuments mégalithiques du département d’Ille-et-Vilaine, Rennes, Ch. Catel, 1883, Voir en ligne. — le second en 1886. — BÉZIER, Paul, Inventaire des monuments mégalithiques du département d’Ille-et-Vilaine - Supplément, Rennes, Ch. Catel, 1886, Voir en ligne. —
Le recensement de Paul Bézier mentionne neuf mégalithes.
- La pierre longue et La Pierre Saint Martin en Iffendic
- Le Grès Saint-Méen en Talensac
- La Pierre droite en Maxent
- La Grosse Roche en Monterfil
- Le cromlech de la Poulanière en Montfort
- La pierre longue de l’abbaye en Montfort
- Le Tombeau de Merlin en Paimpont
- Le Menhir de Saint Jouan en Saint-Malon
1896 — Félix Bellamy
En 1896, Félix Bellamy fait paraitre une somme inégalée sur la forêt de Brocéliande. L’érudit y inclut un recensement des vestiges archéologiques du massif forestier permettant de situer de nombreux sites mégalithiques de la forêt de Paimpont, dont certains aujourd’hui sont introuvables. — BELLAMY, Félix, La forêt de Bréchéliant, la fontaine de Berenton, quelques lieux d’alentour, les principaux personnages qui s’y rapportent, Vol. 1, Rennes, J. Plihon & L. Hervé, 1896, Voir en ligne. —
Félix Bellamy publie les mesures, l’emplacement exact et les traditions associées de quatorze sites archéologiques du massif et parfois leur photographie.
- Les Champs Morgan
- la Butte aux Tombes et le Jardin aux Moines
- la Roche à la Vieille
- l’Hotié de Viviane
- les tombelles de Gurvant
- le Tombeau de Merlin
- l’allée couverte des Brousses noires
- les trois pierres des Vaux
- le Tombeau de la duchesse d’Angoulême
- les alignements de la prise de Comper
- le menhir Saint Jouan
- les menhirs de la Pierre Droite
- Le menhir de Coulon
- Les trois roches de Trébran
- La Roche de Mauron
Malgré une approche plus scientifique que ses prédécesseurs, Félix Bellamy projette lui aussi ses « rêveries » celtiques sur les mégalithes de la forêt de Paimpont.
En rencontrant tout à coup à l’écart, au beau milieu du bois, ces grandes pierres debout et se faisant vis-à-vis, on s’arrête saisi d’étonnement et de respect. On croit avoir surpris une assemblée de vénérables druides enveloppés de leurs robes qui dissimulent leurs bras pendants et les autres parties du corps. Ravis en extase, ils n’appartiennent plus à la terre ; leur esprit est en communication avec l’âme de l’univers, ils l’adorent dans une religieuse contemplation, et dans le silence de la forêt ils scrutent les secrets de la nature. Profane qui vous êtes fourvoyé en ce sanctuaire, hâtez-vous de disparaitre, craignez de troubler les profondes méditations de ces graves philosophes, et laissez les s’amuser et s’abuser dans leurs ténébreuses élucubrations.
1858-1896 — Légendes et traditions populaires
Parallèlement aux premiers inventaires archéologiques, quelques légendes ou traditions populaires associées à des monuments mégalithiques de la forêt de Paimpont sonté collectés au cours de la deuxième moitié du 19e siècle.
1858 — Deux légendes du bois de Montfort par l’abbé Oresve
En 1858, l’abbé Oresve évoque deux légendes associées à des mégalithes du bois de Montfort.
Le Grès Saint-Méen est dans la forêt de Talensac, à la lisière, près du village de la Chapelle-ès-Oresve. Il est ainsi désigné parce qu’une tradition populaire rapporte que saint Méen y aiguisa sa hache et que, l’ayant ensuite balancée, il la lança en disant « où ma hache tombera saint Méen bâtira ».
Une tradition singulière rapporte que lorsqu’on bâtissait le château de Montfort, une fée portait cette pierre dans sa devantière en filant sa quenouille, et que les filets s’étant rompus, la pierre tomba et fut abandonnée là.
Ces deux légendes font l’objet de versions développées par Édouard Vigoland, en 1895, dans le dernier chapitre de son livre consacré à l’histoire de Montfort. — VIGOLAND, Edouard, Montfort-sur-Meu : son histoire et ses souvenirs, Rennes, Hyacinthe Caillière, 1895. [pages 196-204] —
1863 — Ernest du Laurens de la Barre et le Jardin aux Moines
Ernest du Laurens de la Barre publie Les pierres maudites de Tréhorenteuk, un conte populaire sur le site mégalithique du « Jardin aux Moines » situé en réalité en Néant-sur-Yvel (Morbihan). Une version contemporaine de ce conte est créée par Patrick Lebrun au début des années 1980.
1882-1897 — Adolphe Orain et le Pas Saint-Martin
En 1882, Adolphe Orain publie un inventaire du patrimoine des communes d’Ille-et-Vilaine dans lequel il mentionne quatre monuments mégalithiques du massif forestier de Paimpont. — ORAIN, Adolphe, Géographie pittoresque du département d’Ille-et-Vilaine - Histoire et Curiosités des 357 communes - Personnages célèbres, Littérateurs, Poètes, Artistes, etc. - Agriculture, Commerce, Industrie.., Rennes, Imprimerie Alph. le Roy fils, 1882. —
- La Pierre Longue en Iffendic 3
- Le cromlech de la Poulanière en Montfort
- Le Grès de saint Méen 4
- Le tombeau de Merlin en Paimpont 5
En 1897, il évoque un mégalithe de la région de Brocéliande, Le Pas Saint-Martin dans le bois de Trémelin en Iffendic.
Il existe dans la commune d’Iffendic une dalle en pierre qui semble être un monument mégalithique. Elle a une excavation qui, dit-on, est l’empreinte de l’un des pieds de saint Martin. Pour cette raison, elle est appelée le Pas de Saint-Martin. On s’y rend pour la guérison de la fièvre et on dépose dans l’excavation des sous et des petites croix de bois.
1896 — Félix Bellamy et les Trois Roches de Trébran
En 1896, Félix Bellamy évoque la légende des Trois Roches déposées à Trébran par une vieille femme.
Elles furent apportées, disent les gens, par une vieille femme qui en avait une sur le dos et une sous chaque bras, et qui les laissa tomber là où elles sont, et d’où personne ne les a bougées depuis.
L’érudit de Brocéliande fait le lien entre cette légende et celle des Champs Morgan près de la Saudraie en Mauron.
1928 — Paul Banéat et la Grosse Roche de Monterfil
Paul Banéat mentionne des légendes associées à la Grosse Roche de Monterfil.
A 700 m. à l’est du village [de la Bouëxière], sur la lande de Grosse Roche, près du village des Rochelles, se voit un bloc de grès dur appelé Grosse Roche qui semble être simplement un affleurement ; les fées, dit la tradition, l’ont apporté en cet endroit ; il présente des bassins naturels et mesure 6 mètres de longueur, 3 m 50 de largeur et 3 mètres de hauteur. La légende y voit aussi un caillou que Viviane portait dans son tablier et qu’elle laissa tomber pour échapper à la poursuite de Merlin.
1913-1936 — L’intérêt pour les mégalithes dans la première moitié du 20e siècle
L’intérêt pour les mégalithes en Brocéliande se diversifie dans la première moitié du 20e siècle : classements au statut de monuments historiques, intégration aux itinéraires touristiques et inventaires archéologiques. On peut citer le travail du marquis de Bellevüe sur les mégalithes du Camp de Coëtquidan, la mention de plusieurs monuments dans le Guide du Touriste dans la Forêt de Paimpont en 1926, la classification de deux sites mégalithiques ainsi que l’inventaire départemental de Léon Collin qui recense plusieurs mégalithes du massif forestier en 1931 6.
Le marquis de Bellevüe et les mégalithes du camp de Coëtquidan
En 1913, Xavier de Bellevüe publie un ouvrage sur l’histoire du camp de Coëtquidan dans lequel il s’insurge contre les conséquences de son extension sur le patrimoine. Le premier chapitre est consacré à un inventaire des mégalithes dans lequel il dénombre trois dolmens ainsi que de nombreux sites qui n’ont depuis jamais été mentionnés.
La période celtique est représentée dans l’emprise du camp par les dolmens, ou roches aux fées de Roherman, de la Villemarqué et de Brambellé ; un galgal [cairn], des menhirs et des tumuli ou tombelles.
Il indique aussi la présence de sites mégalithiques détruits par les tirs d’obus au moment de l’extension du camp (voir Annexe 2).
Au sommet, vers le Nord de celle des buttes du Bois-du-Loup, qui est appelée la « Grande-Bosse », existait autrefois un galgal important, formé d’un amas considérable de grosses pierres, et qui a été fouillé vers 1850.
Sur tout le territoire de Coëtquidan sont aussi beaucoup de tumuli ou tombelles. Quelques uns de ces monuments ont été fouillés, notamment en 1820 et en 1899 ; et on y a trouvé des ossements calcinés, du charbon, et des haches en bronze de petit format, dont il existait des spécimens au château du Bois-du-Loup. Actuellement, il serait difficile de découvrir ces tumulus tant le sol a été dévasté par les obus.
1919-1926 — Première mention du menhir de Boutavent
L’immense majorité des guides publiés à partir de 1868 ne mentionne que le Tombeau de Merlin, évoqué pour sa seule dimension arthurienne. — DU BOIS DE PACÉ, Brocéliande en deux journées, Guide du touriste à la forêt de Paimpont, Rennes, Typographie Alphonse Leroy fils, 1868, Voir en ligne. —
Le Guide du Touriste dans la Forêt de Paimpont, édité en 1919 puis réédité en 1926, recense plusieurs mégalithes de la forêt de Paimpont. S’il indique comme ses précurseurs l’intérêt touristique du Tombeau de Merlin, il mentionne aussi le Jardin aux Moines, les Buttes aux Tombes, ainsi que des mégalithes méconnus ou ignorés.
A hauteur du hameau de Trébran, reconnaissable à son énorme chêne poussé en contrebas de la chaussée, se trouvent trois mégalithes de poudingue rose et blanc. Le plus gros à 3 m 50 de long et 2 m. 50 d’épaisseur. Couchés à 15 m l’un de l’autre, sur un même alignement, ils semblent être les fragments d’un gigantesque menhir.
S’engager sur la ligne forestière qui tombe sur la route de Saint-Péran à Iffendic. — Là, à droite vers Iffendic — 500 mètres avant la sortie de la forêt, à 50 pas sur la droite. Beau menhir brisé en poudingue rose et quartz blanc ; la partie restée debout atteint 2 m. 50 de haut ; de gros blocs provenant de la partie supérieure, gisent à l’entour.
Malgré cette mention, le site mégalithique de Boutavent reste ignoré des inventaires archéologiques jusqu’au début des années 1980.
1926-1934 — Des mégalithes classés « Monuments historiques »
Au cours des années 1920-1930, les mégalithes entrent progressivement dans la catégorie des sites patrimoniaux à préserver par une classification. Deux d’entre eux accèdent à ce statut.
- Le Grès Saint-Méen à Talensac, est classé
Monument historique
par arrêté du 14 mai 1926.
- Le Tombeau de Merlin est l’un des trois sites de la commune de Paimpont 7 classé par arrêté du 6 novembre 1934 parmi les
monuments naturels et les sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire et pittoresque.
1928 — Paul Banéat
Paul Banéat recense treize mégalithes dans son inventaire du patrimoine d’Ille-et-Vilaine paru de 1927 à 1929. — BANÉAT, Paul, Le Département d’Ille-et-Vilaine. Histoire, archéologie, monuments, Vol. 2, Rééd. 1973, Paris, Librairie Guénégaud, 1928. —
- Le menhir de la Pierre Longue en Iffendic
- Le Pas Saint Martin en Iffendic
- La Pierre Droite de Maxent
- La Grosse Roche en Monterfil
- Le menhir de Coulon en Montfort
- Les menhirs de la Prise de Comper en Paimpont
- La Pierre Drette en Paimpont
- L’allée couverte des Brousses Noires en Paimpont
- La pierre des Hindray en Paimpont
- L’Hôtié de Viviane en Paimpont
- Le Tombeau de Merlin en Saint-Malon
- Le menhir de Saint Jouan en Saint-Malon
- Le grès Saint-Méen en Talensac
1931 — Léon Collin
En 1931, Léon Collin fait paraitre un inventaire des mégalithes d’Ille-et-Vilaine. Cette étude ne recense aucun nouveau mégalithe, se contentant de reprendre le recensement réalisé par Paul Bézier en 1883. — COLLIN, Léon, « Quelques monuments mégalithiques de l’Ouest de l’Ille-et-Vilaine », Bulletin et mémoires de la Société archéologique du département d’Ille-et-Vilaine, Vol. 57, 1931, p. 9-41, Voir en ligne. —
Léon Collin recense sept monuments sur le massif forestier de Paimpont :
- Le menhir de la Pierre Longue et le Pas Saint-Martin en Iffendic
- La Grosse Roche en Monterfil
- Le Grès Saint-Méen en Talensac
- Le menhir de la lande de Saint-Jouan en Saint-Malon-sur-Mel
- Le Tombeau de Merlin en Paimpont
- Le menhir de la Pierre Droite en Maxent
1936 — Le menhir du Vaugriot
Le « menhir du Vaugriot », aujourd’hui introuvable (voir Annexe 2), était situé à proximité de l’allée couverte du Rocher en Concoret. Il est mentionné en 1936 par M. Josso, instituteur à Mauron et membre de la Société Polymathique du Morbihan.
Menhir du Vaugriot en Concoret (Morbihan).— Ce menhir couché vers l’Est et incliné sur l’horizon de 30° environ, mesure 3m60 de long sur 2m50 de large. Notre confrère M. Josso, instituteur public à Mauron, a mis au jour, à la base du monolithe et encore en place, les grosses pierres qui servaient à le caler. Ce menhir se trouve à l’extrémité d’un monticule allongé qui parait inviolé. Quelques sondages ont amené la découverte d’une maçonnerie de pierres sèches. Il serait intéressant de continuer ces fouilles et de dégager notamment ce muraillement.
1945-1964 — Théories et inventions de l’abbé Gillard
L’abbé Gillard est nommé recteur de Tréhorenteuc en 1942. Dès 1945, il commence à publier des opuscules sur la forêt de Paimpont et ses légendes. Il est le seul auteur des années 1950-1960 à porter attention aux mégalithes de la forêt de Paimpont. Ses écrits à la fois délirants et inspirés, ont suscité des émules ainsi que des réactions controversées.
1950 — « On croit rêver »
En 1950, L’abbé Gillard évoque le site mégalithique des Buttes au Tombes qu’il définit comme un cimetière druidique
.
Ce cimetière comprend un grand nombre de monuments. [...] Il se compose d’une masse de terre meuble [...]. Toute cette terre a été ramassée au moyen de paniers et de civières pour recouvrir les cendres des morts que les druides brûlaient en cet endroit.
Ces inventions de l’abbé Gillard sur les Buttes aux Tombes sont l’objet de critiques virulentes de la part de la Société Polymathique du Morbihan.
Sous la rubrique Tréhorenteuc, un journal régional signalait ces temps derniers, la découverte d’un menhir, « tombé de son socle », non loin d’un tumulus surmonté de deux pierres « druidiques ». Ce tumulus nommé Butte aux Tombes contiendrait de « nombreux monuments funéraires sacrés ». De tout cela, notre découvreur fait état et brode sur « l’activité des druides de la vallée » de Tréhorenteuc et, plus tard au temps de l’invasion romaine, du côté de la fontaine de Barenton où « s’établit, écrit-il, une des plus importantes écoles druidiques ». On croit rêver lorsqu’on lit de pareilles fantaisies bonnes tout au plus à répandre des erreurs qui avaient cours, peut-être, au temps du romantisme mais qui ne sont plus de mise aujourd’hui. Propager l’erreur, c’est servir le vandalisme, et le rôle des sociétés du genre de la nôtre est de dénoncer cette tendance pernicieuse.
1964 — Yves Coppens et l’abbé Gillard
En 1964, Yves Coppens 8, alors chercheur au laboratoire de l’Institut de paléontologie du Muséum national d’histoire naturelle, rend lui aussi compte des théories du recteur de Tréhorenteuc.
Enfin je ne saurais terminer ce chapitre du Néolithique sans envisager l’étonnante plaquette que vient de publier le recteur de Tréhorenteuc aux éditions du Ploërmelais, mélange d’imagination poétique et de « clairvoyance » qui ne manquera pas de laisser pantois tous les Préhistoriens qui se sont précédemment attachés au problème de l’interprétation des gravures dolméniques.
Oscillant entre reproches et admiration, Yves Coppens voit dans les théories de l’abbé Gillard sur les mégalithes une approche extravagante méritant toutefois l’intérêt.
L’auteur présente d’abord ses victimes, les Monuments mégalithiques : « les Alignements de Carnac qui, à l’origine, partaient toujours d’un tumulus et étaient jalonnés sur toute leur longueur mais d’un seul côté par un véritable chapelet d’autres tumulus, se répartissent en 4 champs dont les noms : Ménec : Mémorial, Kermario : Cité des Morts, Kerlescan : Cité des Cendres et Menée- Vihan : Petit Mémorial, ne laissent subsister aucun doute sur leur destination. Ils furent construits entre 2300 et 2000 avant Jésus-Christ sur l’initiative de Missionnaires égyptiens, les Missionnaires des Mégalithes comme on les appelle, par des gens à tête allongée qui arrivent à Carnac, aux appels des Prêtres, avec leurs morts en urnes ou en sacs. [...] » II est bien évident que la plupart des signes dolméniques sont cultuels, que leurs associations peuvent correspondre parfois à un texte ou une idée et qu’il doit y avoir plus d’un lien entre la religion des bâtisseurs de Mégalithes et celle des bâtisseurs d’Églises puisque toutes deux ont pris naissance sur les bords de la Méditerranée orientale ; mais il est aussi évident que cette correspondance de symboles est un prêche, Monsieur le Recteur ! Nous ne sommes pas moins admiratifs devant cette imagination et cette aisance et une telle démonstration, par sa simplicité et son audace valait qu’on s’y attarde.
1971-1978 — Renouveau archéologique en Brocéliande
1971 — Le mémoire de maîtrise de Paul Henry
Neuf menhirs ou alignements de menhirs du massif forestier sont mentionnés dans un mémoire de maîtrise rendu par Paul Henry en 1971 à l’Institut armoricain de recherches historiques dépendant de l’Université de Haute-Bretagne. On y trouve notamment la première mention du menhir de la Ville-Guichais en Saint-Malon-sur-Mel.— HENRY, Paul, Les menhirs des arrondissements de Rennes et Saint-Malo, Mémoire de maitrise, Université de Haute-Bretagne, 1971, 277 p. —
- La Pierre Longue en Iffendic
- La Pierre Droite de Maxent
- Les menhirs de la Pierre Drète en Paimpont
- Les menhirs de la Prise de Comper en Paimpont
- Le tombeau de la Duchesse d’Angoulême en Paimpont
- Le menhir de la Pierre Longue de l’abbaye de Montfort
- Le menhir de la Ville-Guichais en Saint-Malon-sur-Mel
- Le menhir de Saint-Jouan en Saint-Malon-sur-Mel
- Le Grès Saint Méen en Talensac
1975-1978 — Le renouveau archéologique du pays de Guer
Le docteur Molac, de l’Association des Amis des Monuments civils et religieux de Guer et ses environs, est à l’initiative de la redécouverte archéologique des mégalithes du pays de Guer à la fin des années 1970.
- 1975 — Le coffre de la Ville Costard en Augan
Le coffre de la Ville-Costard, situé à 3 km à l’est du bourg d’Augan, est découvert en juillet 1975 au cours de travaux de terrassement près d’un four à pain du hameau. Il est en cours de démolition lorsque le docteur Roger Molac alerte les autorités archéologiques. La fouille est menée par l’archéologue Michel Le Goffic. Le coffre est détruit par la suite.
- 1978 — L’inventaire des mégalithes du Pays de Guer
L’Association des Amis des Monuments civils et religieux de Guer et ses environs, dont l’un des buts est la protection des monuments locaux ayant un caractère historique ou archéologique, a prospecté au cours de ces dernières années les vestiges de la civilisation mégalithique sur une superficie de 600 km2 environ, comprenant la partie à l’est de l’Oust du canton de Malestroit, la moitié nord du canton de La Gacilly, l’ensemble du canton de Guer avec une incursion en forêt de Paimpont.
Dix mégalithes situés dans notre zone d’étude sont recensés dans cet inventaire.
- L’alignement des bois de Coëplan en Guer
- Un menhir de Comper en Paimpont
- Le dolmen de Lémo en Augan
- L’allée couverte de la Brousse Noire en Paimpont
- Le Tombeau de Merlin en Paimpont
- L’Hôtié de Viviane en Paimpont
- Le site mégalithique de la Ville-Boscher en Guer
- L’allée couverte de la Coudraie en Augan
- l’allée couverte de Brambelay en Augan
- L’allée couverte de Roherman en Augan
1979-1992 — Mégalithes et guides touristiques
Entre 1950 et 1980, l’intérêt pour le patrimoine mégalithique est peu marqué dans les publications destinées aux touristes. Les guides ne mentionnent que le Tombeau de Merlin, évoqué pour sa seule dimension arthurienne. À partir de 1979, deux guides rompent avec ce désintérêt, contribuant à la redécouverte et à la valorisation des mégalithes de la forêt de Paimpont.
1979 — Le premier guide sensible au patrimoine mégalithique
Un guide touristique publié en 1979, enrichi dans les éditions de 1982 et 1985, rompt avec l’approche traditionnelle des circuits de découverte de la forêt. Cette nouvelle approche consiste à mettre en avant la culture et le patrimoine local jusqu’ici négligé au profit du légendaire arthurien.
Le Pays de Brocéliande a su tirer parti de toutes ces influences pour se créer une identité culturelle vivante et très riche, parfois ignorée, souvent méconnue et presque toujours dévalorisée comme il en va de toutes les cultures rurales.
Outre le traditionnel Tombeau de Merlin, huit mégalithes de la forêt de Paimpont y sont mentionnés.
- Le Tombeau de la duchesse d’Angoulême
- Le Tombeau de Merlin
- Le Tombeau des Anglais
- Les trois roches de Trébran
- Les Buttes aux Tombes
- La Butte Ronde
- Le Tombeau des Géants
- L’Hotié de Viviane
1988 — Le Topo Guide
Le Topo guide de Brocéliande, publié à partir de 1988, montre l’intérêt croissant du public pour les mégalithes. Un article cosigné par Jacques Briard et Guy Larcher retrace les résultats des fouilles archéologiques menées à l’Hotié de Viviane, au Tombeau des Géants et au Jardin aux Moines entre 1982 et 1985. — F.F.R.P., Tour de brocéliande, FFRP, 1988, 96 p. —
L’édition de 1992 évoque treize sites mégalithiques, proposés à la découverte des randonneurs. — F.F.R.P., Tour de brocéliande, FFRP, 1992, 159 p. —
- Le Grès Saint Méen
- La Maison de Viviane
- Le Tombeau de Merlin
- La pierre longue
- Les trois roches de Trébran
- Le Tombeau des Anglais
- Le Tombeau des Géants
- Le Jardin aux Moines
- Les Buttes aux Tombes
- La Maison des Folliards près de Ploërmel
- La Niche à Gabineau
- La Roche aux fées à Augan
- La Pierre Drette de Maxent
1979-1985 — L’archéologie contemporaine
L’archéologie des mégalithes de Brocéliande commence véritablement au début des années quatre-vingts. Elle est liée aux intérêts convergents de plusieurs acteurs pour ce patrimoine.
- l’Association des Amis du Moulin du Châtenay créée en 1979
- L’archéologue Jacques Briard
- L’Association de Sauvegarde du Val sans Retour créée en 1979
- La Station Biologique de Paimpont et son directeur Paul Tréhen
L’action concertée de ces acteurs conduit à la réalisation d’un programme de fouilles archéologiques mené par Jacques Briard de 1982 à 1985.
Le renouveau archéologique de Brocéliande est récent. On le doit à l’action du groupe du Châtenay, qui retrouva nombre de monuments oubliés depuis le début du siècle et à la présence de la Station biologique de Paimpont, qui a fourni un support matériel et spirituel à la reprise des travaux scientifiques en forêt. Grace à la compréhension des propriétaires des sites, tout un programme de recherche a pu se dessiner à partir des années 1980. Mené avec l’appui des municipalités, de l’Association du Val sans Retour (et l’aide efficace de son président Paul Anselin), l’action s’est concentrée sur trois monuments originaux : l’Hotié de Viviane en Paimpont, le Tombeau des Géants en Campénéac, et le Jardin aux Moines à Néant sur Yvel.
L’association du Moulin du Châtenay
L’association du Moulin du Châtenay est l’un des acteurs majeurs du renouveau de l’intérêt local pour les mégalithes au début des années 1980. Partant des descriptions de Félix Bellamy et autres érudits du 19e siècle, des membres de l’association se mettent en quête de ce patrimoine archéologique.
Pendant près d’un demi-siècle, les mégalithes furent quelque peu oubliés, s’enfouissant progressivement sous la vigoureuse végétation des sous-bois. La mise en place de groupes culturels gallo comme celui du Moulin du Châtenay avec Gérard Lelièvre et Guy Larcher entraina, à partir des années 1975 [en réalité 1979] leur recherche et leur débroussaillage, action à laquelle j’ai eu le plaisir de m’associer.
Le Jardin aux moines est retrouvé en 1981, enfoui sous la végétation, par des membres de l’Association des Amis du Moulin du Châtenay, en particulier Gérard Lelièvre. Ce dernier contacte Jacques Briard, archéologue au C.N.R.S., qui voit un intérêt à entreprendre un programme de fouilles archéologiques en forêt de Paimpont à partir de 1982.
L’association contribue aussi à la redécouverte des mégalithes à travers ses animations et ses publications.
Jacques Briard publie plusieurs articles de vulgarisation dans la revue de l’association pour faire connaitre auprès d’un public local les monuments mégalithiques et les résultats des fouilles archéologiques.
- — BRIARD, Jacques, « Les mégalithes : dolmens, coffres et tumulus, allées couvertes », Le Châtenay - Journal de l’Association des Amis du Moulin du Châtenay, Vol. 1, 1982, p. 7-11, Voir en ligne. —
- — BRIARD, Jacques, « Fouilles archéologiques 1982 : l’Hotié de Viviane ou Tombeau des druides à Paimpont », Le Châtenay - Journal de l’Association des Amis du Moulin du Châtenay, Vol. 6, 1983, p. 15-19, Voir en ligne. —
- — BRIARD, Jacques, « Fouilles archéologiques 1983 : L’Hôtié de Viviane à Paimpont, le Jardin aux Moines à Néant-sur-Yvel », Le Châtenay - Journal de l’Association des Amis du Moulin du Châtenay, Vol. 9, 1984, p. 13-18, Voir en ligne. —
1979-1990 — Mégalithes et valorisation touristique du Val sans Retour
La forêt de Brocéliande est presque intégralement située en Ille-et-Vilaine et ses sites légendaires sur la commune de Paimpont. Des élus du Morbihan, parmi lesquels le maire de Ploërmel Paul Anselin, créent l’Association de Sauvegarde du Val sans Retour en septembre 1979 afin de pouvoir exploiter ce site légendaire majeur, pourtant intégralement localisé en Paimpont. La création de l’association est concomitante du plan départemental de développement économique de l’intérieur du Morbihan par le tourisme. Après étude, le site du « Val sans Retour » est choisi pour permettre le développement touristique des communes morbihannaises qui l’entourent. — CALVEZ, Marcel, Usages productifs, usages touristiques et aménagement d’un territoire, le Val sans retour (1820-1984), Thèse pour le Doctorat de Troisième Cycle en Sociologie, Université de Paris X-Nanterre, 1984, Voir en ligne. —
Le développement touristique du Val passe par une valorisation de son patrimoine naturel, historique et archéologique. Michel Cabaret, avec l’appui de la Station biologique, réalise ce travail d’inventaire dans une étude parue en 1982. Il y recense deux sites mégalithiques du Val, l’Hôtié de Viviane, associé à la légende arthurienne et Le coffre de la Guette, qu’il découvre à cette occasion. — CABARET, Michel, Le Val sans Retour : Étude et propositions de gestion des ressources naturelles, Mémoire de Maîtrise MST AMVR, Université de Rennes 1, 1982, 97 p. —
En 1990, Stéphane Hummel réalise une seconde étude sur le Val, elle aussi initiée par l’Association de Sauvegarde du Val sans Retour et son président Paul Anselin, maitre d’œuvre de cet inventaire et soutenue par la Station Biologique de Paimpont. L’étudiant consacre un chapitre de sa maitrise à la préhistoire, dans lequel il détaille les sites mégalithiques du Jardin aux Moines, de l’Hotié de Viviane, du coffre de la Guette ainsi que du Tombeau des Géants. — HUMMEL, Stéphane, Inventaire du patrimoine naturel, archéologique et architectural du val sans retour, commune de Paimpont (35), Mémoire de Maîtrise MST AMVDR, Université de Rennes 1, 1990. [pages 65-71] —
1982-1985 : Les fouilles de Jacques Briard
L’archéologie moderne en forêt de Paimpont commence véritablement avec le programme de recherche mené par Jacques Briard de 1982 à 1985.
Cet archéologue, spécialiste de l’Âge du Bronze, entreprend des fouilles archéologiques à l’Hotié de Viviane, au Tombeau des Géants, ainsi qu’au Jardin aux Moines.
En 1985, Jacques Briard et Guy Larcher publient un article de vulgarisation sur ces fouilles dans la revue Archéologia. — BRIARD, Jacques et LARCHER, Guy, « Mégalithes en Forêt de Brocéliande », Archéologia, Vol. 199, 1985, p. 30-39, Voir en ligne. —
Les découvertes archéologiques réalisées par Jacques Briard sont développées dans un numéro spécial des DAF (Documents d’Archéologie Française) paru en 1989. Cette publication inclut les études associées aux fouilles - géologie, céramologie, palynologie. — BRIARD, Jacques, Mégalithes de Haute-Bretagne. Les monuments de la forêt de Brocéliande et du Ploërmelais, structure, mobilier, environnement, Vol. 23, Paris, Maison des Sciences de l’Homme, 1989. —
En 2004, un ouvrage posthume 9 de vulgarisation sur les mégalithes de la forêt de Brocéliande recense de nombreux mégalithes dont certains sont absents des inventaires officiels. Ils sont accompagnés de photographies couleurs de Guy Larcher. — BRIARD, Jacques et LARCHER, Guy, La préhistoire en Brocéliande, Éditions Gisserot, 2004. —
Durant les quelques années de présence de Jacques Briard sur le massif forestier plusieurs campagnes de prospections ont été initiées favorisant la découverte de momunents mégalithiques inédits.
Plusieurs séries de campagnes de prospections archéologiques ont été menées lors des fouilles. Ainsi un petit coffre inédit a été découvert par M. Cabaret, du PIREN, au Nord du village de la Guette et deux allées couvertes inédites, assez endommagées cependant, ont été signalées par G. Larcher, Lorgeril à Paimpont et Le Rocher à Concoret. Deux petites tombelles ont également été découvertes en Paimpont, l’une à 300 m au Sud de la Croix-Lucas, au bord du chemin séparant l’ille-et-Vilaine du Morbihan, l’autre dans le vallon séparant la crête de Rauco du hameau de la Touche-Guérin, à 500 m au Sud de la voie de desserte.
1989-1991 — Deux sondages archéologiques
- 1989 — Sondage et prospection dans l’environnement du Tombeau des Géants
Une intervention archéologique menée par Guy Larcher a lieu du 24 décembre 1988 au 13 janvier 1989 dans l’environnement du Tombeau des Géants. Elle consiste en un sondage et des opérations de prospection motivées par le reboisement des parcelles.— LARCHER, Guy, « Sondage et prospection en Campénéac près du Tombeau des Géants », 1989, p. 13, Voir en ligne. —
Cette intervention archéologique permet d’envisager la présence d’un groupement mégalithique complexe, peut-être centré sur le petit alignement du « Tombeau du Géant ».
Les résultats n’ont pas conduit à l’ouverture d’un chantier de sauvetage ou à l’arrêt des travaux de reboisement.
- 1991 - Le sondage de Gilles Leroux dans le Val-sans-Retour
Une allée couverte ruinée située entre la vallée du Porgoret et l’Hotié de Viviane a été repérée par le docteur Molac dans les années 1970 puis sondée par Gilles Leroux en 1991.
1951-2020 — « Néo-mégalithes » et néodruidisme
Au cours du 20e siècle, l’archéologie des mégalithes montre qu’ils ont été érigés au Néolithique et à l’Âge du Bronze. Pourtant, la croyance en leur origine druidique perdure, notamment dans les mouvements néodruidiques.
Des organisations néodruidiques actives sur le massif forestier de Paimpont ont construit des « mégalithes contemporains ». Depuis les années 2000, ils utilisent des sites archéologiques - comme l’Hôtié de Viviane - pour leurs cérémonies.
Un cercle de pierres, ou cromlech a été construit pour la cérémonie druidique du gorsedd digor de 1951 à Tréhorenteuc dans une clairière, à proximité de la « vallée du Gros Chêne ». Le cromlech a été en partie détruit depuis.
De 1964 à 1969, les réunions annuelles de la Gorsedd de Bretagne, ouvertes au public, se déroulent à Paimpont, à l’initiative du SIGTIB (Syndicat d’Initiative et Groupement Touristique Intercommunal de Brocéliande) qui aménage à leur intention un cercle de pierres dressé au bord de l’étang de Paimpont. — RAOULT, Michel, Les druides : les sociétés initiatiques contemporaines, 1996, Editions du Rocher, 1992, 494 p. [page 112] —
À partir de 2008, le Rassemblement des Druides de Bretagne, qui regroupe différents mouvements druidiques bretons organise à l’« Hôtié de Viviane », à l’initiative de Myrdhin, une cérémonie célébrée en breton. — HOFSTEIN, Cyril, « À Brocéliande, dans la forêt des druides », 2013, Voir en ligne. —
1980-2000 — Croyances et dévotions contemporaines
De nouveaux lieux de dévotion populaire
La redécouverte archéologique des mégalithes et leur inscription dans le territoire touristique de Brocéliande s’est accompagnée d’une réappropriation populaire. Depuis les années 1980, des sites mégalithiques de la forêt de Paimpont sont l’objet de nouvelles croyances ainsi que de pratiques dévotionnelles.
Les pierres de Brocéliande sont actuellement le siège de vénérations les plus diverses. Ceux qui croient en leur valeur régénératrice viennent, comme aux alignements de Carnac, y frotter leur corps afin de recueillir les forces telluriques du sous-sol. Au Jardin aux Moines, un menhir brisé en deux que nous avions redressé, fut à nouveau jeté à terre par un de ces adeptes, car en le restaurant nous avions tari la source de son fluide originel. Le culte druidique, le culte arthurien et maintes autres croyances se partagent donc sans heurts la vénération mégalithique. L’exemple le plus évident est bien sûr celui du Tombeau de Merlin où les ex-votos, les messages enroulés dans les anfractuosités des pierres, les bouquets de fleurs, les gris-gris les plus variés se juxtaposent, naïfs messages d’écoliers, vœux de mariage ou de naissance, guérison, espoirs d’avenir meilleurs... On ne peut que respecter ces croyances modernes.
Principal mégalithe de la forêt à être touché par ce phénomène, le Tombeau de Merlin est l’objet de prières dévotionnelles déposées en offrande.
Il s’agit souvent de vœux de bonheur, d’amour, d’argent ou de guérison. Parmi les végétaux et les objets retrouvés, on remarque parfois une orange ou une pomme. Il peut également y avoir des découvertes plus insolites : présence d’un préservatif usagé ou d’une photo de femme avec numéro de téléphone au dos. Grace à ce nettoyage régulier, il a été possible d’étudier finement les demandes écrites sur des papiers déposés sur la fente du rocher en février 2016. Sur 60 papiers récoltés, peu sont signés, mais la majorité concerne des français. Quatre espagnols, un allemand et un canadien s’ajoutent à cette liste. Quatre papiers sont des demandes faites par des enfants. Les magnétiseurs et les radiesthésistes fréquentent cette pierre comme le prouvent deux cartes de visite : l’une d’un magnétiseur de Lille, l’autre d’une bio-énergéticienne enlacée dans une couronne de genêt. Ces écrits s’adressent à Merlin, à Dieu ou bien aucune personne n’est citée. Parmi les vœux exprimés, une majorité demande d’avoir une vie heureuse pour eux et leurs proches : ils n’expriment pas de problèmes particuliers, ils souhaitent seulement du bonheur, de l’argent, de l’amour, de la santé et/ou du travail. Une plus faible proportion exprime un problème à résoudre : guérison de douleurs, de maladie, apport d’une aide particulière.
New Age et croyances cosmo-telluriques
À partir du début des années 1980, les théories associant mégalithes et druidisme, pourtant démenties par les recherches archéologiques, se croisent avec une approche cosmo-tellurique et énergétique « New Age ».
Des auteurs comme Alan-Morvan Chesneau ou Jacques Pegeaud décrivent les mégalithes de la forêt de Paimpont comme des hauts-lieux d’énergie
sur lesquels les druides, descendant des Atlantes, se seraient livrés à des pratiques cultuelles cosmo-telluriques.
On peut penser que les Atlantes n’avaient pas, comme nous, perdu le souvenir des connaissances originelles et qu’ils utilisaient pleinement les possibilités de leur cerveau. [...] Bref, les mégalithes sont là et ils ne sont pas tombés du ciel ! [...] Les Atlantes peuplèrent la forêt avec une prédilection pour son centre géographique et culturel : Paimpont. Les menhirs dressés vers le ciel comme de monstrueux points d’interrogation mégalithiques, les dolmens offerts en autels à la déesse mère, les allées couvertes nécessaires au rituel de la mort et du passage au royaume d’Ouranos, les tumulus dépouillés l’hiver et fleuris l’été, étaient autant de bornes posées aux limites de leur savoir. Ils connaissaient la géométrie, la trigonométrie, les unités de longueur, les mesures d’angles, les quatre points cardinaux et bon nombre de constellations du ciel. Aussi à l’aise dans le temps que dans l’espace, ils tenaient un calendrier perpétuel, connaissaient les effets bénéfiques des courants telluriques, les canalisaient et les utilisaient peut-être...
En 1996, Jean Markale, dans un ouvrage consacré à une approche spirituelle de la forêt de Paimpont, évoque quatre sites mégalithiques - Les Buttes aux Tombes ; Le Jardin aux Moines ; L’Hôtié de Viviane ; Le Tombeau de Merlin.
Cet ouvrage invite le pèlerin, quelle que soit sa religion ou sa culture, à méditer sur les très anciens mythes celtiques enfouis dans les halliers d’une forêt qui est la porte de l’autre monde.
L’approche spirituelle
prônée par Jean Markale n’est pas une excuse aux nombreuses approximations que comporte sa publication sur les mégalithes de la forêt de Paimpont. Les Buttes aux Tombes y sont notamment présentées comme des tombes de période celtique.
[...] On peut découvrir sur ce plateau de nombreuses mottes de terre qui, à première vue, paraissent des excroissances du terrain, mais qui se révèlent à l’analyse être des tertres artificiels datant de l’Age du Fer. Ce sont donc des tumuli celtiques, et l’un d’eux affecte la forme ronde caractéristique de ce que les archéologues anglo-saxons nomment des rounds-barrows [La Butte Ronde].
Or, Jean Markale évoque une analyse inexistante. Le Jardin aux Moines, seul monument des Buttes aux tombes à avoir fait l’objet de fouilles archéologiques, s’avère du Néolithique.
Dans ce même ouvrage, les inventions druidiques de l’abbé Gillard fusionnent avec une approche New Age empreinte de cosmo-tellurisme.
[...] C’est ici un point de rencontre avec les énergies cosmiques venues d’ailleurs, c’est à dire de l’univers extérieur, et les énergies telluriques surgies du centre de la terre [...]. En ces temps anciens, on n’enterrait pas les défunts n’importe où : il fallait que ce fût un emplacement choisi - par intuition ou par savoir - en fonction de certaine vertus, en particulier, à la rencontre des courants telluriques et des courants cosmiques.
À partir de la fin des années 1980, des itinéraires de découvertes de « circuits énergétiques » passant par les mégalithes sont proposés dans des publications à grand tirage.
L’approche cosmo-tellurique de Brocéliande par la localisation des circuits énergétiques va apporter une nouvelle vision de cette forêt mythique.
En 1999, Adolphe Landspurg et Norbert L’Hostis proposent un guide des circuits insolites & des mesures sacrées de Bretagne. Plusieurs sites légendaires de la forêt de Brocéliande sont évoqués, parmi lesquels trois sites mégalithiques : le Jardin aux moines, l’Hotié de Viviane et le Tombeau de Merlin.
L’approche vibratoire des mégalithes les amène à des prises de mesures pseudo-scientifiques censées rendre compte de la dimension mesurable de phénomènes énergétiques.
Nous mesurons au centre du quadrilatère [du Jardin aux moines] une vibration de 250 unités H.L.V. sur le plan II (mental 25), un magnétisme de 100 % et un rapport [cosmo tellurique] de 3/3. la vibration couleur noir électrique correspondant à la dimension radiesthésique de la mort indique que ce monument a dû servir de lieu funéraire. Nous marquons le premier culte marquant du lieu à - 2524.
Là encore le cosmo-tellurisme s’entremêle à des références druidiques démenties par l’archéologie.
A notre grand étonnement, nous ressentons à cet endroit [Tombeau de Merlin] comme une chaleur qui vient du sol et nous traverse notre corps des pieds à la tête. Aucun doute et nos mesures radiesthésiques le confirment, cet endroit privilégié de la forêt de Brocéliande est un haut lieu vibratoire cosmo-tellurique qui devait être connu et utilisé par les druides, grands connaisseurs des forces cosmo-telluriques et des hauts-lieux d’énergie.
Une cérémonie en l’hommage de Nicolas Fediaevsky
Respectant les croyances et dévotions populaires contemporaines associées aux mégalithes, l’archéologue Jacques Briard a lui-même participé à une cérémonie de dispersion des cendres de l’un de ses amis sur le Tombeau de Merlin.
Et je terminerai ici en hommage au photographe Nicolas Fediaevsky, avec lequel j’avais travaillé sur les mégalithes de Bretagne. Après sa mort précoce et tragique, sa mère fit ici disperser ses cendres en un geste rituel des plus émouvants qui se voulait une négation de la mort et un message d’espoir en l’au-delà universel.
Cette cérémonie lui a inspiré un poème en hommage au photographe Nicolas Fediaevsky.
1994-2004 — Inventaires contemporains
D’après Jacques Briard, une cinquantaine de sites mégalithiques existent sur le massif forestier de Paimpont. Ils se répartissent de Montfort-sur-Meu à Campénéac, et de Saint-Malon-sur-Mel à Guer.
Sans nul doute, la légendaire Brocéliande fut l’un des hauts lieux du mégalithisme de Bretagne. Plus d’une cinquantaine de tertres funéraires, d’allées couvertes, de coffres, de menhirs et d’alignements furent érigés dans les clairières de la Haute Forêt, sur les landes des crêtes de schiste rouge, ou à proximité des vallons ombragés propices à l’habitat.
Pourtant, les inventaires contemporains - soumis aux contraintes administratives départementales - n’en recensent que vingt-et-un.
Le premier, publié en 1994, concerne les communes morbihannaises du massif. Il est l’œuvre de l’archéologue Philippe Gouezin et recense huit mégalithes. — GOUEZIN, Philippe, Les mégalithes du Morbihan intérieur : des landes de Lanvaux au Nord du département, Rennes, Institut Culturel de Bretagne - Skol-uhel ar vro - Laboratoire d’anthropologie - Préhistoire (U.P.R. 403 C.N.R.S.) Université de Rennes I, 1994. —
- La Niche à Gabineau, L’allée couverte de la Coudraie et l’ensemble mégalithique du Lémo en Augan
- L’allée couverte de Brambelay en Campénéac
- L’allée couverte du rocher en Concoret
- Le dolmen de La Saudraie en Mauron
- Le Jardin aux Moines en Néant-sur-Yvel
- Les buttes aux tombes en Tréhorenteuc
L’inventaire des mégalithes du département d’Ille-et-Vilaine parait en 2004. Il recense treize sites mégalithiques du massif forestier de Paimpont. — BRIARD, Jacques, LANGOUËT, Loïc et ONNÉE, Yvan, Les mégalithes du département d’Ille-et-Vilaine, Rennes, Institut Culturel de Bretagne - Skol-uhel ar vro - Laboratoire d’anthropologie - Préhistoire (U.P.R. 403 C.N.R.S.) Université de Rennes I, 2004. —
- La Pierre Longue en Iffendic,
- La Pierre Droite en Maxent,
- Le Menhir de Coulon en Montfort-sur-Meu,
- Le Tombeau de Merlin, Le Tombeau de la duchesse d’Angoulème, Le Tombeau des anglais, Les Menhirs de Comper, Les Menhirs de la Pierre Droite, L’Hôtié de Viviane, Le Coffre de la Guette en Paimpont,
- La Pierre Drete et La Chaise de Merlin en Saint-Malon-sur-Mel,
- Le Grès Saint-Méen en Talensac
L’examen de l’ensemble des sources citées dans cet article permet de dénombrer une cinquantaine de mégalithes présentés dans l’Annexe 1 dans l’ordre de leur première mention.
L’Annexe 2 propose d’examiner les cas de douze d’entre eux, introuvables aujourd’hui, afin de comprendre dans quel contexte ils ont été détruits ou de proposer une hypothèse concernant leur localisation actuelle.
L’Annexe 3 propose la découverte de onze nouveaux sites mégalithiques de Brocéliande découverts entre 1990 et 2020.